grand nombre sur Jes monumens des ans; et il y en aurait bien plus, si les
voyageurs eussent pu les tracer par-tout indistinctement, comme on le fait aujourd’hui
en Europe : mais ils devoient respecter les sculptures qui recouvrent
en entier la surface des temples et des palais de 1 Égypte ; il n y avoit, pour recevoir
ces inscriptions, que des fragmens de statues, les débris épars et quelques murs
lisses ou non couverts de leurs décorations.
Sur les monumens Grecs ou Romains, les inscriptions publiques sont plus
nombreuses et plus étendues que sur les monumens Égyptiens, parce que, dans
ceux-ci, 1 écriture hiéroglyphique et les scènes qu’elle accompagne, recouvraient la
totalité des murailles et même des colonnes. Les rois Grecs et les empereurs ont
donc été obligés de mettre à profit pour cet usage la seule partie de ces édifices
où les Égyptiens n’ont jamais rien sculpté, c’est-à-dire, le listel des corniches
extérieures. Une inscription publique placée sur un monument doit occuper un
endroit très-apparent de la façade : dans les temples d’Égypte, ce listel en étoit
la seule partie lisse; et cette partie, étant très-étroite, ne pouvoit contenir que deux
ou trois lignes d’écriture.
Les inscriptions qu’on recueille parmi les restes de l’antiquité, sont utiles pour
confirmer l’histoire, ou pour apprendre des faits ignorés, ou enfin pour résoudre
certaines questions épineuses d’archæologie : ce sont toujours des monumens
précieux par leur authenticité. Or les inscriptions isolées qu’on trouve en Égypte
intéressent sous ces différens rapports; elles fournissent des données sur l’état
de ce pays pendant les dominations Grecque et Romaine, et même au-delà
de ces époques : en outre, elles éclaircissent plusieurs points relatifs à la religion,
aux coutumes, à la géographie. On peut les ranger en quatre classes :
1.° Les inscriptions cursives en langue Égyptienne, soit hiéroglyphique, soit
vulgaire ;
2.° Celles en langue Phénicienne, Persépolitaine ou Éthiopienne ;
3.° Celles en grec ;
4 ° Celles en latin.
Voici dans quels lieux on trouve les unes et les autres. On voit des inscriptions
en égyptien vulgaire sur différens édifices, à Philæ, à Karnak, à Medynet-abou et
aux pyramides ; elles portent le cachet d’une grande ancienneté, et paroissent appartenir
à des voyageurs du temps , qui venoient rendre hommage aux plus anciens
temples de Thèbes, de Philæ, &c. Les plus curieuses sont accompagnées de la
forme d’un pied, tracée à la tête du texte ; usage qui a été suivi par d’autres peuples.
Il semble que ces inscriptions en langue vulgaire ou cursive, gravées sur les
monumens Égyptiens, ont servi de modèle à celles que les Grecs y ont tracées
par la suite, à peu près dans le même but.
Outre les inscriptions en égyptien vulgaire gravées dans l’île de Philæ, il y en a
un grand nombre en hiéroglyphes cursifs, profondément empreintes sur les rochers
de granit qui entourent cette île. Les signes sont de forme irrégulière, et n’ont pas
la correction de ceux qui sont gravés dans les temples; et il n’est pas douteux qu’ils
n’aient été tracés par des particuliers.
Les carrières et les hypogées d’Antoeopolis renferment aussi des inscriptions en
caractères cursifs, de la même nature que ceux des manuscrits Égyptiens sur papyrus.
De toutes les inscriptions où l’on a fait usage de la langue alphabétique, celle
quil faut mettre au premier rang pour l’importance, quoique non la plus ancienne,
est 1 inscription de la pierre de Rosette, écrite en trois langues. On sait que c’est
un décret du collège de Memphis, dont le texte renferme une foule de détails de
moeurs, de géographie et d’histoire.
On a distingué des inscriptions Phéniciennes et Éthiopiennes à Philæ, dans
une petite salle qui semble avoir été le rendez-vous des voyageurs pieux; les
sculptures qu’on y voit représentent la mort d’Osiris, et c’est le tombeau d’Osiris
qui attirait la foule à Philæ. Aussi les murs de cette salle sont couverts d’une
foule d inscriptions en diverses langues, tracées en rouge, ou creusées dans la
pierre; plusieurs sont écrites sur le plafond (1).
Les plus anciennes après celles-là remontent à la conquête des Perses, et sont
en caractères Persépolitains : leur objet diffère sans doute de celui des autres ;
mais elles sont également tracées sur des ouvrages de l’Égypte ancienne ou du style
Égyptien. Aux environs de Soueys, à l’endroit auquel on a attribué le nom de
Serapeum, on trouve des fragmens en granit sur lesquels on voit ensemble des
hiéroglyphes et de l’écriture Persépolitaine (2). Il paraît que ces travaux sont
des ouvrages faits par les Perses , ou bien de leur temps, et portent quelque
dedicacç en leur langue ; ils ont quelques rapports avec la petite pierre trouvée
à Edfou, et qui est l’ouvrage des Grecs (3), bien qu’elle renferme des ornemens
imités du style Égyptien.
Parmi les inscriptions Grecques tracées sur les édifices religieux ou sur des
monumens de tout genre, les unes sont faites sous les Ptolémées, les autres sous
les empereurs Romains. Plusieurs de ces dernières sont de la main des Chrétiens
Qobtes, et le plus grand nombre en est dans l’île de Philæ ou dans les hypogées
de la Thébaide; elles contiennent des noms de saints, de patriarches, d’évêques,
de martyrs, d’apôtres et de solitaires.
Enfin les inscriptions Latines ont été tracées par les Romains à Philæ, aux
tombeaux des rois, sur le colosse dè Memnon, à Damiette, à Alexandrie et
en d’autres endroits.
On distingue dans toutes ces différentes inscriptions les noms de cinq rois
Ptolémees; savoir, Évergète, Épiphane, Philométor, Alexandre et Aulètes (4) ; ceux
( i ) On ne parle pas ici des inscriptions Phéniciennes le V .e volume d’antiquités, Collection d'antiques. La colet
Hébraïques tracées sur le Gebel-Mokatteb au mont Iection de M. dePalin, à Constantinople, renferme une
Sinaï. MM. Rozière et Coutelle ont copié un grand pierre de la même forme, c’est-à-dire carrée, avec des
nombre de ces inscriptions, dont une partie avoit déjà ornemensGræco-Égyptienssemblables> mais sansinscripété
rapportée par Pococke.^ tion Grecque.
(2) Voyez les dessins quen a recueillis M. Rozière, (4) Dans le volumineux recueil d’inscriptions de
planche A , vol. V. On voit aussi les deux écritures Gruter, et dans tous ceux qui lui ont succédé, on n’en
ensemble sur un vase de la Bibliothèque du Roi. trouve que très-peu qui soient relatives aux Ptojémées.
( 3 ) Cette pierre a été rapportée par M. Girard.' Voyer
A . T O M E I I . " A j