
veux coupés : d’ où Ton peut conclure que les Égyptiens
laiffoient croître la chevelure de leurs enfans. Lucien
{ Navig. n°. 3 , tom. I I I , 249) dit expreffément que les
enfans nobles , chez les Égyptiens , portoient jufqu’à la
puberté la chevelure longue.
L’épaiffeur & l’ampleur des coiffures des figures égyptiennes
font très-remarquables : on en fera moins étonné
fi l’on fe rappelle qu’ il eft encore d’ufage d’en porter de
très-épaiffes dans les pays chauds, où l’ardeur du foleil
cauferoit, fans ces précautions, des maux de tête incurables.
On confultera les planches relatives à la première
fe&ion du chapitre II pour voir un grand nombre de
coiffures portées par les Prêtres, par les Initiés, par les
guerriers & par des perfonnages civils, dans les fculp-
tures & les peintures des plus anciens monumens de
l’Égypte. J’en vais donner ici quelques-unes dont les détails
font exprimés plus diftinélément.
Le bulle au n°. 4 , Pl. CCC LX lX , eft tiré des Recueils
a Antiquités de Caylus ( IV , PL I ) , qui croit le recon-
noltre pour un Prêtre, peut-être à caufe de la fimplicité
de fon Donnet. Cette opinion eft auffi facile à combattre
qu’ à foutenir. Au relie, on remarquera fon collier & fa
barbe poftiche. Le même Recueil ( / , P L I ) a fourni le
n°. y , PL CCCLXIJl ; le «°. 6 3 PL CCC LX lX ( I ,
P L IP ) 5 & le n°. 7 , P L C C C LX lX ( I I 3 PL IV ) . Le
fragment du n°. 8 , PL C C C LX lX , eft de brèche jaunâtre
j il eft placé dans le Muféum Pio-CIémentin. On le
voit à la fin du chapitre II du livre II de YHifioire de
l'Art de Winckelmann, traduite en français par Janfen.
La tête, deffinée exaélement, préfente les traits des
figures égyptiennes les plus anciennes. La tête du n°. 9 ,
P l . : C C C LX lX , eft gravée fur un camée delà galerie
de Florence ( / , 27, 7 ) . Gori croit y reconnoître une
figure égyptienne : dans ce ca s , elle ne pourroit appartenir
qu’ a un perfonnage de la famille des Lagides.
Chaussures. On a pu remarquer la chaulfure que
portent les Prêtres dans les planches du chapitre I I , &
quelques guerriers dans celles du chapitre III. « C ’eft
une femelle ( Denon, page xxxviij ) avec un fimple quartier,
au bout duquel eft attaché un arc qui pane fur le
toudepied. Le devant de la femelle eft fixé au bout par:
un fécond arc qui part du fommet de celui qui pafle fur
le coudepied, & , par un cintre élevé, vient aboutir entre
le pouce & le premier doigt, à la nailfance de l’ un &
de l’autre. »
Habillemens du torse. Hérodote dit ( I I , p. 110:
Wejfeting) : ce En Égypte les hommes portent deux v ê-
temens, & les femmes un feul. Leurs vêtemens font de
lin , toujours lavés avec un grand foin......( ibid. p. 141 ).
Ils ont des tuniques de lin, ornées de franges fur les jambes
: on les appelle des calafiris. Ils jettent fur ces tuniques
des .draperies blanches de laine, qu’ils ne portent
Îioint dans les temples, & qu’ il feroit mefféant dé les
eur laiffer en les enfeveliffant. » L’habitant du Darfour,
conducteur de caravane, porte un manteau femblable,
qu’il jette de même. Par le mot vutôicts (ordinairement
tunique ) , Hérodote défigne peut-être cette efpèce de
ju pe, plus ou moins longue , que portent le plus fou-
vent les Égyptiens fur les plus anciens monumens, &
que l’on verra bientôt.
Dans les carrières de Silfilis ( entre Apollinopolis
magna, ou Edfu & Ombi ) font creufés plusieurs tombeaux.
« On voit auprès de ces tombeaux des figures de
” grandeur naturelle, fculptées dans la maffe du rocher,
» mais à peine ébauchées. J’en montre ici (Denon,
PL L X X V I j «°. 2 ) une de chaque fexe, parce qu’ il
> eft vraifemblable qu’elles repréfentent les perfonnA
» enterrées & leurs coftumes. Ce font probablement de»
■a premiers Égyptiens. 33 N°. 10, Pl. CCCLXlX.
L e n 0. 1 1 , PL C C C L X lX , préfente une figure qni
eft fculptée fur le mur de l’efcalier intérieur qui monte
au comble du temple de Tentyra ( Denon , Pl. CXXI
n°. 6 ). ce Elle eft, dit M. Denon, en a été d'adoration
Elle peut donner une idée du coftume civil : une calotte]
jufte remplace les cheveux ; les bras & le corps nus 011
couverts d’une chemifette jufte, par-deffus laquelle deux
bretelles portent un vêtement croifé, rayé & brodé]
une ceinture en métal cifelé ou en broderie en relief!
dans laquelle paffe un poignard dont le fourreau eft dé.
coré comme la ceinture, & un feul bracelet à l’avant,
droit. >3 Souvent cette efpèce de ju pe, qui defeend juf.
qu’à mi-jambe, eft remplacée, dans les figures égyp.
tiennes, par une jupe plus courte ou ceinture qui ne def-
cend qu’aux trois quarts des ciiiffes , & qui paroît être
croifée entre les cuiffes. Seroit-ce le x.o<ra-ùp^ ou
So? dont parle Hefickius, & qu’ il dit être la ceinture des
Égyptiens, 'Aiyùrftw ? On le voit ici au «Q. M
PL CCCLXlX. Cette figure eft tirée des Recueils d'An.r
tiquités de Caylus (F/, P L V I I I ) f !
Les tombeaux de Silfilis nous ont préfenté une Egyp.
tienne' qui n’avoit pour habillement que l’ample coiffure
ordinaire, & une ceinture allez étroite. On voit
ici trois figures d’Égyptiennes : n°. 13, P l. CCCLXlX,
n°. 1 , PL CCCLXX, & n°. 2 , P L CCCLXX; elles pourront
fervir de modèles. La première, tirée des Monum,
ant. de Winckelmann ( n°. 18 2) , paroît être une efclave
ou une femme de la dernière claffe. La fécondé ( ilil
n°. 75 ) eft vêtue avec plus de recherche. La troifième
, enfin, qui eft un petit bronze de la Colledlion d’Her-
culanum ( Bronfii, I I , pag. 99 ), repréfentant Ifis avec les
attributs de la Fortune, le gouvernail & la corne d’abondance.
Je donne un fécond deffin de cette figure au
n ° . 3, PL C C C L X X , afin que l’ on puiffefuivre tousles
détails de fon coftume. Une tunique longue, un petit
manteau à bords découpés, dont les deux bouts fupé-
rieurs, paffant fur les épaules, font noués fur la poitrine
avec les deux inférieurs, qui remontent fous les bras;
fur tout cela une ample draperie qui, defeendant des
ép a u le s ,’enveloppe la partie inférieure du corps, ü
chaulfure laiffe les doigts découverts. Un fimble bandeau
lie les cheveux.
Rois d'Egypte. Nous fournies très-peu inftruits des details
de leur coftume : on les trouvera en examinant les
figures des guerriers qui font delfinés dans la feclion
précédente: ce-font des triomphateurs, probablement
des Rois. On fait en général que ceux-ci étoient vêtus a
peu près comme les Prêtres ( Sine fi. de Provid. lie. h
pag. 110)5 que leur manteau étoit de pourpre (Jofiphi,
Ant. judaic. I l ; Oneirocr. cap. 48 ) 5 qu’ ils portoient un
feeptré travaillé fous la forme d’une charrue ( Dtod lm
§. 3 ) , c’ eft-à-dire, d’une charrue fimple, telle qu’onla
verra dans le livre des Meubles & des Instrument
C ’eft un A , dont un jambage eft prolongé en forme “e
long bâton. Les Rois d’ Égypte portoient à la guerre un
cafque d’airain. La cuiralïe au roi Amafis étoit faite ave
untilfu de lin ( Herodot. II, cap. 12 ), dont chaque bn
étoit compofé de trois cent foixante fils, nombre ega
celui des jours de l’année égyptienne , moins lescl|j>
épagomenes ou jours ajoutés, probablement a cauie
quelqu’ idée religieufe. . 1|t
Les Rois macédoniens & leurs fucceffeurs^ pnren
coftume plus rapproché de celui des Rois d’Europe
. p-rfe Flonu mËÊ$M Éü ■ qu Antoine porta le
ï'fturne'des Rois d'Egypte pour plaire a Cléopâtre,
l e ne de ce pays : un feeprre d or, un cimeterre fufpendu
I fon côté, un habillement de pourpre enrichi de-pierres
îicieufes d’une grandeur extraordinaire, & un diademe.
B Etoffes & tijfius des Egyptiens. J’ ai déjà dit au com-
Inencement du livre des Costumes c iv il s , qu’ils fe
J voient de vêtemens faits de coton, ou de lin ou de
laine & qu’ils les ornoient fouvent de franges & de
bordures découpées. Nous ne favions rien fur le travail.
ye ces tilfus : feulement Claudien (in Eutrpp. lib. i ,
Mfir 2CO) avoit parlé des toiles peintes à Alexandrie ,
Iles figures & des ornemens bizarres (appelés aujourd
’hui fi improprement arabefiques ) dont elles étoient couvertes.
L’expedition d’Egypte nous a procuré de grandes
lumières fur cet objet curieux.
I « Le corps d’une momie trouvée à Thèbe s, dit
M. Denon (pag- xxx) , étoit couvert d’une tunique d’un
ïiliii lâche, & compofé d’ un fil exceffivement fin : le fil
I faire la dentelle n’ ell pas plus délié. Plus mince qu’un
ftheveu, il eft retors & compofé de deux brins ; ce qui
fuppofe, ou une adrelfe infinie dans la filature à la main,
ou des machines très-perfeélionnées.....Dans ce qui comp
o f o i t les differentes enveloppes, il y avoit des toiles
fl'efpèces abfolument differentes. Outre le tiffu lâche &
p m p l e , il y avoit un coutil dont les bords étoient terminés
par une bordure précieufement faite 5 une autre
e f p è c e de toile ouvrée , eompofée de deux brins très-
r e t o r s pour la trame comme pour la couverte , rayée à
b a n d e s , d e fix pouces en fix pouces, par de gros brins
compofés de faifceaux de même fil, tel que cela fe pratique
encore dans l’Orient. On trouve toutes ces toiles
déchirées ou raccommodées avec des reprifes a f l é z mal-
â d r o i t e m e n t faites 5 ce qui indiqueroit que tout le vieux
linge étoit employé à enfevelir les morts, car on ne peut
i m a g i n e r que la toile fut rare, à l’abus qu’ on en faifoit
pour les embaumemens. >
: 35 Autour des reins de cette momie étoit placée la.
■ ceinture ( PL.XÇVIII, n°. 29) du n°. 4 , Pl. CCCLXX,
ftompofée de petits, tubes d’ émail, femblables à ceux qui
fe font encore à Venife à la manufacture de Murano. Le
-|éfeau qui les enfiloit, étoit treffé en lofange, & avoit
un petit grain rond de même matière à chaque croife-
Éient. Une bande de même tiffu, & qui defeendoit par-
devant, étoit terminée par huit gros grains de même
patière, formant huit glands avec leur frange..... Le
U CCCLXX,eû\m lange de momie (PL cX X X lX ,
n° - 18) en toile brodée, & d’une broderie du même ftyle
fP® celle adoptée tout récemment par nos brodeurs,
ffielt-a-dire, en emportant alternativement, tantôt partie
de la couverte, & tantôt partie de la trame. Les bouts
des fils coupés font crochetés , & tout ce qui eft enlevé,
eft remplacé par un tiffu paffé à l’aiguille 5 de forte que
la broderie remplace le tiffu emporté, & a le triple avantage
de n’avoir point d’envers, d’être fans épaiffeur, &
paroitre par conféquent un broché double. Dans ce morceau
la broderie eft en laine filée très-fine, teinte de
couleurs tellement folides,1 que , malgré l’impreflion de
la couleur corrofive de l’embaumement & le laps d’au
moins quarante fiècles, les couleurs en font encore très-
vives : il y a du vert, du jaune, du rouge & de l’orangé.
Le fragment eft affez grand pour y diftinguer un fond
uni, trois bandes ouvrées dans le même tiffu, & la bordure
brodée. On peut.remarquer dans la forme des fleurs
le même goût de deffin qui exifte encore dans les.bor-:
dures des fchalls de l’Inde. Le n°. 6 , PL CCCLXX, eft
une bordure brochée en laine (Pl. C X X X lX , n°: i j ) ,
eompofée dans le meilleur goût, sj r
Couleurs des Egyptiens. « Les feules couleurs que j’aie
vues employées, dit M. Denon ,(p*g. xlv), dans les peintures
les plus recherchées des Égyptiens, dans les tombeaux
des Rois & fur les hiéroglyphes fculptés, font la
couleur bleue reffemblant à celle de l’azur, le rouge-
brun , du jaune couleur de graine d’ Avignon, & un vert
trifte. 33
Momies. On a cru long-tems,que l’ufage d’embaumei?
les morts avoit ceffé, chez les Égyptiens, après la conquête
de Cambyfe 5 mais Hérodote, qui voyagea en
Égypte un fiècle après la mort de ce Roi ( I I , cap. 86 ) ,
Dioaore de Sicile, qui fit ce voyage fous Augufte ( I ,
§. 91 ) , Lucien, qui écrivit un fiècle après ( Necyom.
n°. 1 y ) , en parlent comme d’un ufage qui fubfiftoit de
leur tems. On lit dans la V ie de faint Antoine abbé, qui
mourut l’ an 357 , que de fon tems on enveloppoit de
toiles les corps des hommes pieux, & ceux des martyrs
en particulier, pour les conCerver dans les maifons des
fidèles ( Vit. SS. I, pars 2 , pag. 689 ) , comme le faifoient
les Païens. Xénophon-Ie*Jeune, qui ecrivoit probablement
dans le même fièclé, dit dans les Ephéfia.ques (Ub. y ,
alinea 3 ) , qu’Ægialeus, pêcheur, de Sicile, fit voir à
Abrocome le cadavre de Thelxinpë fon ancienne mai»
treffe , embaumé a la maniéré des Egyptiens. Enfin , faint
Auguftin, qui vivoit dans le commencement du cinquième
fiècle, écrivoit (Serm. 361, Oper. V , pag. 981)
que l’ on n’avoit jamais fait, en Égypte, plus de petites
momies que de fon tems 5 & ailleurs (Serm. 120, c. 12 ),
que « les Égyptiens feuls croient à la réfurreélion, puif»
33 qu’ils prennent un grand foin des corps des morts,
33 qu’ ils les deflèchent, les rendent auffi durs que l ai-
» rain, & qu’alors ils les appellent gabbar4. »3
M m 1