T R A I T E DES A R B R E S FRUITIERS.
I T T S T O I R E E T C U L T U R E .
Il esL généralement reçu que l'abricolier est originaire d'Arménie j
que de là il passa en Grèce, ensuite en Italie, et enfin dans tout le reste
de l'Europe leiiipérée, où il a produit toutes les vai-iétés que nous connoissons
aujourd'hui : cependant nous observons que ces assenions ne
sont appuyées d'aucune autorité compélente. On n'a pas encore reconnu
l'abricotier parmi les végétaux décrits ou mentionnés jiar les anciens.
Columclle cite les cormes d'Arménie comme un fruit cpii n'est pas à
dédaigner. Mais pourroit-on assurer que c'est de nos abricots dont cet
auteur parle, j)ar cela seul que les botanistes ne connoissent pas de
cormes eu Arménie? On trouve en Sibérie une espèce d'abricotier qu'il
seroil fort difficile de rapporter à celle d'Arménie, et qui doit dérouler
un peu ceux qui croient que toutes les espèces ou variétés connues
sortent de la même souche. Pour augmenter encore l'incertiiude, voilà
M. Allioni qui nous assure que l'abricotier croît naturellement dans les
bois de Montferrat, et que nous venons d'eu recevoir une nouvelle
espèce du Népaul.
C'est pourtant ime ciiose incontestable, qu'il apparoît de tems en tems
de nouvelles variétés d'arbres fruitiers, et que plusieurs ont pris naissance
chez nous. On ne peut disputer à la ville de Pézenas l'avaniagc
d'avoir possédé la première l'abricot - pèche ; et, comme cet abricot
n'a voit jamais été vu ni connu auparavant, ou en conclut qu'il est né
aux en\irons de cette ville, et que c'est une espèce hibride. Rosier croit
qu'elle provient de l'union des étaniines d'un pécher avec le pislil do
quelque abricotier : mais cette idée n'est a])pu)ée sur rien; car l'abricotpéche
n'a de raj)porl avec la pêche que par le nom qu'on s'est plu à
lui donner. Duhamel avoit désigné sous le nom d'abricot-pcche nu petit
abricot qui a le goût et en partie la chair de la [)èche, et Duhamel avoit
raisonné conséquemment : malgi'é cela, l'usage a prévalu, et il nous faut
aujourd'hui aj)peler abricot blanc, l'abricot-pèche de Duhamel, et donner
ce dernier nom à celui qu'il appeloit aljricol de Nancy.
Si l'idée de Rosier, au sujet de la naissance de l'abricot-pèche, ne nous
semble pas fondée, celle que nous soumettons au jugement de nos hurleurs,
relali\enient à la naissance de l'abricotier noir, />rumts dasycarpa
T R A I T E DES A R B R E S F R U I T I E R S,
(Willd.), nous le semble extrêmement. Nous pensons que l'aln-icotier noir
est le résultat d'une fécondation entre un abricotier et le ])runicr myro-
])olan,/j/7i/ifW tnjroholanus (Limi.). Ces deux arbres ont la plus grande
ressemblance dans la gi-osseur cl la couleur de leurs bourgeons, dans la
forme de leurs boutons, dans leur port et dans une partie tie leurs
feuilles : leurs fleurs n'olfrent qu'une légère dilicrence; elles sont égalemeni
pédonculées, et cette dernière circonstance feroit même pencher
à croire que l'abricotier noir tient j)lus du j)runier que des autres abricotiers,
qui, comme on sait, ont presque tous les fleurs sessiles; mais
son fruit pubescent nous force à le considérer coimne un abricotier.
Au reste, quoique l'abricot noir soit le plus nouveau de tous les abricots,
le lieu et l'époque de sa naissance nous sont également inconnus.
Les abricotiers sont de petits arbres d'une vigueur extraordinaire dans
leur jeunesse, sujets à la gomme, à rameaux très-étalés, dont les feuilles
sont grandes, alternes et figurées eu coeur : leurs fleurs, toujours nombreuses,
sont sessiles, gi-oupées le long des jeunes rameaux, blaïuihes,
sans odeur sensible, soutenues d'écaillés et d'un calice souvent trèsrougej
elles s'épanouissent ordinairement en mars, long-tems avant le
développement des feuilles, et sont mallieureusement souvent moissonnées
par les gelées tardives aux envircnis de Paris.
Ces arbres aiment les pays chauds ; et quoique nous trouvions les
abricots de Provence, du Roussillou, excellens, ils n'ont ni le parfum
ni le goût exquis de ceux de Damas, si vantés dans le Voyage de
M. Pockocke, ni de ceux d'Alep et d'Ainiob, décrits par M. Otter. Il
semble que la latitude de Paris soit le terme on l'on puisse cultiver
l'abricot avec avantage; car, en passant de celte ligne vers le nord, il
achève de perdre eiitièrcmeni sa saveur et le parfum agréable qu'on lui
trouve dans les parties méridionales de la France, et il n'est plus qu'un
fruit insipide, lourd et indigeste.
Toutes les espèces d'abricoiicrs se plaisent dans une terre chaude, légère,
sablonneuse et profonde; cependant on en voit réussir dans des terrains
assez frais, surtout si elles sont giH'tfées sur pruniers ou sur abricotier né
de lunau. L'alberge. que l'on peut regarder comme une espèce primitive,
se reproduit de graine, sans varier sensiblement. L'abricot-pèche se reproduit
aussi quelquefois de graine, mais rien n'est moins constant, et