ARTICLE XI. De l'air contenu dans les végétmix.
L'air est un fluide aussi nécessaire à la vie des végétaux qu'à celle des animaux
: c'est une vérité dont tout le monde convient. Non-seulement l'air
atmosphérique les péi letro en entrant p^i' leurs pores, soit seul, soit avec les
aliruens qu'ils aspirent; mais il s'en forme aussi dans leur intérieur par la
combinaison des élémens amenés par la sève, et ce nouvel air s'en échappe
aussi aisément que l'air exLérieur y entre. C'est par cette propriété qu'ont les
végétaux de changer la nature de l'air qui les pénètre, qu'ils neutralisent les
miasmes qui nous deviendroient nuisibles ou même mortels, si nous les aspirions
avant qu'ils n'aient passé, pour ainsi dire, par leurs poumons. L'épiderme
des tiges et des feuilles a des pores d'une forme particulière, nommés sto/nates,
qui peut-être donnent accès à Tentr'-e ou à la sortie de l'air; mais le véritable
usage de ces organes n'est pas encore connu.
La chimie pneumatique explique maintenant les combinaisons cjui s'opèrent
dans les végétaux, bien différemment qu'on ne le faisait du temps des Halles et
des Duhamel. Halles expliquoit tout par la dilatation et la compression de l'air;
aujour<rinu les gaz et les acides sont les agens et souvent les élémens de la
nutrition et de l'organisation végétale.
On crovoit autrefois que l'air des végétaux élaït contenu dans certains
vaisseaux formés de rubans roulés en tire-bourre, qu'on ne trouve dans les
dicotylédons qu'auprès de la moelle, et que pour cette raison on a appelés
trachées, en les assimilant aux trachées des insectes; mais l'usage de ces trachées
est encore absolument inconnu dans les plantes, malgré tout ce qu'on en a
pu dire.
CHAPITRE 11.
Physiologie végétale.
Nous venons de voir dans le premier cliapitre que les végétaux ont trois
degrés d'organisation, qui les divisent assez naturellement en trois classes différentes;
que ceux dont l'organisation est la plus compliquée, ne sont cependant
formés que de deux organes simples, qui sont les cellules et les tubes ou vaisseaux;
que ces organes simples en forment d'autres composés, sous les noms
de moelle, de hois et d'écorce; que ces organes rontiennent des fluides et de
l'air. Mais par abstraction nous avons considéré toutes ces choses dans un état
de repos; maintenant nous allons rendre au végétal sa force vitale, et tâcher de
le suivre dans ses fonctions, dans sou accroissement, dans sa reproduction, et
enfin jusques dans son dépérissement.
ARTICLE I.'' Des mouvemens qu'exécutent les végétaux.
Les végétaux exécutent des mouvemens si merveilleux, que plusieurs philosophes
ont pensé que ces êtres étoient doués de la sensibilité; mais, dit
M. De Candolle, outre que les végétaux ne présentent aucun indice de sensibilité,
il semble contraire à la marche de la nature que des êtres qui ne
peuvent ni se défendre du mal ni l'éviter, soient doués de la faculté de le
sentir. M. De Candolle, en refusant la sensibilité aux plantes, leur accorde
l'irritabilité, et au moyen de cette faculté, il t;khe d'expliquer les mouvemens
les plus extraordinaires qu'elles exécutent. Parmi ces mouvemens, il y en a en
ciTet une partie qu'on peut sans effort rapporter à l'irritabilité; mais il y en a
aussi qui nous semblent du ressort des causes finales, et qui ne seront jamais
expliqués : les plus merveilleux de. ceux-ci sont exécutés par les organes sexuels
pour consommer l'acte de la fécondation. On voit d'un coté les étamines
s'approcher, l'une après l'autre, du stigmate, et le couvrir de leur poussière
prolifique ; de l'autre, on voit le stigmate s'incliner sur les étamines et se relever
après avoir été pénétré de leur vertu fécondante, qu'il transmet immédiatement
aux ovaires. Certes, c'est vouloir qu'il se produise de bien grandes choses avec
de très-petits moyens, que de rapporter cet acte à l'irritabilité. Pour nous, plus
nous y pensons, plus nous croyons devoir nous écrier avec le prince des poètes :
omnia Jovis pîena. Mais il y a des mouvemens dans les plantes qui s'expliquent
d'une manière satisfaisante par l'irritabilité, par l'élasticité, par les impressions
hydroscopiques. Nous allons en rapporter quelques exemples.
1Mouvemens attribués, avec raison, à l'irritahilité. Les piqiires d'aiguilles
très-fines font contracter les umscles des animaux; de même, en piquant les
étamines de ÏOpuntia, de l'iipine-vinette, des Cynarocéphales, les poils de la
Drosera, les feuilles de la Dionoea, etc., on fait exécuter à ces organes des
mouvemens considérables. Le muriate oxigéné irrite puissamment les muscles
des animaux; il accélère d'une manière très-marquée le développement des
plantes. Le froid contracte les muscles des animaux, et une chaleur douce les
étend; de même beaucoup de feuilles de la famille des légumineuses se contractent
ou se ferment pendant la nuit et s'étendent pendant le jour. L'habitude
ou des impressions trop fréquentes émoussent l'irritabilité chez les animaux :
une jolie observation de M. Desfontaines prouve quelle s'émousse aussi chez les
plantes. Ce savant professeur, partant un jour jwur la campagne, mit dans sa
voiture un pot de sensitive {Mimosa pudica. LIN.); le premier mouvement de
la voiture a fait à l'instant fermer toutes les feuilles et baisser tous les rameaux;
mais au bout d'un certain temps, les rameaux se relevèrent peu à peu, les
feuilles s'ouvrirent et s'étendirent, nonobstant le mouvement continuel de la
voiture, aussi bien que si la plante eût été dans le repos le plus absolu et au
plus beau soleil.
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