eft, dit-on, inconcevable combien de temps le glouton
peut manger de fuite, & combien il peut devorer de
chair en une feule fois.
C e que les Voyageurs en rapportent eft peut-être
exagéré ; mais en rabattant beaucoup de leurs récits, il en
refte encore afleza pour être convaincu que le glouton
eft beaucoup' plus vorace qu’aucun de nos animaux de
proie, aufli 1 a-t-on appelé le Vautour des quadrupèdes /
plus infatiable, plus déprédateur que le loup, il détruiroit
tous les autres animaux s’il avoit autant d’agilite ; mais il
eft réduit à fe traîner pefamment, & le feul animal qu il
puifle prendre à la courfe eft le caftor, duquel il vient
très-aifément à bout, & dont il attaque quelquefois les.
cabanes pour le dévorer avec fes petits lorfqu’ils ne
peuvent aflfez tôt gagner l’eaub, car le caftor le devance
plus forts lévriers p ou r attaquer cette bete, encore. leur donne-t-elle
bien de la peine. Les Rufïès font grand cas de la peau du glouton,
ils rem ploient ordinairement à des manchons pour les hommes & des
borduresde bonnets. Relation de la grande T artane. Amjlerdam, t y y j t
page 8.
* H o c animal voracijfïmum e jl, reperto namqut cadavere tantum vorat
u t violento• ribo, corpus injlar tympani extendatur ; inventaquè angujtia
inter arbores f e J lrin g it ut violentius egerat : ftcque exlenuatum. revertitur
a d cadaver & ad fummum ufque repletur, iterumque f e J lrin g it angujliâ
priore, & e . O la ï Magni, H ijl. de G tnt. fe p t. pag. 138.
*“ Le C arcajou, quoique p etit, eft très-fort & très-furieux; St.
quoique carnafîier, il eft fi lent & fi pefant q u ’il fe traîne fur la neige
plutôt q u ’il n’y marche. II ne peut attraper en marchant que lé
caftor, qui eft aufli lent que lu i, & il faut que ce foit en été où le
caftojr eft hors de là.cabane, mais e n hiver il ne peut que brifer &
à la nage, & le glouton qui voit échapper fà proie,
fe jette fur le poiflbn; & lorfque toute chair vivante
vient à lui manquer, il cherche les cadavres, les déterre,
les dépèce & les dévore jufqu’aux os.
Quoique cet animal ait de la fineffe & mette en
oeuvre des rufes réfléchies pour fe fàifir des autres
animaux, il fembte qu’il n’ait pas de fentiment diftinét
pour fa confervation , pas même l’inftinét commun
pour fon falut ; il vient à l’homme ou sîen laifle approcher
* fans apparence de crainte; cette indifférence
démolir la cabane & y prendre le caftor, ce qui ne lui réuffit que
très-rarement, parce que le caftor a là retraite afîùrée fous la glace.
HiJloire.de l ’Académie des Sciences, année i y i y , page 14.
* L es Ouvriers aperçurent de loin un animal qui inarchoit à eux
gravement & à pas comptes, que quelques-uns prirent pour un ours,
& d’autfes polir un glouton; ils allèrent au-devant de cet animal,
qu’ils reconnurent à fa fin pour un glouton, & après qu’ils lui eurent
donné quelques.bons Coups de perche, ils le prirent encore a i vie;
ils fflè l’apportèrent aufiî-tôt. . . D ’après les rapports que les chafîèurs
dé Sibérie m'aVoient fait depuis plufieürs années fur i’adreflè de cet
Animal, fôît pour tourner les autres animaux & fuppléer par la rule
à fa légèreté que la Nature lui a refulee, foit pour éviter lès embûches
dès hommes, je fus très-étonné de voir arriver Celui i c i de propos
délibéré au-devant de nous pour chercher la mort. Isbrand-ideS
l’appelle uri animal méchant, qui ne vit que de rapine ; « il a coutume,
dît-il, dé fe tenir fur fes arbres tranquille, & dé s’y cacher comme le «
lynx jufqu’à Ce qu’il pafle un cerf, un élan, un chevreuil, un lièvre, «
&c. alors il s’élânCe avec toute la rapidité d'une flèche for l'animal, ce
foi enfonce fes dents dans lé corps & le ronge- jufqu’à ce qu’il ce
expire, après quoi il le dévore à fon aile & avale julqu’au poil & ce
à la peau. Un WaiVode qui gardoit chez lui pour fon plaifir un «