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de toute mer voisine par de grandes hauteurs, verse ses eaux dans
un lac de Khanjeh demeuré sans issue. Dans l’Asie oeijtrale, le
grand désert de Gobi, nommé Sbamo par les Chinois, fut
également une Caspienne, originairement aussi grande que
notre Méditerranée proprement dite, où ne se voient, sur une
aride et monotone étendue, comme témoignages de l’ancien
empire des flots amers, que des rivières médiocres, la plupart
saumâtres et sans embouchure, avec de petits lacs épars dans
les anfractuosités d’un sol infécond. La Songarie fut une Caspienne,
dont les lacs Palkati, Alaktugul, Kurgha, Urjunoju et
Saisans sont les dernières reliques, et qui, lorsqu’elle était
encore une méditerranée , se dégorgeait probablement dans
l’Océan Arctique, beaucoup plus grand à cette époque qu’il ne
l est de nos jours, par un détroit devenu cette large dépression
où coule maintenant l'Irtisch , grand affluent de l’Obi.
Les voyageurs n’ont indiqué l’existence d’aucune Caspienne
dans le nouveau Monde; il dut cependant y en exister. On n’en
eomiait plus qu’en Asie, où quatre seulement sont assez importantes
pour mériter une mention particulière dans les présentes
généralités.
1° La C a s p i e n n e p r o p r e m e n t d i t e . Plus longue que large et
d'une forme un peu sinueuse, celle-ci s’étend du trente-septième
et du trente-huitième degré au quarante-sejitième de latitude
Nord : sa plus grande largeur sous le quarante-cinquième jia-
rallèle peut être de cent trente et quelques lieues; le long du
Mézendéraii, elle en a tout au plus quatre-vingt-dix. La région
caucasique la sépare de la mer Noire. Le Affilga, fleuve considérable,
descendu de Russie, y porte un grand tribut qui tem-
])ère de plus en plus sa salure, en diminuant son étendue jiar
les attérissements, d’où résulte un grand Delta qui compose le
territoire d’Astracan, L’Oural y tombe aussi du même côté. Le
Kour, dont la Geòrgie forme le bassin, grossi de l’Araxe, y vient
également épancher de l’eau douce sur ses rives occidentales ;
par celles de l’Orient, vers le Siid-Ouest, elle reçoit l’Oxus, le
Syderis et le Macéras de l’antiquité, rivières encore jieu connues
des géographes modernes. Nul cétacé n’a persisté dans la
Caspienne proprement dite; mais on assure que des phoques
y vivent toujours. Les poissons n’en ont ]ias été suffisamment
étudiés ; on n’en a décrit qu’un petit nombre d’espèces, et nous
ne savons absolument rien de son hydropbytologie. Un seul
polypier flexible, très-curieux, nous est parvenu de ses côtes
méridionales , qui sont hautes et généralement escarpées. Tout
le reste de son enceinte s’étend dans les basses régions sablonneuses
, salées et désertes, qui faisaient sans doute naguère encore
partie de son lit. Ce n’est que depuis le règne du ezar
Pierre I" qu’on a une idée de sa figure, qui varie néanmoins
encore sur nos cartes géographiques.
2° La M e r d ’ A r a l , beaucoup plus petite que la précédente,
à l’Orient de laquelle on la trouve, est cou|iée en deux parties
presque égales par le quarante-cinquième parallèle Nord. Le
fleuve Sir, qui s’y jette à l’Est par trois grands bras, et le Djihoun,
qu’elle reçoit vers le Sud, en adoucissent les flots. I.a plus grande
analogie règne entre les deux grands amas d’eau voisins, qui
furent sans doute primitivement un seul et même tout. On
assure qu’il s’y rencontre aussi des phoques. D’innombrables
petites îles en remplissent les parties méridionales, et préparent
sa diminution fort prochaine sur le quart de son étendue.
3“ Le L a c B a i k a l est encore moins connu que les deux cas-
[liennes qui viennent d’être mentionnées. Nous ne savons aucune
particularité bien constatée sur son histoire naturelle, et pas
meme si ses eaux sont douces ou salées. Quelques voyageurs
les disent potables; mais, d’un autre côté, ils y admettent
1 existence des phoques, qui ne sauraient vivre que dans l’eau de
mer. Situé entre le cinquante-unième et le cinquante-cinquième