ARTICLE IV. Du la saison et de la manière de Iransplanter /es arbres.
La saison de planter los arbres est depuis la chute des IcuilJes jusqu'à leur
renouvellemenl, c'est-à-dire, depuis environ la fin d'octobre jusqu'en mars, A
moins que la terre ne soit extraordinaircment humide et froide, il est toujours
plus avantageux de planter en automne que vers le printemps; et dans tous
les cas, il est toujours bon que les trous aient été faits long-temps d'avance, Peu
de temps avant de planter, on remplit en partie les trous avec la meilleure
terre, de façon qu'ils n'aient plus qu'un pied ou quinze pouces de profondeur:
on habille seulemenl les racines si c'est un arbre nain, et la tête et les racines
si c'est un arbre tige; un homme le place au milieu du trou à la hauteur
convenable et dans une direction vciticalc; tandis qu'il le maintient dans cette
position, un autre jette doucement de la terre très-meuble sur et entre les
racines; en même temps, celui qui tient l'arbre le secoue légèrement avec
précipitation, de bas en haut, pour que la terre s'insinue avec plus de facilit<5
entre les racines les plus menues : quand toutes sont couvertes, on plombe
la terre en l'appuyant avec le pied pour donner de la solidité à l'arbre, ou, ce
qui vaut encore mieux, on jette do.ssus, avec un arrosoir à pomme, un sceau
d'eau : cela fait entrer plus efficacement la terre dans les interetices des racines,
et on attend vingt-quatre ou quarante-huit heures pour achcA-cr de corabler
le trou, de a-ainte que la terre humide ne se durcisse en mortier.
Si on plante le long d'un mur, on conçoit bien qu'il faut mettre le pied
de l'arbre à sept ou huit pouces du mur; diriger autant que possible les racines
du côté opposé au mur, et tourner au contraire du côte du mur les plaies et
les défauts de la tige. Si c'est un nain que l'on plante, il faut au printemps lui
rabattre la tige à environ six pouces au-dessus de la greffe, pour lui donner de
la vigueur et les moyens de se raïulfîer le plus bas possible : il ne manque pas
de pou.sser ordinairement plusieurs branches, que l'on dirige selon la forme
<fue l'on destine à l'arbre.
C H A P J T R E VU.
Dp (a taille des arbres.
On se propose ordinairement deux choses en taillant un arbre: la première,
c'est <!c l'assujettir à une certaine forme déterminée; la .seconde, d'en obtenir
de plus beaux fruits. Lu taille se divise en taille pro]>rciiiciiL dite et en (1)ourgconnemcnt;
l'essence do la première opération consiste dans le raccourcis-scment
<lcs ranioaiix formés, et celle <le la seconde, dan.s la siippn-.ssion ('lUièro des
rameaux avant leur pariait développement. La taille n'étant que le rai:courci.sscinent
des rameaux ménagés à rébourgeonnement, il est clair qu'elle n'est (pu:
la seconde opération, et qu'en traitant de la manière de former les arbres, il
faudroit commencer par rébourgeonnemeiit; cependant nous suivrons l'usage
établi, en parlant d'abord de la taille.
On tailloit anciennement les arbres sous plusieurs formes inusitées aujourd'hui:
on en imagine même encore de temps en temps qui ne valent pas la peine qu'on
s'en occupe. Parmi celles actuellement en usage, nous ne nous occuperons même
que de celle apphquée aux poiriers et pommiers sous le nom de qucnoidlle ou
pyramide, et de celle dite éventail, appliquée aux mêmes arbres et à ceux à
fruit à noyau, sous le titre de taille en éventail Nous comprenons dans cette
dernière cinq variétés qui en sont des modifications désignées par les noms de
taille à la Montrcuil, taille Le Bcrriays, taille en palmettc, taille Fanon et taille
en candélabre. Tous les arbres fruitiers se soumettent plus ou moins facilement
à ces cinq variétés de forme; mais les procédés employés pour y soumettre les
arbres à fruit à noyau, ne pouvant pas être les mêmes que ceux usités pour
les arbres à pépins, nous sommes obligés, dans les notions qui vont suivre, de
séparer leur taille en deux articles différens.
Si l'on nous dcmandoit des préceptes, des détails, des explications sur toutes
les opérations de la taille des arbres, à peu près comme en ont donné La
Quintinye, Duhamel et d'autres auteurs, nous répondrions : quel est l'homme
qui s'est rendu habile dans la taille par la lecture de ces auteurs? quel est
même celui qui a jamais eu le courage de les lire en entier? Et si quelqu'un
l'a fait, les a-t-il bien compris? en a-t-il profité? Au reste, .soit l'effet de la
mode, soit, ainsi que nous le pensons, l'effet de la perfection, les principes
de la taille sont aujourd'hui beaucoup plus simples et moins nombreux que
du temps de La Quintinye et de Duhamel. Nous ne tronçonnons plus nos
arbres comme ces maîtres le reconnnandoient, et nous en obtenons du fruit
plus tôt et davantage.
Quand nous pensons aux monceaux de branches que, il y a quarante et
cinquante a n ^ n o u s supprimions à la taille et à l'ébourgeonnement, nous
sommes forcés de convenir que nous étions alors de vrais bourreaux d'arbres.
A cette époque on tailloit court et beaucoup, dans l'idée de faire vivre les
arbres plus long-temps, et on sacrifioit le présent à un avenir incertain.
Plus on tailloit, plus les arbres repoussoient pour réparer leur perte, et ils ne
se trouvoicnt que fort tard dans letat de modération propre à la formation
des boutons à fruit, et même plusieurs arbres à fruit à pépins ne s'y trouvoient
jamais. Le vieil adage, qui recommande de reculer ses jouissances pour mieux
jouir, étoit mal à propos appliqué aux arbres fruitiers, dont la nature est de
donner du fruit après deux ou quatre ans de greffe ou de plantation, comme
•d'en donn encore après soixante ou quatre-vingts ans, Au.ssi les gens sensés
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