36 Hi stoire Naturelle
avec d’autres animaux prefqu’auffi pareffeux qu’eux, âc
encore pour les diflinguer nettement l’un de l’autre :
car, quoiqu’ils fe reffemblent à plufieurs égards, iis
different néanmoins tanta l’extérieur qu’à l’intérieur,
par des caractères fi marqués, qu’il n’eft plus poffible,
Jorfqu’on les a examinés, de les prendre l’un pour l’autre,
ni même de douter qu’ils ne foient de deux efpèces
très-éloignées. L ’Unau (pl.l) n’a point de queue &
n’a que deux ongles aux pieds de devant ; l’A ï ( pl. V
& VI) porte une queue courte & trois ongles à tous
les pieds. L ’Unau a le mufeau plus long, le front plus
élevé, les oreilles plus apparentes que l’A ï ; il a aufli
le poil tout different ; à l’intérieur, fes vifcères font
autrement fitués & conformés différemment dans quelques
unes de leurs parties; mais le caractère le plus
diftinétif, & en même temps le plus fingulier, c ’efl
que l’Unau a quarante-fix côtes, tandis que l’A ï n’en
a que vingt-huit : cela feul fuppofe deux efpèces très-
éloignées l’une de l’autre ; & ce nombre de quarante-
fix côtes dans un animal dont le corps eff fi court,
Ignavus Americamis rifum Jletu mifccns. Ignavus Atarcgravii, Klein,
de quadrup. pag. 43.
Tardigradus pedibus anticis i f pojlicis tridaflylis. Tardigradus, le
Pareffeux. Briflon, Regn. anim. pag. 3 4.
The Sloth, Je Pareffeux. Edwards Glanures, part. 11, p l 3 1 0 .
La première figure n’eft pas mauvaiiè, quoique faite d’après une peau
bourrée.
Tridaâylus. Bradypus manibus tridaâylis, caudâ breyi. Linn. Syjf.
vat. edit. x , pag. 3 4.
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eft une efpèce d’excès ou d’erreur de la Nature ; car
de tous les animaux, même des plus grands, & de
ceux dont le corps eft le plus long, relativement
à leur groffeur, aucun n’a tant de chevrons à fà charpente.
L ’éléphant n’a que quarante côtes , le cheval
trente-fix, le blaireau trente, le chien vingt-fix, l’homme
vingt-quatre, &c. Cette différence dans la conftruétiort
de l’Unau & de l’A ï , fuppofe plus de diftance entre ces
deux efpèces qu’il n’y en a entre celle du chien & du
chat qui ont le même nombre de côtes, car les différences
extérieures ne font rien en comparaifon des
différences intérieures; celles-ci font, pour ainfi dire,
les caufes des autres qui n’en font que les effets. L ’intérieur
dans les êtres vivans eft le fond du deffein de la
Nature, c ’eft la forme conftituante , c ’eft la vraie figure ;
l’extérieur n’en eft que la furface ou même la draperie ;
car, combien n’avons-nous pas vu , dans l’examen comparé
que nous avons fait des animaux, que cet extérieur
fouvent très-différent, recouvre un intérieur parfaitement
femblabie ; & qu’au contraire Ja moindre différence
intérieure en produit de très-grandes à l ’extérieur, &
change même les habitudes naturelles, les facultés, les
attributs de l’animal ! combien n’y en a-t-il pas qui font
armés, couverts, ornés de parties excédantes, & qui
cependant pour l’organifation intérieure, reffemblent
en entier à d’autres qui en font dénués Mais ce n’eft
point ici le lieu de nous étendre fur ce fujet, qui, pour être
bien traité, fuppofe non - feulement une comparaifon
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