Août
182C.
Notre navigation, en g é n é ra l, assez tranquille depuis le détroit
de Gibraltar, au trentième degré de latitude méridionale,
commença à se ressentir des fureurs de l’iuver antarctique.
Dès le 11 a o û t , nous essuyâmes un coup de vent du Sud ;
le 1 5 et le 20 nous en eûmes deux autres du S.O. avec une mer
énorme. Dans ces coups de vent, le baromètre ne subit aucune
variation, et le niveau du mercure conserva des stations élevées,
comme 28'' 4‘ , 28'' 5‘ , et même 28'' 6‘ .
Ce fut contre une tempête du Nord que nous eûmes à lutter
dans la nuit du 24 au 25.
Cette fois le baromètre descend à 27' ÿ S . Nous avons atteint
le trente-sixième degré de latitude Sud, et uous repassons
sous le méridien de Paris. Le tliermomètre à l'air est
descendu jusqu’à 10", taudis que les eaux superficielles
se maintiennent entre 12" et 14°. Les paquets de L am m a n a
commencent à paraître.
Nouveau coup dc vent du N .N .O ., le 29 , qui dure toute la
n u it , et q u i , le 3o , au jo u r , devient uue tempête des plus terribles.
Les lames sont monstrueuses, et la corvette fuit sous le
v eu t, avec son petit foc pour toute voilure. La veille du coup
de v e n t , le baromètre avait descendu jusqu'à 27'- 6'-; et au plus
fort de fo u ra g a ii, la température des eaux superficielles était
de 18)5, tandis que celle de l ’air libre variait de 12" à 13° ; aussi
les lames dont nous étions souvent b a igné s , produisaient sur
notre corps l'impression d’une eau à demi tiède.
Le 2 Septembre, uue énorme W e in e dormant à la surface
des eaux, couverte de coquilles et de madrépores, et environnée
d énu é e s de sternes et de pétrels cendrés, se montra
sous la forme d'un rocb er à fleur d’eau. Ce ne fut qu après
avoir vu ce monstrueux cétacé se mettre en mouvement a
notre approche , que nous reconnûmes notre erreur. De semblables
illusions ont pu donner lieu à ces dangers prétendus
que divers navigateurs assurent avoir rencontrés dans ces s«i>i'"'i>n
parages.
Du 5 au soir jusqu’au 10 inclusivement, les vents restent
fixés à l’E.S.E., à l’E.N.E. et au N .E ., généralement frais et accompagnés
de beau temps. Le baromètre s'élève à 28'’ 7' ,
28>’- 8‘ , et même à 28''' gb Le I bermomètre, qui avait baissé ju squ’à
8°, remonte jusqu’à 16 et 17° â l’air libre, comme à la surface
des eaux.
De midi â deux heures , dans la journée du 7 , nous passions
sur la position des soudes du Brunswich, d’a|irès la carte française.
Rien n’annonça la présence d’un haut fond, et il ventait
beaucoup trop pour qu’il fût possible de faire une sonde considérable.
Du 12 septembre au 29 du même m o is , ce ne fut guère
qu’une suite de coups de vent continuels du S.O. au N.O., avec
plu ie , grêle et mers épouvantables. Le jilus souvent IAstrolabe
était réduite à fuir sous le vent avec la misaine et le petit fo c ,
et quelquefois sous cette dernière voile seule. Le baromètre
varia entre 27'’ io ',5 et 28'' 5' ; le thermomètre à l ’air entre 6
et i 3°, et à la surface de la mer eutre 11 et 16°. La température
des eaux était habituellement plus élevée que celle de l ’air
de deux ou trois degrés.
J’avais dirigé ma route de manière à passer entre les îles
Amsterdam et Saiiit-Paul ; je comptais même visiter celle-ci.
En e ffe t, dans la matinée du 2 1 , nous dûmes ranger à quelques
milles au N. la poiute septentrionale de Saint-Paul; mais
le temps était si détestable et l’horizon si chargé que nous ne
vîmes rien du tout. Nous n’eûmes connaissance de la proximité
de la terre que par les paquets de laminaria pyrifera que
nous vîmes flotter à la surface des e au x , aussitôt que nous
eûmes dépassé le méridien de ces îles.
Voyage de ¡Astrolabe. ¿^5