384. HI S T O I R E ' N A T U R E L L E
la mère, on eft aflliré d’avoir les petits , qui ne l’abandonnent
pas même après fa mort, & ne font que tournoyer
autour de la barque qui l’emporte *. C e dernier
fait me paroît très-fufpeét, il eft même contredit par
d’autres Voyageurs qui a (Turent que le lamantin ne produit
qu’un petit : tous les gros animaux quadrupèdes
ou cétacées ne produifent ordinairement qü’un petit,
la feule analogie fuffit pour qu’on fe refufe à croire que
le lamantin en produife toujours deux, comme l’affure
Je P. du Tertre. Oexmelin remarque que le lamantin a
la queue fituée comme les cétacées, & non pas comme
les poiflons à écailles qui l’ont tous dans la direction
verticale du dos au ventre, au lieu que la baleine &
les autres cétacées ont la queue fituée tranfverfalement,
c ’eft-à-dire d’un côté à l’autre du corps; il dit que le
lamantin n’a point de dents de devant, mais-feulement
une callofité dure comme un o s , avec laquéile il pince
l ’herbe, qu’il a néanmoins'trente-deux dents molaires ;
qu’il ne voit pas bien à caufe de la petiteiTe de fe-s
yeux qui n’ont que fort peu d’humeur & poirit d’iris ;
qu’il a peu de cervelle; mars qu’au défaut de bons-yeux,
il a l’oreille excellente; qu’il n’a point de langue; que
les parties de la génération font plus femblâbles à celles
de l’homme & de la femme, qu’à celles d’aucun animal ;
que le lait des femelles, dont il aflure avoir goûté, eft
d’un très-bon goût ; qu’elles ne produifent qu’un feül
petit, qu’elles embraflen t& portent avec la main ; qu’elles
* Iliftoire générale des Antilles, par le P. du Tertre.
l ’allaitent
l ’allaitent pendant un an, après quoi il eft en état de fe
pourvoir lui-même 6c de manger de l’herbe ; que cet
animal a, depuis le cou jufqu’à la queue cinquante-deux
vertèbres; qu’il fe nourrit comme la tortue , mais qu’il
ne peut ni marcher ni ramper fur la terre“. Tous ces faits
font aftez exaéts, & même celui des cinquante-deux
vertebres ; car M. Daubenton a trouvé dans l’embryon
qu il a diflequé, vingt-huit vertèbres dans la queue , feize
dans le dos & fix ou plutôt fept dans le coub. Seulement
ce Voyageur fe trompe au fujet de la langue, elle ne
manque point au lamantin ; mais il eft vrai qu’elle eft
attachée en deflous & prefque jufqu’à fon extrémité à
la mâchoire inférieure. On trouve dans le Voyage aux
îles de l ’Amérique. Paris, 1 / 2 2 , une aftez bonne def-
cription du lamantin , & de la manière dont on le harponne
; 1 Auteur eft d accord fur tous les faits principaux
avec ceux que nous avons cités ; mais il obferve « crue
cet animal eft devenu aftez rare aux Antilles, depuis que «
les bords de la mer font habités; celui qu’il vit & qu’il «
tnefura, avoit quatorze pieds neuf pouces, depuis le «
bout du mufle jufqu’à la naifiance de la queue ; il étoit «
tout rond jufqu’à cet endroit ; (à tête étoit grofle , (à «
gueule large avec de grandes babines & quelques poils «
longs & rudes au-défiais ; fes yeux étaient très-petits «
par rapport à û tête, & fes oreilles ne paroiflbient que «
.comme deux petits trous ; le cou eft fort gros & fort «
* Hift. des Aventuriers, par Oexmelin, tome X I I , page 13 4 . &r fuiy,
* Voyez ci-après la defeription d’un embryon de mitnaii,
Tome X I I I . C c c