
Lucien a écrit un. petit Traité fur la Déejfe fyrienne ; il
peint la ftatue de fon temple à Hiérapolis (la même ville
qu’Hiéropolis ) comme une figure Panthée. Elle tenoit
un iêeptre d'une main , & de l’autre une quenouille. Sa
tête étoit couronnée de rayons & coiffée de tours, fur.
lefquelles flottoit un voile femblable à celui deVénus-
Célefte 5 elle étoit ornée de pierreries de diverfes couleurs
, entre lefquelles on admiroit celle qui étoit fur fa
tête , & dont le feu éclairoit- le temple pendant la nuit.
Enfin, de quelque côte qu’on la confidérât, elle fem-
bloit toujours vous regarder. A ces attributs déjà nombreux
, on voit encore ajoutés le foudre, le fiftre, le caducée
, le fouet avec le tympanum , deux lions, divers
animaux, les lignes du Zodiaque, & c ., fur une figure de
femme aflife, dontPirro Ligorio a fait un delïin confervé
dans la bibliothèque de la reine Chriftine. Il annonce
qu’il a fait ce deflin d’après une petite ftatue de bronze,
qui appartenoit à Virginio Corfini, comte d’Anguillara.
Bellori a écrit un petit Traité fur ce delïin ( Thefaur.
Antiq. grec. tom. V I I , pag. 4 2 6 ) , qui fe trouve à la
Planche V du tome 1er. de Montfaucon 5 mais la vue du
bonnet dont efî coiffée cette figure, & qui reffemble
exactement aux mitres des évêques catholiques-, la vue
du manteau dont elle eft revêtue, & qui reffemble exactement
aux chappes modernes des mêmes prêtres , m’a
fait douter de l’antiquité de ce moniiment, & m’ a empêché
de le placer dans ce Recueil.
ASTARTE : c’étoit la divinité des Sidoniens. Sancho-
niaton dit que les Phéniciens appeloient ainfi Vénus ; aufli
Aftartêfert-elle de type aux médailles de T yr, de Sidon, •
d’Aradus, de Béryte , à3Ælia Capitolina ( l’ancienne Jé-
rufalem) , &c. Elle y paroît debout, une corbeille fur
fa t ê te , vêtue d’une tunique courte, à longues manches,
pofant la main droite fur un trophée, tenant de la gauche
un: fceptre, terminé quelquefois fupérieurement par une
traverfe. Une Victoire, pofée fur un cippe, lui préfente
une couronne. On voit ici au n°. 2 , Pt. CCXLIV, ce
type des médailles de Sidon. Quelquefois Aftané paroît
aflife dans un char.
P ALM YRËNIENS. Ce peuple ifolé au milieu des fab
les, à une diftance à peu près égale de l’Euphrate &
de la Méditerranée , briJJa pendant quelques années;
mais Aurélien ayant vaincu la reiné Zénobie, détruifit
l’empire des Palmyréniens. On voit au Capitole deux
monumens qui préfentent .les Divinités de Palmyre. Le
remier eft ici defliné fous le n°. 3, PI. CCXLIV. Agli-
olus & Malachbelus, comme l ’apprend la double inf-
cription de ce marbre,.y paroiffent vêtus, le premier
comme le font encore les Orientaux, & le fécond comme
un Empereur armé, excepté lé croiffant, placé derrière
fes épaules. C e croiffant le fait reconnoitre pour le dieu
Lunus. Le premier eft le foleil 5 car on fait que les Pal-
myréniens rendoient un culte folennel à ces deux planètes,
& l’on admire encore, parmi les ruines de Palmyre,
celles du temple du Soleil. Sur l’autre marbre du
Capitole ( ibidem , pag. 87 ) , on voit d’abord le bufte
du Soleil avec la tête entourée de rayons 5 enfuite ce
même dieu vêtu à l’orientale, monté fur un char traîné
par des griffons, & couronné par la Viétoire.
MEN & LUNUS. J’ai dit ailleurs que Spartien feul
appelle Lunus le dieu Men ou le Mois perfonnifié par les
Afiatiques. Voici fous le «°. 1 , PI. C CX LV , fon portrait
pris d’une pierre gravée, publiée par Mariette
(PI. L IX ) . Un beau jeune homme, coiffé du bonnet
phrygien, vêtu d’une tunique liée avec une ceinture &
d’ un manteau, portant de longues chauffçs, tenant une
hafte ou lance fans fe r , & une pomme de pin, ayant un
croiffant placé derrière la tête. Cette figure fert de type
à plufieurs médailles d’Afie , fur lefquelles on lit le mot
mhn ou le mot mensis. Quelquefois Lunus y porte les
habits de femfne, car cette divinité étoit mâle & femelle.
Son culte étoit répandu dans l’ Allé mineure, dans la Syrie ,
& plus folennellement établi à Carrhes en Méfopotamie.
La Lune, chez les Indiens, eft une divinité tantôt mâle,
tantôt femelle.
CÉLESTE. Çapitolin ( in Pertinace) dit que les Carthaginois
adoroient la déeffe Célefte, & qu’ils la repré-
fentoient portée fur un lion. Gori a cru la reconnoitre fur
deux pierres gravées de la galerie de Florence (tom. / ,
tab. ç)6, nos. 7 & 9 ) : l’une préfente une femme coiffée
de tours, tenant le tympanum ou tambour de bafoue, &
aflife fur un lion 5 la même figure fur la fécondé eft aflife
entre deux lions. Ces deux figures rappellent C yb è le ,
& rien n’autorife à y reconnoître la déeffe d’ Afrique, à
moins que celle-ci ne fût repréfeatée avec les mêmes
attributs que la Grande-Mère.
MITHRA. Quoique les Perfes adoraffent le Soleil,fous
ce nom, & qu’ ils lui rendiffent un culte dans des caver-'
nés ( Luiïatius, in Statium ) , cependant , n’ayant aucun
monumenr.de Mithra qui foit perfe, j ’ai cru devoir placer
fon article entre les Divinités des Afiatiques & celles
des Européens. Les Romains dûrent la connoiffance de
ce culte aux Piratés ,de la Cilicie , que détruifit Pompée
( Plutarck. in Pompeio , I I I 3 pag. 445, Briani) , plus de
foixante ans avant la naiffance de Jéfus-Chrift.
Apologiftes de la religion chrétienne, Tertuliien (de
Pr&jcript. pag. 247, & adverf. Marc. pag. 439, edit. altéra
Rigaltii) & Juftin (Apoiog. 2, cap. 66 , & Dialog. cum
Trypk. cap. 7 0 , 78 ) comparent en toute occafîon le
chriftianifme au culte de Mithra. Mithra & le Chrift
naiffoient le même jour dans une caverne ou une étable :
l'un & l’autre régenéroient l’Univers par le fang d’un
agneau ou d’un taureau; ils mouroient à l’époque de la
renaiffance de la Lumière, comme ils étoient nés dans la
faifon des Ténèbres : tous deux enfin eurent dés initiations
fecrètss, des purifications, des baptêmes, des
confeffions même, &c. On retrouvera les bafes de ce
parallèle dans les tableaux dés myftères mithriaques, que
le tems a épargnes. Je donne ici au n°. 2 , PI. CCXLV,
celui de ces marbres qui préfente le plus grand nombre
de fymboles 5 il fut gravé en 1564 par Lafreri, qui l’ avoir
defliné à Rome chez Oétavien ZenO , près du théâtre de
Pompée & du champ de Flore; On le voit dans Mont-
faucon (tom. I 3 PI. CCXV3 n°, 4 ) . Voici l’ explication
qu'en a donnée M. Dupuis ( Origine de tous les cultes,
tom. I I I , pag, 43) .
; Le jeune homme qui tient un flambeau allumé & élevé,
fymbole du retour de la lumière , eft le Printems ; il eft
peint fous les traits de la jeuneffe, âge que l’on donnoit
a cette époque aux images du Soleil. Le vieillard qui
tient Je flambeau renverfé, fymbole desténèbres, repréfente
l’Automne pu la vieilleffe de l’année, de la Nature
& du Soleil. L’arbre couvert de fimples feuillages, auquel
eft attaché .le flambeau allumé, & l’ arbre couvert
de fruits, auquel eft attaché le flambeau renverfé, défi-
gnent la même ch’ofé. Les deux figures d’animaux ( le
taureau & le fcorpion ) attachées à ces arbres font empruntées
du Zodiaque, où elles répondoient au printems
.gr à l’automne, trois mille ans avant Père vulgaire; ce
qui prouve que ce bas-relief eft la copie d’ une peinture
très-ancienne. Miihra oüle Soleil du printems immole le
taureau , ligne dans lequel il a paffé. Le fang du taureau
•féconde la terre, & un chien le lèche ; mais le fcorpion,
ligne dans lequel fut tué Gfiris, ronge l'organe de la
•génération, & détruit la fécondité en ramenant l’automne.
Le lion , époque de la plus grande force du fo-
Jeil, le corbeau & le ferpent, placés.dans les deux fous
le lion, afliftent à ce facrifice; ils jouoiént un grand rôle
dans les initiations des Mithriaques. Le couronnement de
ce bas-relief précieux repréfente feptpyrees ou fept autels
chargés de feu x, qui font allumés en l'honneur des
fept planètes. Aux deux extrémités font placés, d’un
côté le Soleil conduifant un quadrige , dont les chevaux
regardent Tes diverfes parties du Monde ; & de l’autre
la Lune fur un char traîné par deux chevaux, qui paroiffent
fuccomber fous la fatigue. Je parlerai plus bas des
Egures entourées d’un ferpent.
Dans la Planche CCXV1I du tome Ier. , Montfaucon
a publié, fous le «*. 2 , une pierre gravée du Recueil de
Maffei , fur laquelle un des deux Génies qui tiennent
ordinairement les flambeaux répand fa femence fur la
terre pour la féconder ( Montfaucon n’a pas rendu cet
objet ) , comme fit Vulcain lorfqu’ïl donna nailfance à
Enchtonius , & Jupiter à Orion. Enfin , on yoyoit aufli
dans l’antre de Mithra une femme qui allaitoit un enfant.
Le culte -de Mithra fe répandit dans toute l’Europe.
Dans les Gaules même , on a trouvé à Saint-Andiol,
ville du Vivarais, un bas relief mithriaque ( Caylus, Rec.
d‘Antiq. I I I ) .
Les Chrétiens des premiers fiècles reprochoient fou-
vent aux Païens la monftruofité de leurs idoles , & fur-
tout des figures qui étoient adorées dans les antres de
Mithra ; mais ils ignoroient que ces figures étoient les
fymboles des phafes aftronomiques. On en voit ici une
des plus curieufes fous le n°. 1 , PI. CCXLV1 & CCXl VII.
Elle eft confervée dans le muféum Pio-Clémentin (tom.
I I , tav. xix ) , & défignée fous le nom de Mithra ou
vifage de lion.-Une tête de lion, figne où le Soleil eft
dans fa plus grande force , eft placée fur un corps humain
, qui a de grandes ailes. Un ferpent, fymbole de la
révolution de l'année, entoure la figure entière depuis
les .pieds, & fa tête furmonte celle de Mithra. Sur la
poitrine font gravés les lignes des équin.oxes , le Bélier
& la Balance ; & fur le haut des cuiffes, les lignes des
folftices,le Cancer & le Capricorne. Mithra eft pofé fur
le globe de la terre qu’ il féconde , & il tient dans chaque
main le débris d’ une torche, comme on peut le conjecturer
d’une figure analogue, publiée par Montfaucon
( Antiq. expliq. tom. 2, PI. CCXV3 n°. 2 ) . Dans la même
planche, une autre figure de Mithra tient deux clefs,
parce qu’il ouvre & ferme l’année.
CABIRES. Lés myftères célébrés à Samothrace (île
«tuée près de l’Hellefpont) , & qui eurent des ramifications
dans plufieurs villes de G rèce, d’Ionie & même
d’Italie , avoient pour but principal l’initiation au culte
des Cabires. Dans ces myftères on mettoit à mort un
Cabire , comme Bacchus mouroit dans les liens ; aufli
M. Dupuis ( Origine de tous Us cultes) a-t-il cru reconnaître
dans les deux Cabires, Bacchus & le Soleil. Ces
,®U)? apportés de Syrie, comme le prouvent quelques
médaillés, étoient représentés tantôt comme les Dipf-
cures, tantôt comme Vulcain, Dans le' dernier ca s, un
Cabire, vêtu d’ une tunique courte, portoit le bonnet qui
défigne les artilans fur les monumens, tenoit d’une main
un marteau à deux tête s, & de l ’autre des tenailles.
Quelquefois il eft monté fur un cheval, & il ne tient qu«
le marteau à deux têtes ( Gejfneri, tom. 1 3 tab. 24).
GERMAINS.'Nous n’ avons aucun monument qui repréfente
les Dieux des Germains. Les figures bizarres
que Samuel Groflèr a données dans fon Hiftoire de la
Luface ( Leipf. 1 7 1 4 ) , que Ton trouve dans les notes
fur les lettres de Tollius, & que Montfaucon a inférées
dans fon Antiquité expliquée (tom. 72, PI. C L X X X IV ) ,
paroiffent être le fruit d’ une imagination en délire.
De ITooge a defliné à plaifir un prétendu Hercules
Ma gu fa nus 3 qui a trompé Gargon & Keifsler (Antiq,
feptentr 'ton. )..
NEHALENNIA. Lés monumens découverts Tan 1646
-enZélande, fur les bords de la mer, près d’Oësbourg,
dans l’île de Walckeren , où cette divinité de la Germanie
feptentrionale eft repréfentée., font authentiques, &
les inïcrîptions qui les lui attribuent, font claires & nom-
breufes. Gruter a rapporté une infcription en l’honneur
de Nehalennia, trouvée dans une autre contrée ; Se en
Angleterre on en a découvert un 1 marbre-, fur lequel
le nom de la déeffe eft écrit en entier. Montfaucon
(tom. 11, PI. CXCIV) a publié plufieurs ck>s figures de
Nehalennia trouvées en Zélande. Toutes ont la tête couverte
d’une efpèce décoiffe, qui eft coupée en rond vers
la nuque ; elles fontvêtues d’une longue tunique à longues
& larges manches, & d’une efpèce de manteau qui couvre
la poitrine & les épaules comme un camail. Droites ou
aflifes, elles tiennent des fruits dans une coupe. Une
femblable coupe remplie de fruits & un chien font placés
à leurs côtés. Sur les faces des monumens qui préfentent
Nehalennia, font fculptés Neptune & Hercule. On en
voit un fous le n°. 3, PI. CCXL V. Le deflin paroît fait
avec peu de goût : on n’a pu ici que le copier fidellement.
La préfence de Neptune & le lieu où ces bas-reliefs ont
été trouvés, avoient fait croire que la déeffe préfidoit
1 à la navigation comme lfis ; mais les fruits font penfer
qu’elle étoit peut-être une des Déeffes mères , Diviuités
célèbres dans les "Gaules, la Grande-Bretagne , la Germanie
& l’Italie.
DÉESSES MÈRES. On a découvert dans plufieurs
contrées de l’Europe, mais particuliérement dans les
Gaules, des inferiptions gravées en 1 honneur desDéejfes
mères. Quelquefois des figures de femmes y font jointes ,
le plus fouvent au nombre de trois , comme dans le bas-
reltef trouvé à M etz, publié d’abord par Boiffard, en-
fuite par Montfaucon ( Supplém. tom. 1 , P l. L X X X V s
n°. 1 ) , & que l’on voit ici au n°. 2 , Pl. CCXLVI &
CCXLVII. Tantôt debout, tantôt aflifes , elles tiennent
des fruits, des pommes de pin, des patères, des cornes
d’abondance. Ce n’étoient pas proprement des Divinités
champêtres, car le bas-relief cité plus haut*avoit été
confâcré par les habitans du quartier de la Paix à Metz :
IN HONÔREM DOM OS D IV INÆ DIS M A IR A BU S V I -
cani v ic i pacis. D’ailleurs, on a trouvé des inferiptions
en l’honneur des Mères de Gabie, de Girone, &c.
GAULOIS. En creufant fous le choeur de l’églife cathédrale
de Paris, en 1711 , on trouva quatre efoèces
d’autel^, ornées, fur leurs quatre faces, de bas-reliefs grof