
pyramides dites l’orientale, l'occidentale et la peinte, la première faite pour rece’
voir son tombeau, la deuxième pour celui de son frère, la troisième pour celui
de son neveu ( 1 ). Il y est dit qu’on avoit inscrit sur les murailles les principes
de la géométrie, de la médecine, de l’astrologie, et quelle devoit être la position
exacte de chacune des planètes dans les signes du zodiaque, au jour où la
terre, seroit bouleversée et abîmée de fond en comble; par exemple, le soleil
et la lune dans la première minute du belier, Saturne au premier degré 28 du
belier (2), &c. El-Maçoudy, antérieur de plus d’un siècle, rapporte la même
histoire (3). . •
Cet écrit fut traduit du qobte en arabe en 225 de l’hégire, 4321 ans solaires
après la construction des pyramides. On trouva qu’il s’étoit écoulé depuis le
déluge jusqu’à ce jour 14 7 1 ans 39 jours 12 heures et une fraction (4), et l’on
conclut que l’écrit avoit été composé 399 ans 205 jours 10 heures et une fraction
avant le déluge.
El-Qodâ’y ajoute que la troisième pyramide a le bas en pierre noire, et lé haut
en pierres nommées kerdân. Chacune des trois pyramides a une porte qui conduit
à un canal souterrain de 1 50 coudées de long; elles renferment, dit-il, une prodigieuse
quantité d’or et d’émeraudes.
Nous devons placer ici, pour servir de terme de comparaison, l’abrégé du
récit d’A ’bd el-Rachyd el-Bakouy (y), d’après la traduction qu’en a faite notre
collègue M. Marcel :
D ’après la tradition, on trouva dans les pyramides, l’an 225 , un livre en caractères inconnu s, qui
furent interprétés par un vieillard du monastère de Kalmoun. O n y avoit inscrit les observations célestes
fa ite s pour la construction des pyramides, et d’autres plus anciennès en co re , relatives à la future submersion
et destruction de la terre ( les dernières observations ne s’accordent qu’en partie avec celles que
rapporte el-Qodâ’y ) . Sourid, fils de Sahlouq, choisit pour son tombeau la pyramide orientale O n entroit
dans ces pyramides par un édifice souterrain, lo n g de 1 50 coudées. L e portique de la pyramide orientale
étoit situé vers l’orient; celui de foc c id en ta le , vers l’occident; et l’èntré ed e la troisième, vers le nord. C e
fragment a été traduit du qobte en arabe. En comparant les époques astronomiques, on trouva q u e ,
depuis la fondation des pyramides, il s’étoit écoulé 43 3 1 ans, e t , depuis le déluge [to ufân], 3 p4-1 ans :
ainsi ce livre fit connoître que les pyramides avoient été construites 39Ó ans avant le déluge....
Le s deux grandes pyramides sont élevées de 3 17 coudées; les quatre faces sont égales , et larges à la
base de 460 coudées. O n assure quautrefois les pyramides étoient couvertes de diverses sculptures, et
même qu’on y lisoit une inscription en caractères antiques nommés mousnad, ou hémyary ( 6 ) , portant
que fa construction de ces monumens attestoit la puissance de la nation E g yp tien n e , et qu’if étoit plus
facile aux hommes de les détruire que d’en élever de Semblables.
L e sphinx est une statue admirable, nommée Abou-l-houl'à «ÉtélI ; elle sert de talisman contre les sables
pour les empêcher de pénétrer dans la contrée de Gyzeh.
D ’après l’ouvrage d'Abou Ynqoub Mohammed ben Ishâq el-Nedym, cité par el-Maqryzy ( Fihricet el-
Ouloum, ouvrage qui est une encyclopédie des sciences ), on trouva, au centre de la grande pyramide ( 7 ),
( 1 ) Voye% leurs noms page suivante. (6) C ’étoit l’écriture du dialecte des Hémyarites \Ho-
(2) Ou 28o 1 suivant A’bd el-Rachyd. meritee de Ptolémée ] , habita’ns de l’Arabie heureuse, qui
(3 ) Voyez la note de la page précédente. avorent fait des conquêtes en Afrique : leur lángue et
(4) II faudroit 3921 ans 159 jours, &c. leurs caractères étoient également inconnus dès le temps
( 5 ) Cet auteur a achevé son ouvrage, qui est une es- de Mahomet ( Décade Egyptienne, t. I , p. 257 ).
pèce de géographie universelle, en Fan 815 de l’hégire (7 ) II ÿ a dans la traduction , au centre de l’esplanade
[>412 de notre ère]. V oy. Décade Egyptienne, 1.1 , p. 256. qui termine la grande pyramide. Il est douteux qu’il
une salle avec un tombeau recouvert de pierres polies et peintes, puis deux statues remarquables et en
pierre, en face l’une de l’autre, représentant un homme tenant une table couverte d’inscriptions, et une
femme tenant un miroir doré et sculpté ; entre elles un vase contenant, enfermée dans du bitume , une
boîte d’or qui se trouva pleine de sang liquide; enfin , dans le tombeau, un corps d’homme dans des
langes, parfaitement conservé, e t , auprès, celui d’une femme ; enfin des idoles et des outils ( 1 ).
Le prétendu livre déchiffré par le vieillard de Qelymoun fut trouvé auprès
de la pyramide. Il est superflu de discuter les dates de sa composition, de la
traduction, et des copies qui en furent faites à différentes époques : ici l’imagination
des Arabes s’est donné carrière, aussi bien que dans les supputations
astrologiques sur le cataclysme universel et la prédiction du déluge. Toutefois
la différence des versions semble montrer qu’elles viennent de sources différentes,
et ce qu’il y a de commun entre elles ( parmi les faits d’ailleurs conformes à
d’autres récits, ou vraisemblables par eux-mêmes) pourroit n’être pas tout-à-fait
dénué de fondement; par exemple, que, dans l’année 225 de l’hégire, on a
trouvé un manuscrit traduit de l’égyptien en grec, et mis plus tard en arabe;
qu’il y étoit question d’observations célestes, relatives à la construction des
pyramides ; que la troisième avoit une partie de ses matériaux composés de
pierres noires [ granit ] (2); qu’on trouva dans ces monumens des richesses, des
sculptures et des statues ; que les trois grandes pyramides étoient distinguées
par les noms d’orientale, d’occidentale et de peinte ; enfin que l’on rencontra dans
les galeries inférieures ou salles souterraines des tombeaux avec leurs momies
intactes.
Indépendamment de ces circonstances, les récits des Arabes que nous avons
analysés, en offrent d’autres d’un intérêt plus direct. Quant aux noms des rois
auxquels sont attribuées les trois pyramides, on remarque beaucoup d’accord
entre tous les écrivains : c’est toujours à Souryd, fils de Sahlouq, que la première
est attribuée, à Herdjib la deuxième, à Kerourès la troisième; ces deux
derniers princes, comme dans les écrits des Grecs, sont le frère et le neveu du
premier. Ce nom de Kerourès ou Kouros est le seul qui ait quelque analogie avec
le nom de Chérinus [Mi-cérinus] que rapporte Diodore de Sicile. Ce qui regarde
les dimensions des édifices est encore plus positif et digne d’attention.
Toutes les ouvertures des pyramides découvertes jusqu’à présent sont sur la
face du nord, et nous voyons que les auteurs Arabes placent les portes différemment;
celle de la grande à l’est, de la deuxième à l’ouest, de la troisième
au sud (un auteur dit au nord). Est-il prouvé qu’ils se sont trompés! non sans
doute, et il est presque impossible d’obtenir cette preuve à cause des masses
immenses de décombres et de sables accumulés au pied de ces monumens. A
l’époque d’Al-Mâmoun, elles ne s’étoient pas amoncelées à ce point, et l’on
avoit pu trouver les bases découvertes ou peu encombrées. D ’un autre côté,
les ouvertures que nous connoissons sont toutes bien au-dessus de la base, à
s'agisse ici de l’esplanade du sommet : si les mots, qui ter- ( i ) Norden, Voyage d'Egypte et de Nubie, édiç. de
mine, sont bien conformes au texte Arabe, il est peut- Langlès, t. I I I , p. 278 et suiv.
être question d'une salle souterraine, à laquelle fait (2) J’ignore ce qu’on entend par l’espèce de pierre dite
allusion le passage d’Hérodote ( voyeç ci-dessus, p. 165). kerdân.
A. T O M E II. j l l