de la réforme devient dominant, quand on y
attache sans restriction une trop grande importance
, dès-lors, s’emparant de ces esprits
légers, peu judicieux, il les emporte au-delà
des bornes r c’est ce qui est arrivé pour la botanique.
Les novateurs ont fait ici ce qu’ils
avoient déjà fait pour le nom des plantes; ils
ont donné aux parties des plantes, des noms
différens de ceux qu’elles porroient depuis
long-tems, et leur travail s’est borné, ou à
des distinctions subtiles, ou à substituer un
nom à un autre, sans présenter une idée
neuve. Par exemple, Linné avoit donné à là
queue oq, au support des feuilles le nom de
pétiole ■ à celui des fleurs, le nom de pédoncule
, et de pédicelle aux pédoncules partiels,
nom qui a été également employé pour Jes
supports dés folioles. On a encore-dit qu’un
fruit, un-ovaire étoit pédicellé quand il étoit
supporté dans le calice par un pédicelle particulier.
Il me parole que cette expression étoit
suflisammenc entendue; mais on a cru, vu
sa situation dans le calice èt son caractère
particulier, devoir lui donner le nom scientifique
de thécaphore, dont on distingue deux
espèces : la première, lorsqu’il est produit par
le rétrécissement de la partie inférieure du
pistil, porte le nom de basigyne , comme
dans le lychnis et l’euphorbe ; la seconde,
lorsqu’il n’est qu’un prolongement du pédoncule
, portant plusieurs ovaires, 'se nomme
polyphore , comme dans les renoncules : c’est
un polyphore succulent, qui, dit-on, forme
le fruit de la fraise. On l’avoit regardé comme
un réceptacle, et' il me semble qu’alors on
sentendoit un peu mieux, avec moins de
subtilité.
Mon objet n’étant pas et ne pouvant être
de parcourir ainsi la liste des noms nouveaux
donnés, ou à des parties déjà connues, ou à
des modifications peu importantes de ces mêmes
parties , qui pouvoienr être exprimées
aussi bien par une épithète, sans changement
de nom, je me bornerai à:faire remarquer
qu’outre l’obscurité et l’embarras que. cette
nomenclature , souvent barbare , jette dans
l’étude, elle la rend trop minutieuse, et substitue
souvent des idées systématiques à'la
place de celles que nous donneroit la seule
inspection des plantes lorsque notre esprit
n’est occupé par aucun préjugé; car il est a
remarquer que ces noms assignés à chaque
partie çles plantes sont la plupart établis d’après
les systèmes et les opinions que chacun
s’est formés ,-et qu’ils y tiennent par leur sens
et leur étymologie ; de sorte qu’ils ne peuvent-
être adoptés pat ceux qui ont une opinion différente,
à qui par conséquent il faut des noms5
différens.
Les noms nouveaux ne doivent être établis
que pour des organes nouvellement découverts
, qui ont des fonctions particulières
bien distinctes, bien-vérifiées ; mais si ces’
organes ne- sont que des modifidations.'d’un
autre déjà connu , il sera toujours.suffisant de
l’exprimer par une épithère, et non par un
1 nom particulier. Combien, d’après ce principe
, n’aurois-je point à dire , si je pottois-
une sévère critique sur tous 'ces'noms non-:
veaux, imaginés depuis un certain nombre
d’années pour des organes connus depuis des5
: siècles ! Quel dédale lorsqu’il s’agit de pénétrer
dans cëtte obscure nomenclature, d’assi-
! gner le sens convenable à chaque expression,1
et surtout d’en faire une application générale
: à tous les êtres dé la végétation !
J’ai dit plus haut que les nombreux ouvra-
fgés publiés depuis un certain nombre d’années
sur les différentes parties de la botanique,
i en avoient considérablement étendu le do-
i maine ; je dois dire aussi qu’on auroit pu ren-
i drë ces ouvrages bien plus utiles s’ils eussent
été mieux combinés, si tous avoient été travaillés
sur un plan uniforme , tendant au
même but, et surtout rendus d’une acquisition
plus facile en écartant ce luxe de gravures et
’ de typographie qui les porte à un prix auquel
ne peut atteindre la fortune ordinairement
' assez médiocre de ceux qui cultivent les sciences.
Quelle somme effrayante ne faudroit-il
pas réunir pour acquérir les plus importans de
■ ces ouvrages, tels que les différens Fascicules
de Lhéritier, les beaux et nombreux ouvrages-
de Jacquïn, le Jardin de la Malmaison j les
: Liliacées de Redouté, les P lantes grasses de De-
candolle , la Flore danoise , les Icônes rariofes
de
de CavanBIes, la Flore du Pérou, celle de Portugal
, qui commence à paraître , etc. etc. ,
ouvrages néanmoins dont ne peuvent se passer
ceux qui se livrent à l’étude complète des
végétaux ! Du moins ces ouvrages ne renfercoup
mieux que les plus belles gravures pour
distinguer toutes ces variétés. Rosier l’a bien
fait, dira-t-on : raison de plus pour ne le pas
faire. Quant au texte, on ne peut, en général,
lui faire d’autre reproche que de poiret
ment, la plupart, que des plantes nouvelles, j un faux titre; il n’est point de Duhamel, mais
rares ou peu connues; mais employer le burin j bien des savans qui ont coopéré à certe édi-
des artistes et la presse des imprimeurs pour j tion : on y trouve de très-bonnes observa-
ne donner que ce qui esc déjà connu , c’est i rions. Sans doute il eût été conçu avec plus
une superfétation qui, si elle ne nuit pas aux I d’ordre et de sagesse si l’éditeur n’eûr pas
progrès de la science, ne lui est d’ailleurs '
d’aucune utilité, : c’est une perte réelle en
cuivre, en papier, en argent, qui pouvoient
voulu trop souvent diriger la plume des gens
instruits qui ont eu la faiblesse d’employer
leurs connoissances à la rédaction de cet-où-
employés- plus fructueusement pour le j vrage interminable. Duhamel avoit donné le
progrès des sciences. De pareils ouvrages ne
sont ordinairement que des spéculations mercantiles,
dans lesquelles tout est calculé pour
le profit, rien pour la science. On dupe le
public pour un instant, qui ne tarde pas à
revenir de son erreur, et à faire le sacrifice
de ses avances pour les premières livraisons,
dont il ne prévoit pas la fin.
C ’est bien pire encore lorsqu’empruntant
j modèle d’un bon ouvtage. Qui pouvoit mieux
l’exécuter que M. Desfontaines, qui, en deux
volumes in 8°. d’un prix très-médiocre, a su
renfermer tout ce qu’il nous importe le plus
de connoître sur les arbres et arbrisseaux qui
peuvent être cultivés en pleine terre sur le sol
de la France.
En rendant compte des progrès qu’a faits
la botanique depuis un certain nombre d’anie
nom d’un homme qui a eu en son tems de j nées, je n’ai pas cru devoir me taire sur les
la célébrité, on donne, sous ce nom et sous j abus qui se sont introduits dans plusieurs
le titre de nouvelle édition, un ouvrage qui I ouvrages publiés sur cette partie de l’histoire
n est point le sien, et dont on se borne tout j naturelle, sur le charlatanisme de quelques
au plus à citer quelques passages : telle est en j spéculations mercantiles, auxquelles les saparticulier
la nouvelle édition des Arbres
Arbustes de Duhamel, qui n’en porte que
le titre, ouvrage sans plan déterminé, pas
même celui de Duhamel , l’ordre alphavans
devraient refuser leur plume , sur l’introduction
d’une nomenclature arbitraire et
sur ce luxe typographique, qui rend la science
inaccessible à tous ceux que la fortune n’a
bétique, dans lequel on trouve un grand j point favorisés de ses dons.
nombre de gravures parfaitement inutiles, j
Quel homme, en effet, aura besoin de recourir
aux. belles images de l’éditeur Michel
pour apprendre à distinguer un chêne,
un hêtre, un noisetier, un lilas, ainsi que
les noyers, les pommiers, enfin les cerisiers
, dont on nous a gratifiés , pour notre
argent, de dix-sept planches, dans la crainte
Il ne suffit donc pas d’écrire, et même de
bien écrire sur une science, surtout en histoire
naturelle : il faut encore que les ouvrages
soient tellement combinés, qu’ils puissent
être utiles à un plus grand nombre de personnes
; qu’ils soient d’une acquisition peu
dispendieuse, d’un format commode ; qu’ils
contiennent plutôt des additions faites à la
que nous ne confondions le bigarreau avec -, science, que des répétitions de ce qui est déjà
la cerise, la guigne avec la montmorency ? ■ connu. Au reste, il est essentiel de distinguer
Les mêmes précautions ont été prises pour i deux sortes d’ouvrages : les uns classiques^ les
1 olivier d Europe, dont les variétés ont pro- j autres d’érudition et de détail. Les premiers
dmt huit planches ; pour le figuier domesti-, j composent le tableau méthodique, soit des
que, qu on a cependant borné à sept plan- ’ genres-, soit des espèces , ainsi que les Flores
ches, comme si le palais ne valoir pas beau- 1 particulières àchaque contrée, etc. Ces sottes
Botanique. Supplément. Tome I. c