
bois parfait fe trouve féparé par une couche de
bois blanc ; en forte q u e , fur la coupe du tronc
de ces arbres, on voit alternativement une couche
d’aubier , puis une de bois parfait , enfuite
une fécondé couche d’aubier 5 enhn , un maffif de
bon bois. Ce défaut eft plus ou moins grand , plus
ou moins commun, félon les différens terrains,
les différentes fituations. Dans les terres fortes &
dans le touffu des forêts, il eft plus rare & moins
confidérable que dans les clairières & dans les
terres légères.
D ’après ce qui vient d’être dit fur l’aubier , il
S'enfuit que le bois eft une mafle de fibres comp
are s & très-dures, produite par la continuité du
refl'errement de l’aubier, c ’eft-à-dire, par l’oblitération
de fes vaiffeaux , le defféchement de fes
fibres &leur cohérence proportionnellement croif-
fante à mefure que les nouvelles couches que la
nutrition ajoute toujours à l’extérieur, forment
une preffîon plus confidérable. Il fuit de ce principe
j que la denfité & la folidité du bois font toujours
en raifon direéte du tems de fon accroiffe-
ment ; que les arbres qui croiffent le plus lentement
ont toujours le bois le plus dur, & qu’enfin
les couches les plus intérieures du bois , étant les
plus anciennes, font auffi plus ferrées & plus dures
que les autres. C ’ eft par cette même raifon que
l’aubier, qui eft plus extérieur, n’ eft lui-même
qu’ un bois nouveau 3 fort imparfait & encore peu
loi i de.
Dans le centre, du bois exifte la moelle, qui eft
plus ou moins abondante , félon l’arbre vdans lequel
on l’obferve, & félon l’âge de l’ individu-
Cette partie fe deffèche dans la vieilleffe du végétal
, & difparoît quelquefois entièrement. Le
bois qui recouvre ou enveloppe la moelle eft dif-
pofé par couches concentriques d’autant plus
épaiffes qu’elles font plus extérieures , & quelquefois
plus épaiffes d’ un’ côté que de l’autre ,
ainfi que nous l’avons obfervé ci-deffus pour l’aub
ie r , & cela par une caufe relative à l’expofition
des arbres ou par quelques autres circonftances
locales. Ces couches font compofées de fibres
ligneufes, de vaiffeaux plus ou moins oblitérés ,
de trachées communément roulées en fpirale , &
qui paroiffent deftinées à contenir de l’air; enfin,
d’ un tiffu cellulaire qui eft plus abondant ou plus
remarquable entre les couches mêmes, & femble
de même nature que la moelle, avec cette différence
que celle-ci eft compofée de vaiffeaux &
d’utricules beaucoup plus lâches, d’où réfulte
une fubftance molle & fpongieufe. Cette fubf-
tance, preffée par les couches ligneufes , dont le
nombre s’ accroît annuellement, tend à s’échapp
e r , parvient jufqu’ à l’écorce, & forme fur l’ aire
d'une coupe tranfverfale ces lignes droites & divergentes
q u i, partant du tronc, aboutiffent à
1 écorce , & auxquelles on a donné les noms de
vroduttions ou de prolongement médullaires.
On a cru long-tems que le nombre de couches
ligneufes qu’on comptoit fur la coupe tranfverfale
d’ un arbre, étoit celui de, fts années; mais
M. Duhamel a prouvé que l'on ne pouvoit pas
dire qu'un arbre de vingt ans eût la tige compofée
de vingt couches, tandis qu'un arbre de dix
ans auroit feulement dix couches. Il eft bien efftn*
liel de remarquer, pour détruira cette erreur,
que ce que l'on appelle couche ftnfible à l’ oeil eft
une zone compofée de plufieurs couches extrêmement
minces, tellement rapprochées ferrées
, qu’on ne peut les diftinguer, mais dont
l’exiftence n’en eft pas moins certaine , puifque
l'on peut parvenir à les féparer, au moins en
partie, les unes des autres par une longue macération
pour quelques efpèces de bois.
La formation des différentes couchés du bois,
les circonftances particulières qui les accompagnent,
ont fait l’objet des recherches de plufieurs
favans phyficiens, de Duhamel, Daubenton, Sen-
nebier, &c. Nous ne pouvons entrer dans une
longue difeuflion à .ce fujet ; nous nous bornerons
à rapporter quelques obfervations de Duhamel &
de Daubenton, qui fuffiront pour donner une idée
de ces intéreffantes recherches.
« On voit, dit Daubenton, au centre de la tige
naiffante d’ un arbre, la moelle entourée de deux
feuillets. L’ intérieur eft le plus tendre; cependaîx
il deviendra ligneux, & par conféquent le plus
dur. Le feuillet extérieur fera partie de l’écorce;
il eft déjà revêtu de l’épiderme, & il a une apparence
différente de celle du feuillet ligneux. De
toutes les parties de cette pouffe herbacée, la
moelle & l’épiderme font les plus avancés dans
leur organifation. La fubftancte médullaire ou vé-
fîculaire forme la plus grande partie de cette nouvelle
pouffe ; elle eft tendre, fucculente, de C0117
leur verte. A mefure que les feuillets fe multiplient
les uns fur les autres, ils s’endurciffent, &
forment une gaîne folide , dans laquelle la moëlle
eft renfermée : celle-ci eft alors moins fucculente ;
elle devient blanchâtre. Dans les tiges de deux
ans, cette fubftance eft tout-à-fait blanche ; elle
paroît defféchée. Enfuite le canal médullaire diminue
peu à peu de diamètre, & dans les gros
arbres, même dans ceux qui ont eu le plus de
moëlle dans leur jeuneffe, on ne voit ni canal ni
fubftance médullaire. »
Ces obfervations prouvent évidemment que b
moëlle eft l'organe le premier développé dans les
nouvelles pouffes des arbres : il s’étend de toutes
parts à travers les couches ligneufes &: corticales
qui fe forment autour de lui ; il fe prolonge jufqu’
à l’épiderme. Outre ces prolongerons, qui
vont en ligne droite & horizontale, il a des ap-
pendices médullaires , qui fe trouvent entre les
autres parties de la tige.
Dans la tige naiffante, la moëlle eft entourée
de deux feuillets, dont l’ intérieur fera ligneux,
& l’extérieur eft revêtu au dehors par l’épiderme,
comme nous l'avons dit plus haut : il fera cortical.
Le feuillet ligneux eft déjà plus dur que le cortical
; il a une apparence différente : auffi n’ont-ils
pas la même origine. On a trouvé fous la forme
de trachées, dans de jeunes racines &c dans des
pouffes herbacées, les fibres dont les feuillets
ligneux font compofés. On n’a pas vu les mêmes
trachée s en aucun tems dans l’écorce. Il y a donc
lieu d’admettre une différence entre les feuillets
ligneux & les feuillets corticaux dans leur nature
& dins leur origine ; mais ils fe reffemblent tous
par la difpofition de leurs file ts, en forme de
réfeau.
Les mailles de ces réfeaux font de figures irrégulières,
& occupées paT les prolongemens médullaires
, à travers les filets ligneux & corticaux
lorfque ces feuillets n’ont que peu de conliftance 1
dans les premiers tems de leur formation. La moëlle
eft compofée de véfieuks, rangées irrégulièrement
dans un ordre qui fe rapporte aux mailles
d'un réfeau.
Lorfque la fubftance médullaire s’étend latéralement
pour former fes prolongemens, elle doit
s’infinuer entre les fibres des feuillets qui l’entourent,
& écarter ces fibres pour faire des paf-
fages à fes prolongemens, qui font des files de fes
molécules. Par conféquent, les ouvertures occupées
par les prolongemens médullaires doivent
fe trouver placées dans les feuillets, comme les
mailles d’un réfeau correfpondantes aux véficules
qui forment la circonférence de la moëlle.
A mefure que ces feuillets, l’un cortical, l’autre
ligneux, prennent de la confiftance, il fe produit
fucceffivënrrent entre deux d’ autres feuillets qui
accroîtront l'écorce & le bois de l’ arbre tant qu’il
vivra. On a donné aux feuillets de l’écorce .la dénomination
de couches du liber, parce qu’étant réparés
les uns des autres, ils reffemblent aux feuillets
d’ un livre. Grev/ étend ce nom fur toutes les
couches corticales. Malpi-ghi n’y comprend que
les couches intérieures, & peut-être feulement la
dernière. Il fuinte entre le bois & l’écorce une
matière qui y refte ; elle eft d’abord fi fluide ,
que l'on n’apperçoit, dit Duhamel, aucune adhérence
entre l’écorce & le bois d’ un faule qui eft
en pleine fève. Cette matière devient enfuite
glaireufe ou muqueufe par l’évaporation d’ une
partie de l’humidité. Dans cette circonftance, qui
arrive au déclin de la fèv e, le bois & le Jiber ref-
tent .couverts d’ une fubftance épaiffe , que G r tv
& Duhamel nomment le cambium.
Les opinions font partagées fur la formation
des couches corticale & ligneufe, qui contribuent
chaque année à Taccroiffement du tronc
d'un arbre. On ne fait fi ces couches font formées
par l’é corce , par le corps ligneux ou par le concours
de l’une & de l’ autre. Il eft certain que le
bois, dépouillé de fon écorce , produit de l’écorce
& du bois, & que l’écorce, féparée du bois par
un corps étranger interpofé entre deux, produit
aufli des couches corticales & ligneufes.
Lorfque l’écorce eft unie au bois dans l'état naturel
, il fe forme chaque année une couche corticale
& une couche ligneufe ; favoir : fi ces deux
couches viennent de l'écorce, ou fi elles font produites
par le bois , ou fi la couche corticale vient
de l’écorce, & la couche ligneufe du bois. Quoique
l’on ait vu , dans d’autres circonftances, ces
couches produites toutes deux par le bois ou par
l’écorce, on a fait beaucoup d’expériences pour
! réfoudre ces queftions. Il fuffira de rapporter ici
I les principales.
Pour favoir fi l’écorce pouvoit produire des
couches ligneufes , Duhamel a enlevé des morceaux
de l ’écorce d’ un arbre ; il a mis fur le bois,
dépouillé de fon écorce, des lames d’étain battu,
telles qu’on en emploie pour l’étain des glaces;
enfuite il appliqua les morceaux d'écorce fur les
lames d’étain ; ils fe greffèrent avec l’écorce qui
n’avoit point été enlevée. Enfin il fe forma, entre
l’étain & l’écorce , des couches ligneufes auffi
épaiffes que fi l’écorce avoit été appliquée fur le
bois.
Pour favoir fi le bois écorcé pouvoit produire
une nouvelle é corce, Duhamel fit enlever , au
tems de la pleine fève, l’écorce d ’un gros cerifier ,
comme on le fait aux jeunes chênes pour avoir du
tan, dans toute la longueur de leur tronc. « Sur-le-
champ, dit Duhamel, à l ’aide de petits cerceaux,
j'enveloppai le tronc de cet arbre de paille longue.
Cette enveloppe étoit éloignée de quelques pouces
du tronc écorcé. Pour tenir la plaie encore
plus à l’abri du foleil, j’ attachai, du côté du midi,
un paillaffon que je foutins avec des pieux. L'arbre
en cet état fleurit un peu plus tard que les
autres, & noua fon fruit, quoiqu’il eût perdu une
partie de fes feuilles &: beaucoup de fes menues
branches. L'année fuivante il parut encore plus
languiffant ; mais la troifième année , le voyant
bien rétabli , j'ôtai l’enveloppe de paille , &
je trouvai le tronc recouvert d’une nouvelle
écorce.«
Cette opération fe fait naturellement à la fuite
d’ une gelée ou d’ un autre accident qui dépouille
la tige d’ un arbre de fon écorce dans toute fa
circonférence. Cette tige produit une nouvelle
écorce & des couches ligneufes, comme fi elle
n’avoit pas été écorcée ; mais il refte une fente
entre la couche d’aubier qui a été mife à nu, & la
première couche ligneufe qui s’y eft jointe ; elle
! s’étend à toute la circonférence des couches an-
Inuelles, qu’elle fépare des autres fentes qui n’en
occupent qu’une partie. C ’eft ce que M. Daubenton
appelle roulure totale.
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