46 H i s t o i r e N a t u r e l l e
font miférables fans être malheureux; & dans fes productions
les plus négligées, la Nature paroît toujours
plus en mère qu’en marâtre.
Ces deux animaux appartiennent également l’un &
l ’autre aux terres méridionales du nouveau continent f &
ne fe trouvent nulle part dans l’ancien. Nous avons ~
déjà dit que l’Éditeur du Cabinet de Séba s’étoit trompé,
en donnant à l’unau le nom de PareJJeux de Ceylan ;
cette erreur adoptée par M .rs Klein, Linnæus- & Brillon
eft encore plus évidente aujourd’hui qu’elle ne l’étoit
alors ; M. le marquis de Montmirail a un unau vivant
qui lui eft venu de Surinam ; ceux que nous avons au
Cabinet du Roi viennent du même endroit & de la
Guiane, & je fuis perfuadé qu’on trouve l’unau, auiïi-
bien que l’aï, dans toute l’étendue des déferts de l’Amérique,
depuis le Brefilbau Mexique; mais que, comme
il n’a jamais fréquenté les terres du nord, il n’a pu
paft'er d’un continent à l’autre ; & fi l’on a vu quelques-
uns de ces animaux, foit aux Indes orientales, foit aux
côtes de l’Afrique, il eft fûr qu’ils y avoient été tranf-
portés. Ils ne peuvent fupporter le froid ; ils craignent
aufti la pluie : les alternatives de l’humidité & de la
féchereffe altèrent leur fourrure, qui reflemble plus à
du chanvre mal ferancé, qu’à de la laine ou du poil.
* Voyez dans le Tome 1X de cet Ouvrage, les difcours fur les
Animaux des deux Continens.
b L ’aï,décrit & gravé par M. Edwards, venoit du pays de Honduras.
D . Antonio de Uiloa dit.qu’on en trouve aux environs de Porto-bello.
| Je ne puis mieux terminer cet article que par des
obfervations qui m’ont été communiquées par M. le
marquis de Montmirail, fur un unau qu’on nourrit
depuis trois ans dans fa ménagerie. « Le poil de l’unau
eft beaucoup plus doux que celui de l’a ï . . . . il eft à «
préfumer que tout ce que les Voyageurs ont dit fur la «
lenteur exceftive des parefleux ne fe rapporte qu’à l’aï. «
L ’unau , quoique très-pelant & d’une alure très-mal- «
adroite, monteroit & defcendroit plusieurs fois en un «
jour de l’arbre le plus élevé. C ’eft fur lé déclin du «
jour & dans ta nuit qu’il paroît s’animer davantage, ce «
qui pourrait faire fôupçonner qu’il voit très-mal le jour, «
& que ftt vue ne peut lui fervir que dans i’obfcurité. «
Quand j’achetai cet animal à Amfterdam , on le nour- «
riflbitavec du bifcuit de mer, & l’on me dit que dans «
le temps de la verdure il ne falloit le nourrir qu’avec «
des feuilles ; on a eftàié en effet de lui en donner, il <«
en mangeoit volontiers quand elles étoient encore «
tendres, mais du moment où elles commençoient à fe «
deftecher & à “'être piquées des vers, il les rejetoit. «
Depuis trois ans que je le conferve vivant dans ma «
ménagerie , fl nourriture ordinaire a été du pain, «
quelquefois des pommes & des racines, & fa boiffon «
du lait: il faifit toujours, quoiqu’avec peine, dans une «
de fes pattes de devant, ce qu’il veut manger, & la«
grofteur du morceau augmente la difficulté qu’il a de «
le faifir avec fes deux ongles. Il crie rarement, fon cri «
eft bref & nefe répète jamais deux fois dans le même «