T R A I T É D E S A R B l l E S F R U I T I E R S,
la clialeur. Sa cullure en grand, établie du côté nord de Paris, ne s'étend
pas du côté sud de cette capitale, de sorte que là où la vigue ne peut
plus produire de bon vin à cause de rabaissement de la température,
commence le climat propre au ponnnierj aussi la Hollande et l'Angleterre
ont-elles plus de pommes que nous.
Les pommiers greffés sur franc forment des hautes tiges de plein vent
et se plantent ordinairement en quinconce ou en verger : ceux givllcs sur
doucin, se plantent dans les plates-bandes des jardins potagers et se
taillent en éventail ou en vase j ceux grelTés sur paradis forment des
massifs dans les petits endroits, se taillent ordinairement en buisson, et
peuvent se planter de 6 à 8 pieds les uns des autres. Les paradis sont
très-propres à couvrir des nmrs qui n'ont que de 5 à 5 pieds de
hauteur. On voit beaucoup plus de pommiers dans les campagnes que
de poiriers; c'est peut-être pai-ce que les pommes se gardant la plupart
plus long- tems que les poires, elles offrent plus de ressource aux cultivateurs;
c'est peut-être aussi que le pommier vient plus aisément, et que
sa gi'effe réussit mieux ou manque moins souvent que celle du poirier.
En général, la culture du pommier est plus facile que celle du poirier;
on l'assujettit plus rarement à une taille réglée, et il en a moins besohi
pour produire de beaux fruits r son ennemi le plus dangereux est le gui,
plante parasite qui s'attache à ses branches, le dessèche el le fait périr
si on le laisse trop long-tems et s'il se multiplie. Ce que nous avons dit
de la culture en général, suffit à celle du ponnnier; c'est pourquoi nous
ne nous étendrons pas davantage sur cet objet ; mais nous allons rapporter
ce que dit Labretoimerie sur la conservation et les usages des pommes.
„ Ou cueille les pommes vers la fin d'octobre par un beau tems; celles
« d'api, quinze jours plus tard que les autres. Il faut avoir eu soin en
« août de découvrir celles-ci de leurs feuilles pour leur faire prendre inie
„ belle couleur,qu'elles n'acquièrent parfaitement que dans l'arrière-saison.
„ On porte les pommes dans la fruiterie dans des corbeilles ou dans des
„ paniers à somme, et on les y conserve ainsi qu'il est dit au chapitre
(, de la Fruiterie. Elles ne sont en parfaite maturité que quand elles
„ sont ridées : c'est alors qu'ayant perdu leur acidité, elles sont devenues
« douces. Lorsqu'elles gèlent dans la fruiterie, elles ne sont pas perdues
« pourcela: en n'y touchant pas, elles reviennent dans leur premier oral ;
(( mais si elles étoient gelées de nouveau, elles seroient perdues. Le plus
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« sûr est de les mettre dans des armoires ou dans une bonne serre voûtée
« à l'abri de la gelée, ou de les descendre à la cave aux approches de
« Noèl, avant les fortes gelées.
c( Les ponnnes crues-sont un aliment salutaire, pris modérément, pour
« les personnes sujettes à des altérations et à des coliques bilieuses, à des
„ digestions fougueuses, et pour celles qui sont éciiauffées par accident,
(( pressées d'une soif opiniâtre, tourmentées de rapports nidoreux, semi-
« putrides. C'est une très-bonne ressource contre le mauvais état de
« l'estomac qui suit l'ivresse; les ivTognes prétendent même par ce secours
« se préserver de l'ivresse, et même la dissiper.
« Les pommes crues ne conviennent point aux estomacs foibles, glai-
„ reux, pituiteux, qui refusent les crudités; elles leur donneroient des
« coliques, des indigestions, etc.
(, La pomme réduite en pulpe et en cataplasme, amollit les tumeurs
« dures, inflammatoires, dont elle apaise encore la douleur. On fait
,( entrer les pommes dans la composition de plusieurs onguens, auxquels
« on a donné pour cela le nom de pommade; nom qui a pris chez les
« praticiens la place de celui d'onguent. »
Les pommes cuites devant le feu fournissent un aliment aussi léger
qu'agréable, innocent en santé comme en convalescence. Elles sont
également botmes en compote de plusieurs façons, en marmelade, en
tourte, ou sous la cloche à la flamande, avec un peu de beurre : la pomnie
de châtaignier, qui est moelleuse et tendre, est particulièrement propre
à cet usage.
La pomme de reinette est bonne pour faire soit des pâtes (les meilleures
nous viennent d'Auvergne), soit des confitures et de la gelée, qui
est très - agréable aux convalescens : c'est à Rouen qu'on fait la meilleure.
On en fait aussi du sirop, qui adoucit les âcretés de la gorge,
l'enrouement, et qui devient purgatif, particulièrement pour les enfans,
quand il est composé avec du séné, etc. Les pommes, à la différence
des poires, se sèchent sans être pelées; on les coupe par la moitié; on leur
ôte le trognon, que l'on fait bouillir pour en tirer le jus et y tremper
celles ([u'oii destine pour sécher, etc. : pour le reste, on procède comme
pour les poires tapées.