On voit par cette defcription que ie lamantin du
Sénégal ne diffère, pour ainfi dire, en rien de celui de
Cayenne; & par une comparaifon faite de la tête de ce
lamantin du Sénégal avec celle d’un foetusa de lamantin
de Cayenne, M. Daubenton préfume auffi qu’ils font de
même efpèce. Le témoignage des Voyageursb s’accorde
avec
* Nota. M. le chevalier Turgot, actuellement gouverneur de la
Guiane, & qui auparavant avoit fait don au Cabinet du Roi de ce
foetus de lamantin , eil maintenant bien à portée de cultiver fon goût
pour l’Hiftoire naturelle, & de nous enrichir non - feulement de fes
dons, mais de lès lumières.
b Oexmelin rapporte qu’il y a des lamantins fur les côtes de l'Afrique,
& qu’ils font plus communs fur la côte du Sénégal que dans la rivière
de Gambie. Hiß. des Avanturiers, tome ll,p. 11 y . — Le Guat affût e en
avoir vu beaucoup dans les mers del’îfe Rodrigue. La tête du lamantin
de cette île reffemble beaucoup ( dit ce Voyageur ) à celle du cochon ,
excepté qu’elle n’a pas le groin fi pointu. Les plus grands lamantins ont
environ vingt pieds de long........Cet animal a le fang chaud, la peau
noirâtre, fort rude & fort dure , avec quelques poils fi clair-femés
qu’on ne les aperçoit qu’à peine ; les yeux petits , & deux trous qu’il
ffrre & qu’il ouvre, que l’on peut avec raifon appeler fes oreilles';
comme il retire affez fouvent la langue, qui n’eft pas fort grande,
plufieurs out dit qu’il n’en avoit point ; il a des dents mâchelières---- -
mais il n’a point de dents de devant & fes gencives font affez dures
pour arracher & brouter l’herbe............ Je n’ai jamais vu qu’un petit
avec la femelle , & fai du penchant à croire qu’elle n’en produit qu’un
à la fois.. . . . Nous trouvions quelquefois mois ou quatre cents de ces
animaux enlêmble qui paifiôient l’herbe au fond de l’eau ; ils étoient
fi peu effarouchés que fouvent nous les tâtions pour çhoifir le plus
gras ; nous leur pallions une corde à la queue pour les tirer hors de
l ’eau; nopsne prenions pas les plus gros, parce qu’ils nous auroient
donné
avec notre opinion; celui de Dampier fur-tout eft
polïtif, & les obfervations qu’il a faites fur cet animal
méritent de trouver place ici. « Ce n’eft pas feulement
dans la rivière de Blewfieid, qui prend fon origine entre «
les rivières de Nicarague & de Verague, que j’ai vu «
des manates (lamantins); j ’en ai auffi vu dans la baie «
de Campèche, fur les côtes de Bocca del drago, & »
de Bocca del loro, dans la rivière de Darien & dans «
les petites îles méridionales de Cuba; j ’ai entendu dire «
qu’il s’en eft trouvé quelques-uns au nord de la«
Jamaïque, Si en grande quantité dans la rivière de «
Surinam, qui eft un pays fort bas ; j’en ai vu auffi à «
Mindanao, qui eft une des îles Philippines, Si fur la «
côte de la nouvelle Hollande............cet animal aime. «
l ’eau qui a un goût de fel, auffi fe tient-il communé- «
ment dans les rivières voifines de la mer, c ’eft peut-être «
pour cette raifon qu’on n’en voit point dans les mers du «
fud, où la côte eft généralement haute, l’eau profonde «
tout proche de terre, les vagues greffes, fi ce n’eft dans «
la baie de Panama, où cependant il n’y en a point ; mais «
les Indes occidentales étant, pour ainfi dire, une grande «
baie compofée de plufieurs petites, font ordinairement «
une terre baffe où les eaux qui font peu profondes, «
fourniffent une nourriture convenable au lamantin ; on «
donné trop de peines, & que d ’ailleurs leur chair n ’eft pas fi délicate
que celle des petits.............N ous n ’avons pas remarqué que cet animal
vienne jamais à terre, je doute qu’il p ût s’y traîner, & je ne crois pas
q u ’il (bit amphibie. Voyage de le Guat, tome I, pages y 3 &fuir.
Tome XIII. D d d