L’anthias, qui le suit, vit dans la Méditerranée. Son
nom doit venir de owd-oç, qui en gréa signifie fleur -
et cette dénomination, ainsi que celles de beau poisson
et de poisson d’un beau nom *, par lesquelles le
désignoit ce peuple spirituel- et sensible à tous les
genres de beauté, qui habitoit la Grèce, indique le
charmant assemblage des nuances variées et des couleurs
rivales de celles des fleurs, qui chatoient sur les
écailles de l’anthias, et le rajon alongé de sa nageoire
dorsale, qui s’élève au milieu de ces reflets agréables
comme une anthere ou un pistil au sein d’un beau
calice. Tous les tons que le rouge peut présenter,
depuis 1 éclat du rubis ou celui du grenat, jusqu’aux
demi-teintes du rose le plus tendre, se mêlent en effet
sur la surface de l’anthias avec le brillant de l’argent;
et la vivacité scintillante ou la douce fusion de ces
nuances toutes gracieuses plaisent d’autant plus à
l’oeil, quelles se marient avec le feu de la topaze qui
resplendit par reflets fugitifs sur les grandes nageoires
de ce poisson favorisé par la Nature.
Peut-être sa parure n’a-t-elle pas peu contribué à
le faire regarder comme sacré* par un-peuple qui avoit
divinisé la beauté, et qui ne pouvoit voir qu’avec enthousiasme
les emblèmes de sa divinité chérie ; et
c’est vraisemblablement par une suite de cette espèce
de consécration, que les anciens Grecs pensoient qu’auyo/
e.z la première note de cet article.
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cun animal dangereux ne pouvoit habiter dans les
mêmes eaux que l’anthias, et que les plongeurs pou-
voient descendre sans crainte jusqu’au fond des mers,
dans tous les endroits où ils rencontroient ce lutjan
privilégié.
Quoi qu’il en soit, voyons rapidement les formes
principales de ce poisson.
Sa tete est courte et toute couverte de petites
écailles ; sa mâchoire inférieure, plus avancée quo celle
den-haut, est garnie, ainsi que cette dernière, d’un
rang de dents pointues, fecourbées, et séparées les
unes des autres par d’autres dents plus petites,
serrées et très-aiguës ; la langue ne présente aucune
aspérité; chaque narine n’a qu’un orifice; et la ligua
latérale est interrompue.
Plusieurs des auteurs grecs et latins qui ont parlé
de i’anthjas, et particulièrement Oppien et Pline, se
sont occupés de la manière de le pêcher. Selon ce
que rapporte le naturaliste romain, les lutjans de cette
espèce étoient très-communs auprès des isles et des
écueils voisins des côtes de l’Asie mineure. Un pêcheur,
toujours vêtu du même habit, se promenoit dans une
petite barque pendant plusieurs jours de suite, et
chaque jour à la même heure, dans un espace déterminé
auprès de ces écueils ou de ces isles; il jetoit aux
anthias quelques uns des alimens qu’ils préfèrent.
Pendant quelque temps, cette nourriture étoit suspecte
a des animaux qui, armés pour se défendre, bien
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