Le poirier s'accommode moins d'une terre fbrLe et fraîche que le
pozuniier, surtout lors([u'il est grelTésur coignassier, et on ne doit greffer
sur ce dernier sujet que les arbres qu'on destine à être taillés, ou qui
doivent être plantés dans un petit emplacement ovi un grand arbre nuiroil
ou ne pourroit pas se développer. Quant à la greffe, à la plantation et à
la taille du poirier, on peut consulter ce que nous en avons dit dans
l'introduction. Nous allons passer à la cueillette des poires, à la manière
de les conserver et à leurs usages, en rapportant ce qu'en a dit l'auteur
qui nous semble avoir le mieux traité celte matière.
Quand on a cueilli les poires d'été, on les laisse reposer trois ou
quatre jours dans une chambre fraîche sur des feuilles de vigne, où
elles achèvcm de se perfectionner. On cueille celles d'hiver eu octobre;
on les porte tout de suite dans la fruiterie; on les pose sur des planches
séparément et assez éloignées les unes des autres pour qu'elles ne se
touchent point.
Les poires se mangent crues ou cuites, en compotes, à l'eau-de-vie ou
sécliées. Quan<l on en a une assez grande quantité pour qu'on ne puisse
la consommer dans la saison, on peut faire sécher pour son usage ou
pour vendre une partie de ces fruits, qui peuvent ainsi se garder
pendant deux ans. La plupart des recettes pour faire ce qu'on appelle
ccunnunjément poires tapées, sont imparfaites et peu sûres; nous croyons
devoir rapporter ici celle dont nous faisons usage, afin de fixer les idées
des j)ersonnes qui seroient dans le goût de faire ces économies de
campagne.
Prenez des poires de rousselet, de beurré d'Angleterre, de doyenné,
de beui-ré, de messire-jean et de martin-sec; ce sont les espèces les plus
convenables. Vous les pèlerez, et ne jetterez pas les pelures; vous passerez
vos poires à l'eau bouillante, et les laisserez même prendre un bouillon
ou deux avant de les retirer. Jetez dans la même eau bouillante les pelures,
que vous y ferez cuire jusqu'à ce que vous en puissiez exprimer le jus,
en les pressant dans une passoire ou dans un linge clair et ])lanc. Vous
remettre/, bouillir ce jus exprimé jusqu'à ce qu'il soit réduit en sirop
épais; ensuite vous mettrez vos poires sur des claies au four, que vous
chaufferez un peu moins chaud que pour du j)ain. Vous les y remettrez
successivement trois jours de suite, et le ([uatriènie j o u r , avant de les
T R A I T É DES A R B R E S FRUITIERS,
mettre au four, vous les a])latirez entre les doigts et les tremperez, ainsi
aplaties, et une fois seulement, dans votre sirop. Lorsqu'elles sont retirées
du four, il n'y a plus qu'à les mettre dans des boîtes proprement garnies
et couvertes de papier, pour les garder en lieu sec jusqu'au carême, et
même pendant deux ans. Le sirop restant peut servir à faire queh[ue
compote, on ne perd rien en ménage. On mange les poires tapées sèches
comme elles sont, ou cuites en compote. Nos ménagères font de ces
poires sans les peler et les mêlent parmi les pruneaux.
Les poires d'hiver ne peuvent pas s'apprêter de la même manière; elles
sont trop dures : les unes se mangent crues, comme la vîrgouleuse. le
colmar, la l'oyale d'hiver; les autres ont besoin de cuisson, connue le
oatillac, etc.
La poire de bon-chrétien d'hiver se mange aussi crue, seule ou avec des
oranges, le tout coupé ])ar rouelles et arrosé d'eau-de-vie ou d'huile et
de sucre. Elle est excellente aussi quand elle est cuite convenablement; la
façon la plus simple est la meilleure, en même temps qu'elle est la plus
cconomi([uc; voici comment l'on procède. On met ces poires, sans être
pelées et sans sucre, dans luie quantité d'eau suffisante pour qu'elles en
soient couvertes; on fait cuire le tout jusqu'à réduction de l'eau en
sirop ; on dresse les poires sur une assiette et le sirop se verse par-dessus.
IVéparées de cette jnanière, leur sucre nalurel se jiorte à un degré
supérieur. Plus simplement encore, ou peut les faire cuire au ponmiier
avec leur peau comme les ponnnes; elles sont aussi sucrées de celle
làçon; le parfum est le même, elles n'ont de moins que le sirop.
Nous n'avons donné ces recettes que parce que ])caucoup de jiersonnes
croient que le mérile des poires de bon-chrétien n'est que d'orner les
desserts d'iiiver par leur beauté et par leur couleur, qui quelquelbis s'élève
à un haut degré; on bien parce qu'elles ne connoissent que la manière
des grandes maisons, où on en fait des compotes après les avoir coupées
par quartiers et en jetant par-dessus un siroj) paie, pas trop sucré et
sans parfum. Toutes les autres jK)ires à cuire, connue le catillac, etc.,
sont acres, et ne peuveiu se passer de sucre quand on les lait cuire dans
l'eau, à moins qu'on ne les mêle avec des poires de bon-chrétien d'hiver,
de martiu-spc, dont le sirop réduit leur doime le sucre qu'elles n'ont
point elles-mêmes; mais étant cuites au pommier, elles sont suflisamment