peut, en augmentant, par exemple en triplant cette somme, supputer à peu près
ce que chaque individu a consommé par année, et de cette maniéré on trouve-
roit un peu plus de treize de nos francs ( i ), environ trois centimes et demi par
jour l’un dans l’autre. Mais ce n’est là qu’une simple approximation, incapable de
satisfaire la curiosité du lecteur. Sur quelle face de la pyramide fut gravée l’inscription
Égyptienne qui gardoit, selon notre auteur, le souvenir de cette dépensé,
c’est un point sur lequel on n’a formé que des conjectures. J’ai dit qu’on ne trou-
voit aucun caractère écrit dans l’intérieur du monument ; on a de la peine à admettre
qu’il y en ait eu au dehors : du moins une inscription semblable, même
écrite en grands caractères, n’auroit pu être lue d’aucun endroit; le revêtement
d’ailleurs étoit tout entier de pierres polies, ajustées avec le plus grand soin:
sur le socle seul on peut la concevoir raisonnablement. C ’est là qu’il faudroit
chercher celles que les Arabes affirment avoir vues.
Il me semble qu’on a allégué à tort le passage d’Hérodote comme une preuve-
que la pyramide avoit été construite pour servir de tombeau. Ce fait ne se voit dans
aucun des treize chapitres consacrés à ces monumens. C’est même avant de parler
de la pyramide de Chéops qu’il rapporté que ce roi destina a sa sépulture des
chambres souterraines ménagées dans la colline: cette sépulture étoit dans une
île formée par un canal tiré du fleuvè, àvec des conduits en maçonnerie (2).
Ainsi la colline renfermant le tombeau est bien celle des pyramides ; voilà tout
ce qu’il y a de commun entre elles et lui : mais le souterrain du tombeau, mais
l’île et le canal qui l’entouroit, pouvoient être par-tout ailleurs que sous là pyramide
même. Si donc le texte d’Hérodote a été bien compris, je suis surpris quon
ait tiré de notre auteur la conclusion dont il s’agit ; c’est sans doute parce qu’on
a voulu rapprocher le fait du puits de la pyramide de celui des chambres souterraines
d’Hérodote, deux circonstances qui n’ont pas une connexion nécessaire : au
reste , en commentant Pline et Diodore, j’aurai occasion de revenir sur le puits.
Deux mots suffiront sur les mesures de la pyramide selon notre auteur. Elle
avoit, dit-il, 8 plèthres de long, et une hauteur égale. D ’après la valeur du pied
Olympique , le même, selon moi, que le pied Égyptien, la base de la pyramide;
égale à ago1”;«), avoit 750 pieds, ou 7 plèthres et demi : les 8 plèthres seraient dont
un nombre rond (3). Quant à la hauteur, qui, entière, étoit de 144m, 1 çj, il y a
si loin de là à 8 plèthres [800 pieds], quil est impossible d’expliquer ce que dit
l’historien, en admettant même qu’il ait voulu parler de l’arête : cellè-ci avoit
2 i7m;8; la différence à 230“ ,9 est encore trop considérable. Toutefois cette
hypothèse 'tendrait à expliquer l’erreur qui a long-temps fait croire la pyramide
équilatérale.
Continuons d’examiner la description d’Hérodote, toujours sans nous arrêter
à ce qui n’a besoin d’aucun commentaire, et que tout lecteur attentif reconnoît
de lui-même comme conforme à la description actuelle des lieux. Il parlé de trois
( 1 ) J’admets ic i, avec le traducteur d’Hérodote, (2 ) Voyez plus haut, pag. 165.
l’emploi du talent attique, et poûr sa valeur, en nombre (3 ) Mémoire sur le système métrique des anciens
rond, 5500 francs de notre monnoie : c’étoit en tout Egyptiens, tome J ." , page yzy.
2 6 ,40 0,00 0 fran cs.
autres pyramides; une petite élevée par la fille du roi Chéops ( i ), celle de Chéphren
son frère, et celle de Mycérinus son neveu. L ’origine de la première est
si bizarre, qu’on peut la regarder comme un trait de l’imagination Grecque : quant
aux prêtres qui instruisirent Hérodote de l’histoire d’Égypte, on ne peut leur attribuer
cette invention; car elle s’allie mal avec leur gravité si connue. Ce motif
ne devroit pas empêcher de rechercher la place de la pyramide de la fille de
Chéops, remarquable par sa petite dimension d’un plèthre et demi [environ
46 mètres]; mais comment peut-on la retrouver sur le terrain d’après cette situation
vague, au milieu des trois, en face de la grande! Ce lieu seroit en dessous du
plateau. Le texte d’ailleurs a-t-il été bien compris (2) ! Pour la mesure, on la re-,
trouve à peu près dans la q u a t r i è m e pyramide, longue d’environ 4 3 mètres, ou
un plèdire et demi en nombre rond.
La pyramide de Chéphren, dit Hérodote, n’avoit pas, comme celle de son
frère Chéops, de chambres souterraines, ni de canal tiré du Nil se déchargeant
dans l’intérieur : doit-on inférer de ces expressions que spus la p r e m i è r e pyramide
étoit un tombeau souterrain ( 3 ), et que les eaux du fleuve arrivoient jusque là î
Je ne le pense pas ; du moins une sorte d’obscurité qui règne dans le passage ne
permet guère d’en tirer cette conséquence. Il est possible même d admettre que
les eaux du canal occidental ont été amenées sous la colline jusqu’à une certaine
distance, sans qu’on soit obligé d’en conclure qu’elles avoient été conduites sous
le centre de la pyramide.
Hérodote assure avoir pris lui-même la mesure de la s e c o n d e pyramide, et
trouvé qu’elle n’égale pas en dimensions la p r e m i è r e . Il s agit de la base, puisque,
plus loin, il dit que la pyramide est plus basse de 4° pieds. Cette différence peut
s’expliquer de plusieurs façons : ou il s’agit de celle des deux hauteurs absolues, ou
il est question seulement de celle de 'l’élévation des sommités ; ce qui n’empê-
cheroit pas que les hauteurs absolues ne fussent égales, les bases pouvant être à
des niveaux différens. Mais il paroît que la base de la s e c o n d e pyramide n est
pas plus élevée que celle de la p r e m i è r e : d’un autre côté, les sommités actuelles
sont dans un plan sensiblement horizontal. Or il manque 8 mètres à la première
et au moins 1 mètre à la seconde.
Ainsi les deux hauteurs actuelles, qui (socles compris) ont i 38 mètres l’une et
l’autre, faisoient autrefois environ 146 mètres et 1 39 mètres; différence, 7 mètres
en plus, ou environ 23 pieds Égyptiens. Sans les socles, la différence seroit de
8 mètres, ou moins de 27 de ces mêmes pieds (4)> au heu de 40 pieds dont ¡1 est
fait mention dans Hérodote. La pyramide repose, dit-il, sur une première assise
de pierres d’Éthiopie de diverses couleurs. Ce passage explique les blocs de granit
que j’ai vus auprès du monument, et que j’ai décrits ci-dessus.
Ce que rapporte notre auteur du pâtre Philiton, à propos de ces deux pyra-
( i ) Voye£ ci-dessus, pag 165.
( 2 ) ThV CV flkalù TtûV TÇJ.W ¿ff%Kv7aV, ipt<ZBf>0<dtV 7WÇ fÂkyÎKYlÇ
TWÇÿ.fJuSlsç (Iib. 11, cap. CXXVl ).
( 3 ) O tm yàp v m A oimpcLia. vm yîïv, ovn ou 7tu Né/aou
Stcùfv^ Hit«/ sV cuù'riiv 3 cùtrinp i ç 7nV étsjpiiv, ptovon ( i ib . I I ,
A. T OME II.
cap. CXXVII ). J’avoue toutefois que ces mots, eV aùniv,
mistp tç 71iv iiipw , piovtm, annonceroient un canal
creusé jusqu’à la première pyramide.
(4 ) Dans le Mémoire sur le système métrique des Egyptiens,
j’avbis admis pour la SE CO N D E pyramide une
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