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On sent aisément que, d’après cette supposition , les
deux jeux et les deux narines auroient dû, à la fin de
l’action de la force comprimante, se trouver situés ou
à droite ou à gauche, suivant le côté vers lequel la
puissance auroit fléchi sa direction; et c’est en effet
ce qu’on observe dans les pleuronectes , et ce qui
forme le caractère distinctif du genre qu’ils composent.
Tout le monde sait que les animaux tant vertébrés
que dénués de vertèbres, animés par un sang rouge
ou nourris par un sang blanc, ont des Jeux plus ou
moins gros, plus ou moins rapprochés, plus ou moins
élevés, plus ou moins nombreux; mais aucun animal,
excepté les pleuronectes, ne présente dans ses jeux une
position telle, que ces organes soient situés uniquement
à droite ou à gauche de l’axe qui va de la tête
à l’extrémité opposée. Nous ne connoissons du moins,
dans ce m om ent, que les pleuronectes qui n’aient
pas leurs jeux distribués avec sjmmétrie de chaque côté
de cet axe longitudinal ; et cet exemple unique auroit
dû seul attacher un grand intérêt à l’observation des
poissons que nous allons décrire.
De la conformation que nous venons d’exposer, il
est résulté nécessairement, que les deux nerfs olfactifs
aboutissent non pas à l’extrémité supérieure du
museau, mais à un des côtés de la tête. C’est aussi à*
un seul côté de cette même partie de l’animal que se
rendent les deux nerfs optiques, quoique croisés l’un
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par l’autre, ainsi que dans tous les autres poissons,
et dans tous les animaux vertébrés et à sang rouge.
, Nous avons déjà vu * que le cerveau , cet organe
dont les nerfs tirent leur origine , étoit plus petit
dans les pleuronectes que dans presque tous les poissons
cartilagineux , et même que dans tous les osseux.
La cavité qui contient cette source du sjstême nerveux,
n’a-t-elle pas dû , en effet, être plus petite dans
une tête qui a subi une double et plus grande compression?
; L’os intermaxillaire est moins développé dans le
côté qui a porté l’effort de la seconde aussi-bien que
de la première force comprimante et altératrice.
. Les côtes qui servent à consolider les parois de
l’abdomen , et à donner un peu plus de largeur au
corps, sont cependant si courtes , que plusieurs auteurs
ont nié leur existence.
La cavité du ventre est fermée, du côté de la queue,
par l'apophyse inférieure de la première vertèbre
caudale ; et cette apophjse est très-longue, assez
grosse, arrondie en avant, et terminée en bas par
un piquant ordinairement très-fort.
L’estomac contenu dans cette cavité, paroît comme
un renflement du canal alimentaire. Le pjlore est
souvent dénué d’appendices ou de petits cæcums ;
quelquefois néanmoins on le voit garni de deux ou
* Discours sur la nature des poissons