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parcouru les plaines genevoises formées de débris
alpins, les massifs caillouteux des plateaux du Lyonnais,
du Dauphiné, du Comtat, de la Provence, et ils ont vu
ces alluvions et ces terrains élastiques, venus des Alpes,
s’épanouir largement dans la vaste plaine de la Crau et .
le Delta de la Camargue. Et nous ne parlons pas des
sédiments plus fins, charriés par notre grand fleuve
jusque dans les abîmes de la mer depuis des séries de
siècles!
A combien de kilomètres cubes peuvent équivaloir
ces débris fragmentaires ? Ce sont précisément ces gigantesques
amas de roches brisées ou pulvérisées qu’il
faudrait restituer aux Alpes pour leur rendre leur physionomie
primitive, leurs altitudes anciennes, les profils
imposants qu’elles avaient au moment de leur soulèvement
! Et des.phénomènes analogues se sont passés
dans toute la longueur de la chaîne jusque vers le bassin
du Danube.
Une des causes principales de ces dénudations provient
de la nature constitutive des roches alpines qui se
prête facilement au travail incessant des agents atmosphériques.
Les roches plus ou moins schisteuses, les
gneiss, les micaschistes, les schistes cristallins qui occupent
dans les Alpes une grande surface, sans parler des
roches argileuses et calcaires, se laissent profondément
pénétrer par l’eau et la gelée et bien facilement dégrader.
Comme leurs feuillets ou leurs bancs soulevés
forment des angles prononcés avec l’horizon, les désagrégations
de leurs masses s’accentuent de plus en plus,
jusqu’à leur donner des profils déchirés. Des aiguilles,
des obélisques offrent moins de résistance que les contours
arrondis des granités ou les masses de certains grès
et de certains calcaires.
Au milieu de ces formations peu friables, lorsque
toutes les saillies ont été émoussées et les angles arrondis,
lorsque les montagnes ont mérité le nom de dômes, de
ballons, les dénudations atmosphériques paraissent avoir
atteint leurs dernières limites ou du moins elles ont
perdu la majeure partiede leur intensité; mais leur action
n’est pas anéantie.
Si le dôme du mont Blanc, recouvert d’une vieille
calotte de glace, semble garder depuis bien des siècles
une immuable altitude, les pics schisteux qui entourent
cette masse résistante de protogine, s’effritent, s’effeuillent
et s’écroulent chaque année. Ils laissent à leur
place de nouvelles aiguilles, de nouveaux obélisques
destinés à se déchirer, à s’écrouler à leur tour pour augmenter
encore la masse des débris que les cours d eau
vont bientôt disperser à toutes distances. Ainsi s’abaisse
constamment le niveau supérieur des anciens condenseurs
et même celui de la chaîne alpine tout entière.
Sans doute, à toutes les causes énumérées déjà, nous
devons en ajouter une autre, presque toujours laissée de
côté; c ’est un tassement que la pesanteur a dû imposer
à tous ces immenses débris montagneux, refoules, brises,
soulevés, incohérents, et souvent suspendus au-dessus
de grands vides, pendant ou après leurs soulèvements
orogéniques. Ainsi, par suite de la formation d’un grand