de tous nos anciens fruits, elles scroicnt précieuses aiijourcl'Jiui, que les
pomologucs s'occupent de la longévité, et de la détérioration des arbres fruitiers.
Merlet se plaint de voir beaucoup de fruits insignifians ou mauvais dans
tous les jardins, et promet de ne signaler et décrire que ceux qui méritent les
soins de la culture. La même plainte a sans doute été répétée bien des fois depuis
lui, et toujom-s inutilement; car nos pépinières ne sont pas moins inondées
de mauvais fruits qu'autrefois. Nous touchons cependant au moment où cet
abus doit finir, par la diifusion des lumi-ères et par le bon sens qui pénètre
enfin dans l'esprit de toutes les classes.
Les descriptions do Merlet sont courtes, claires et satisfaisantes. Il décrit
3 abricots, i a cerises, 7 figues, 8 groseilles, 38 pèches, 1 79 poires, pommes,
69 prunes, 4'® raisins, et quelques autres fruits de fantaisie. Cet auteur n'a
pas tenu parole en promettant de ne décrire que les bons fruits; car nous en
rcconnoissons dans son livre un assez grand nombie qui ne sont que médiocrcs
ou mauva'is.
3.^ LA. QDINTINYC, Instructions pour les jardins fruitkrs et potagers.
Deux volumes in-4.'', i6go.
La Quintinje fut un de ces hommes qui ont partagé la gloire du siècle de
Louis XIV. Directeur des jardins fruitiers et potagers de ce grand roi, il a
passé pour avoir fait dans son art ce que les Boilcau, les Corneille et les
Racine ont fait dans le leur, et sa renommée n'étoit pas moins grande que
celle de ces hommes illustres. Jamais aucun cultivateur n'avoit reçu de ses
contemporains autant de marques flatteuses d'estime et de haute considération.
Le fameux Santeuil, et Perrault, qui ne savoit ni grec ni latin, mais qui
savoit mieux le françois qu'aucun académicien, ont fait à sa louange des pièces
de vers pleines de tous les charmes de la poésie, et qui étoient plus sincères
que les flagorneries que Boileau adressoit au grand roi, chaque fois que celui-ci
fai.soit massacrer les hommes par milliers pour l'honneur de ce qu'il appeloit
sa gloire.
L'ouvrage de La Quintinye forme deux volumes in-4.°; la mort ne lui a pas
permis de le rendre plus court ou d'y mettre la dernière main; et son fils,
à qui nous en devons la publication, s'est fait un devoir religieux de n'y rien
changer. La dédicace au roi, qui est la seule partie que l'on puisse considérer
comme achevée, est un sùr garant que, si La Quintinye eût vécu plus longtemps,
tout son ouvrage seroit écrit dans un style digne de son siècle et du
rang qu'il tenoit dans la hiérarchie administrative.
La Quintinye a opéré ime réforme générale dans l'art de cultiver les jardins;
il détruisit les anciennes routines, établit des principes et créa des règles pour
ce qui n'en avoit pas. Sous sa direction, le Potager du roi, à Versailles, devint
bientôt une école fameuse, qui a conservé sa réputation jusqu'à l'époque de
notre première révolution.
Quoique La Quintinye ait traité de toutes les parties du jardin fruitier et
potager, et même des orangers, c'est par la taille des arbres fruitiers qu'il s'etoit
rendu plus particulièrement célèbre; c'est en effet sur cette partie qu'il s'est le plus
étendu, et dans laquelle il a apporté le plus de réformes. De son temps, encore
plus qu'aujourd'biu, la taille des arbres fruitiers étoit regardée comme le chefd'oeuvre
du jardinage, et surtout comme d'un difTicile inouï et d'une complication
de combinaisons infinie. L'ignorance de la plupart des jardiniers et le
charlatanisme de quelques autres, en faisoit un art mystérieux, tandis que,
dans le fait, tous opéroient plus machinalement et plus par routine que par
raisonnement. La Quintinye était un homme à ne rien accorder au hasard; il
voulut raisonner la taille des arbres, en connoître ies principes et en déduire
des règles. C'est l'ensemble de ces règles qui forme la doctrine appelée encore
taille à La Quintinje, taille qui a eu de nombreux partisans et quelques
détracteurs dès sa naissance. Les grands seigneurs, les courtisans, en tout temps
servilcs imitateurs de ce qui se fait et se dit à la cour, tourmentèrent leurs
jardiniers pour les faire tailler à La Quintinye. D'autres, ne croyant pas qu'un
directeur des jardins du roi pût se tromper, firent aussi tailler leurs arbres à
La Quintinye avec la meilleure foi du monde, et bientôt il n'y eut plus ce
que l'on appelle un château, une bonne maison, où l'on ne tailldt à La
Quintinye.
Cependant les habitans de Montreuil, qui déjà tailloicnt à peu près leurs
pêchers comme ils les taillent encore aujourd'hui*, n'adoptèrent pas les nouveaux
principes de La Quintinye. Celui-ci fit venir de Montreuil le fils de Pcpin, le
plus habile tailleur de pêchers de son temps, pour le faire travailler sous ses
yeux, et juger de la pratique de Montreuil. Cette pratique ne s'accordant pas
du tout avec les principes déjà posés par La Quintinye, et le jeune Pépin voulant
toujours travailler à la mode de son pays, celui-ci se brouilla bientôt avec son
maître, et retourna tailler les pêchers de son père.
Toute la doctrine de La Quintinye était basée sur cet axiome, vrai en morale
mais qui n'est plus qu'un sophisme, étant appliqué à la taille des arbres :
* Ce lait in contesta 1)1 e no s'accorde pas (•hi-onologi<jiiement avec un auli-e fait également incontestable
dans sou point capital, qui est que Girartiot, mousquetaire, après avoii' di-pensé sa fortune au
sei-vice de Louis XIV, s'etoit relire à Bagnolet, près Monti-euil, dans un petit fief qui hii resloit, et y
a établi et perfectionné la cultiu-e du pécher ea espalier, et que c'est de chez lui qu'elle est sortie
pour selendre à Moalreuil et dans les environs. Pour que la clirouologic ne soit pas en défaut, il
faut adtaetli'c que la culture du pêcher en espalier étoit établie à Jloulreuil quand Girardot est venu
se fixer à Ikgnolet, et que j)ientôt il est parvenu k cultiver cet ai-bre mieux qu'on ne le faisoit à
Monti'euil même.