suivre, laissant ù d'autres l'honneur d'arriver au but ou d'en ouvrir une
meilleure. Les auteurs dont nous allons parler arriveront par ordre dancienneté.
i." J. B. FERRARI, Ilcsperides, sive de Maîoriim aureorum cultura et iisu.
Lihri quatuor, in-folio. 1646.
Il n'étoit guères possible qu'à un religieux de la compagnie de Jésus, de
rëunir à lui seul assez d'érudition et de posséder assez de loisir pour épuiser
la matière d'un sujet comme Ferrari l'a épuisée dans cet ouvrage. Rien de ce
qui lient directement ou indirectement aux orangers ne lui a échappé; il en
retrace toute l'histoire, depuis la fable des Hespérides jusqu'aux plus petits
détails de leur culture et de leurs usages, et il disserte élégamment et savamment
sur l'origine et l'allégorie de cette fable antique, qui rappelle l'un des plus
épouvantables cataclysmes. Un naturaliste praticien qui ne recherche que la
vérité, trouvera que l'ouvrage de Ferrari seroit plus clair et plus instructif, si son
auteur, au lieu d'employer un style aussi cloquent et aussi amplifiant, qui en
multiplie singulièrement les pages, s'en fût tenu à rapporter simplement les
faits, les caractères physiques, lliistoirc certaine et les propriétés constatées des
orangers. Mais Ferrari a écrit en poète et en orateur très-érudit : il est probable
même que la partie fabuleuse et allégorique de son sujet lui plaisoit davantage
que la vérité; car il l'a enrichie de dessins admirablement conçus et merveilleusement
exécutés par le Poussin, ]'Albane, Berretin, Lamper, Sacchi, ete.,
tandis que les soixante-douze ou quinze figures d'Oranges, qui, ce nous semble,
devoient faire le fond de l'ouvrage, y sont exécutées avec une négligence impardonnable.
Ces figures, au reste, sont la plupart plus grandes que nature,
et l'auteur donne évidemment plusieurs répétitions comme des espèces ou
variétés distinctes. Nous faisons obser\-er, en passant, qu'il rend une justice
éclatante aux peintres célèbres qui ont fait ses tableaux allégoriques, et qu'il
ne dit rien du dessinateur qui lui a fait ses Oranges. C'est juste : cidque sua.
Fcirari a divisé son ouvrage en quatre livres, et, fidèle à ses idées poétiques,
il appelle le premier Hercule, le deuxième Mglé, le troisième Aréthuse, et
le quatrième Herperthuse. Dans le premier, l'auteur disserte sur le jardin des
Hespérides et sur l'histoire antique et obscure des orangers; dans le second,
il décrit les Citres, que nous appelons aujourd'hui Cédrats. Le troisième est
consacré à la description des Limons, des Limes, des Perrettes, de la Pomme
d'Adam et de la Pomme de Paradis. Enfin le quatrième traite des Oranges
douces et des Bigarrades.
Nous le répétons, cet ouvrage est le fruit de beaucoup d'érudition, d'un
génie poétique et d'un long loisir. Il renferme un si grand nombre de choses
utiles ou agréables, qu'il n'est pas possible de s'en passer quand on se livre à
l'étude des fruits.
2." J. MERLET, Écuyer, X Abrégé des bons fruits, avec la. manière de les connoHrc
et de cultiver les arbres. Un volume in-16, troisième édition, 1G84.
Merlet paroît avoir écrit son petit livre en faveur des personnes de qualité,
et pour les inviter à imiter les Grecs et les Romains les plus qualifiés, qui
prenoient un singulier plaisir à cultiver leur jardin avec soin. Le moment étoit
propice, en effet; car, après avoir rappelé que les grands dignitaires de la Perse
et de la Turquie font faire de grands jardins, où ils ont d'excellcns fruits, il
ajoute : « Depuis quelques années, cette curiosité est venue en France, où les
personnes de condilion s'y appliquent et s'y perfectionnent tous les jours par
le raisonnement et l'cxpéricnce qu'elles ont sur la taille des arbres et des meilleurs
fruits. * Ainsi Merlet, en admettant l'expérience et le raisonnement chez ses
lecteurs de condition, a cru devoir se borner à leur donner de courts et légers
préceptes sur la plantation, la greffe et la taille des arbres. Il y a de bonnes
choses dans ces préceptes; mais leur auteur adopte et y admet des idées de
son temps, aujourd'hui abandonnées. Par exemple, il recommande, quand on
plante un arbre, de lui donner le même orientement que celui qu'il avoit
auparavant. Il croyoit à l'influence appréciable de la lune sur les opérations
de culture, et Nouloit qu'on taillât les arbres en décours; il conseille de greffer
en fente en octobre plutôt qu'en février; conseil déjà donné par Landry, auteur
beaucoup plus ancien : il dit que toutes les péchés ont chacune leur pavy, et
comme en Languedoc les pavis s'appellent mâles, il en résulteroit que chaque
pêche auroit son mari. 11 faut, selon lui, tailler la jeune vigne en nouvelle
lune pour lui faire pousser du bois, et la vieille en décours pour lui faire
pousser des grappes. Enfin, il conseille de planter l'amandier en terre forte
et humide.
Nous avons cité presque tout ce qu'aujourd'hui on appelleroit absurdités
dans l'ouvrage de Merlet; maintenant nous allons envisager cet ouvrage du
bon côté. En parlant de la culture du grenadier, Merlet nous apprend que
de son temps on cultivoit de préférence un grenadier à fleurs panachées,
plus abondantes, plus grandes, plus belles, et qui duroient plus long-temps
que les autres. La nature ne s'occupant pas de la conservation des variétés,
la négligence des jardiniers de ce temps-là a laissé perdre celle-ci, ainsi que
beaucoup d'autres. Merlet dit avoir vu le sauvageon (pied franc) du Bezy de
Chaumontel, près Luzarclie, et que cet arbre étoit né depuis peu d'années :
J1 en a fait greffer des rameaux sur coignassier, pour rendre son fruit encore
meilleur. Le fruit de ce sauvageon se conservoit jusqu'à la Pentecôte : , C'est,
dit Merlet, un gros Beurré d'hiver, fort semblable à celui d'automne, prenant
encore plus de rouge, fondant, d'une eau sucrée et relevée, des plus tardif,
excellent. > Si nous trouvions (les notes aussi précises sur l'origine et les qualités