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doigts font réunis par une membrane qui ne s’étend
pas jufqu’à leur extrémité, & qui dans chacun eft
terminée par un ongle. Ils diffèrent des autres phoques,
non - feulement par la grandeur & la groffeur, mais
encore par d’autres caractères ; les lions marins mâles ont
une efpèce de groffe crête ou trompe qui leur pend du
bout de la mâchoire fupérieure de la longueur de cinq
où fix pouces. Cette partie ne fe trouve pas dans les
femelles, ce qui fait qu’on les diftingue des males au
premier coup d’oeil, outre quelles font beaucoup plus
petites. Les mâles les plus forts fe font un troupeau
de plufieurs femelles, dont ils empêchent les autres
mâles d’approcher. Ces animaux font de vrais amphibies
; ils paffent tout l’été dans la mer, «St tout l’hiver
à terre, & c ’eft dans cette faifon que les femelles
mettent bas; elles ne produifent qu’un ou deux petits,
qu’elles allaitent, <5c qui font en naiflant aulfi gros qu un
veau marin adulte.
Les lions marins, pendant tout le temps qu’ils font
à terre , vivent de l’herbe qui croît fur le bord des
eaux courantes, & le temps qu’ils ne paiffent pas, ils
l ’emploient à dormir dans la fange ; ils paroilfent d’un
naturel fort pefant, &. font fort difficiles à réveiller; mais
ils ont la précaution de placer des mâles en fentinelle
autour de l’endroit où ils dorment, & l’on dit que ces
fentinelles ont grand foin de les éveiller dès qu’on
approche. Leurs cris font fort bruyans &. de tons différens
: tantôt ils grognent comme des cochons, &.
tantôt
tantôt ils henniffent comme des chevaux ; ils fe battent
fouvent, fur-tout les mâles qui fe difputent les femelles,
& fe font de grandes bleffures à coups de dents. La
chair de ces animaux n’efl pas mauvaife à manger ; la
langue fur - tout eft auffi bonne que celle du boeuf. Il
eft très-facile de les tuer, car ils ne peuvent ni
fe defendre ni s enfuir ; ils font fi lourds qu’ils .ont
peine à fe remuer, & encore plus à fe retourner ; il
faut feulement prendre garde à leurs dents , qui font
très-fortes, <&. dont ils pourroient bleffer fi on les
approchoit de face & de trop près *.
Par d’autres obfervations, comparées à celles - c i , &
par quelques rapports que nous en déduirons, il nous,
paroît que ces lions marins, qui fe trouvent à la pointe
de 1 Amérique méridionale, fe retrouvent, à quelques
variétés près, fur les côtes feptentrionales du même
continent. Les grands phoques des mers du Canada,
dont parle Denis, fous le nom de loups marins,-& qu’il
diftingue des petits veaux marins ordinaires, pourroient
bien être de la même efpèce que les lions marins des
terres Magellaniques. Leurs petits ( dit cet auteur, qui eft
affez exact ) font en naiffant plus gros que lê plus gros:
porc que l’on vo ie, & plus longs : or il eft certain que les-
phoques ou veaux marins de notre Océan ne font jamais
de cette taille',- quand même ils font adultes ; celui de
là Méditerranée’, c ’eft-à-dire 1 e phoca des Anciens ,
* Voyage autour du'Monde, par Anton, page i o o è f fiiva n tes,
où l’on voit auffi k figure du mâle & de la femelle.
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