382 Histoire Naturelle
aucun mal. Ce fait ne peut être vrai dans toutes fes
circonftances , il paroît accommodé à la fable du
dauphin des anciens, car le lamantin ne peut abfolu-
ment fe traîner fur la terre.
Herrera dit peu de chofe de plus au fujet de cet
animal ; il alfure feulement que quoiqu’il foit très-gros,
il nage fi facilement qu’il ne fait aucun bruit dans 1 eau,
& qu’il fe plonge dès qu’il entend quelque chofe de
loin a.
Hernandès qui a donné deux figures du lamantin,
l ’une de profil & l’autre de face, n’ajoute prefque rien
à ce que les autres auteurs Efpagnols en avoient écrit
avant lui, il dit feulement que les deux océans, c ’eft-
à-dire la mer Atlantique & la mer Pacifique, auffi-bien
que les lacs, nourriffent une bête informe appelée
Manati, de laquelle il donne la defcription prefqu’en-
tièrement tirée d’Oviedo; & tout ce qu’il y a de plus,
c ’eft que les mains de cet animal portent cinq ongles
fembfables à ceux de l’homme, qu’il a le nombril &
l ’anus larges , la vulve comme celle d’une femme, la
verge comme celle d’un cheval, la chair & la graiffe
comme celles d’un cochon gras, & enfin les côtes &
les vifcères comme un taureau; qu’il s’accouple fur
terre à la manière humaine, la femelle renverfée fur le
dos, & qu’elle ne produit qu’un petit, qui eft d’une
groffeur monftrueufe en naifTanth. L ’accouplement de
“ Defcription des Indes occidentales, par Herrera, page y 7 ,
* Hernand. H\fl. Mex. pag. 323 & 324.
des Phoques, des Morses, ire. 383
ces animaux ne peut fe faire fur terre, comme le dit
Hernandès, puifqu’ils n’y peuvent aller, & il fe fait
dans l’eau fur ün bas-fond. Binet * dit que le lamantin
efl gros comme un boeuf, & tout rond comme un
tonneau, qu’il a une petite tête & peu de queue ; que
fit peau efl rude & épaiffe comme celle d’un éléphant,
qu’il y en a de fi gros, qu’on en tire plus de fix cents
livres de viande très-bonne à manger; que la graiffe
efl auffi douce que le beurre ; que cet animal fe plaît
dans les rivières proche de leur embouchûre à la mer
pour y brouter l’herbe qui croît le long des rivages,
qu’il y a de certains endroits, à dix ou douze lieues de
Cayenne, où l’on en trouve en fi grand nombre que
l ’on peut dans un jour en remplir une longue barque,
pourvu qu’on ait des gens qui fe fervent bien du harpon.
L e P. du Tertre qui décrit au long la chaffe ou la pêche
du lamantin, s’accorde prefque en tout avec les auteurs
que nous venons de citer ; cependant il dit que cet
animal n’a que quatre doigts & quatre ongles à chaque
main, & il ajoute qü’il fe nourrit d’une petite herbe
qui croît dans la mer, qu’il la broute comme le boeuf
fait celle des prés; & qu’après s’être rempli de cette
pâture, il cherche les rivières & les eaux douces où il
s’abreuve deux fois par jour; qù’après avoir bien bu
•**& bien mangé il s’endort le muffleàdemi hors de l’eau,
ce qui le fait remarquer de loin ; que la femelle fait
deux petits qui la fuivent par-tout; & que fi on prend
♦ Voyage enl’île de Cayenne, par Antoine B in et,p a g e3 4 $ .