embellirent plus particulièrement sa demeure, charmèrent
ses loisirs, lui offrirent la fraiclieur de leur ombre protectrice
, flattèrent son oeil de leur tendre verdure sans jamais
le fatiguer; embaumèrent et purifièrent h l'envi l'air qu'il
respiroit, et lui payèrent cliaque automne un riche tribut
de reconnoissance pour les soins qu'ils en avoient reçus
dans leur enfance.
Telle est, sans doute, l'origine des jardins, d'où jaillit
une nouvelle source de Inillantes découvertes, de théories
savantes, d'expériences heureuses dont la culture des champs
éprouva aussi les admirables effets. Bientôt le charme naturel
qui nous fait aimer les arbres, les innombrables
jouissances qu'ils nous procurent, et les délicieuses sensations
qu'ils font naître, élevèrent les jardins à un très-haut
degré de perfection. Ils devinrent le centre de toutes les
voluptés et le signe de l'opulence et de la magnificence de
leurs maîtres. Les jardins des Hespérides, ceux de Sémiramis
excitoient l'admiration de l'antiquité. Dioclétien
préféra à l'empire du monde ceux qu'il avoit établis à
Salone. Epicure créa les premiers dans Athènes, et enseigna,
dit Pline, l'art de jouir de la campagne au milieu
des villes.
Quoique les anciens répandissent une variété infinie dans
leurs jardins en raison de leur fortune, de leurs besoins,
de leurs goûts ou de leurs caprices, ils n'en distinguoient
pas de différentes espèces. Nous, au contraire, en comptons
plusieurs qui exigent des connoissances différentes de
la part de ceux qui les cuhivent; tels sont les jardins potagers,
fruitiers, botaniques, fleuristes et d'agrément. On
peut mettre aussi sur cette liste les marais qui enrichissent
les marchés de la capitale d'énormes etsucculens légumes,
sur-toutles pépinières où l'on élève les arbres nécessaires
à l'entretien des jardins fruitiers, des vergers, des grands
chemins, etc.; enfin, le jardin artificiel destiné aux végétaux
des régions les plus chaudes, et à intervertir la marche
de la nature en forçant les plantes de notre climat à fleurir
et fructifier dans une saison qui ne leur est pas naturelle.
Nous avons donc huit espèces de jardins où l'on cultive
des plantes différentes de différentes manières. Il n'y a pas
encore d'exemple que personne ait jamais possédé une
assez grande somme de connoissances, pour avoir été en
état de cultiver seul avec succès ces huit sortes de jardins.
Quelques jardiniers en embrassent bien deux ou trois, mais
ils n'excellent jamais également dans toutes, bien qu'on ne
puisse les accuser de manquer de talens ni d'intelligence.
C'est qu'on effet le jardinage est porté à un grand point de
perfection. Ses opérations sont innombrables, comme les
objets qui les nécessitent. Elles exigent une précision et
un discernement qui ne s'acquiert que par une longue
expérience; il faut prévenir les pertes, se ménager des
ressources, étudier les habitudes des végétaux, les forcer
à se ranger sous la loi commune, sans nuire à leur végétation
ni à leur beauté ; combattre sans cesse contre un
sol ingrat, le modifier, le changer, connoître et prévoir
les dispositions particulières de l'atmosphère, se mettre
en garde contre ses mauvais effets, profiter de l'avantage
de ses influences bénignes, s'opposer à la marche de
la nature quand elle a fixé un terme trop court à la vie
des plantes dont il nous importe de prolonger l'existence,
épier ses secrets dans d'autres occasions, et les