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MUGÎIT.OIDES
LES MUGES. (MUCH).
1. Mugil japonicus, PI. LXXIt, fig. 1. Le Japon ne nous a fourni que deux
espèces de Muges. L'une de ces espèces parait représenter dans les mers du Japon
le Muge à large téte, Mugil cephalus^ de la Méditerranée; elle offre aussi beaucoup
d'analogie avec deux espèces de la mer des Indes, savoir les Mugil cephalotus
et borbonicus, Cuvier et Valenciennes. Elle a le corps aussi élevé que cette dernière
espèce, et lui ressemble encore, ainsi qu'au Mugil cephalotus, par sa tète plus
étroite et sa mâchoire inférieure moins prolongée que dans le Mugil cephalus; mais
elle diffère de ces trois espèces par des modifications de teinte, en ce qu'elle n'a
pas la base de la pectorale ornée d'une bande foncée comme les Mugil cephalus et
cephalotus, et que sa caudale n'est pas bordée de noir comme dans le Mugil borbonicus;
aussi ses teintes tirent-elles sur le bleu et non pas sur le vert comme dans
cette dernière espèce.
Le Muge du Japon a les formes un peu plus ramassées que le Mugil cephalus. La
hauteur du corps est un peu plus considérable que la longueur de la téte, et entre
quatre fois et trois quarts dans la longueur totale du poisson. Les yeux sont, comme
dans le M. cephalus, entourés d'un voile adipeux et les narines sont aussi distantes
que dans cette espèce; celle du Japon a au contraire la téte un peu moins large
par devant et la mâchoire supérieure dépasse davantage l'inférieure. Le sous-orbitaire
offre la forme d'une lame à bords parallèles et un peu obliquement tronquée
par derrière. Cet os cache complètement le maxillaire supérieur, lorsque la bouche
est fermée. La mâchoire inférieure est mince et son bord forme une courbure assez
douce. Les deux mâchoires sont armées, comme dans le M. cephalus, d'une rangée
de dents très-fines, mais on n'en voit ni au yomer, ni au palais. Les écailles sont
comme dans le M. cephalus striées près de leur base et pourvues chacune à leur
partie visible d'une carène peu sensible; on voit également, dans le muge du .Japon,
une écaille allongée en pointe au dessus des pectorales, entre les ventrales et dans
l'aiselle de ces nageoires. La ligne latérale manque complètement comme dans les
autres muges. Les autres parties, comparées à celles du Mugil cephalus, ne présentent
rien de particulier, si ce n'est que les pectorales et les ventrales sont un peu
plus allongées en pointe. D. 4 et 1+8; A. 3 + 8; V. 1 + 5 ; C. 16; P. 17.
Les couleurs du Muge du Japon sont moins vives et moins variées que celle du
Mugil céphalus. Les parties inférieures sont d'un blanc i reflets argentés, teinte qui
passe au bleu grisâtre sur les parties supérieures de la téte et du corps. Le corps
est orné d'autant de raies longitudinales qu'il y a de rangées d'écaillés, et ces raies
d'un noirâtre très-pâle sont plus distinctes sur les flancs que sur le ventre et le dos.
Les dorsales et l'anale sont d'un bleu grisâtre très-pâle, nuancé de noirâtre vers le
bord postérieur de la caudale. L'anale est plus pâle encore; les ventrales sont d'un
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blanc sale; les membranes des pectorales sont grisâtres et leurs rayons tirent sur le
noirâtre. On voit autour de l'oeil une légère teinte d'un vert bleuâtre, mais l'iris
de l'oeil est argenté. Les lèvres enfin sont d'un brun jaunâtre très-pâle.
Bora est le nom que porte cette espèce au Japon. Elle y est très-commune dans
certaines saisons, comme au printemps et à l'automne, oii l'on en prend au moyen de
filets des centaines à la fois, notamment près du Cap Nomo ou à l'entrée des baies de
Nagasaki et Simabara. En salant et en séchant ensuite au soleil les oeufs de ces
poissons, on en prépare une espèce de caviar, très-recherché au Japon et qui forme
une branche considérable du commerce intérieur de cet empire. Ce poisson atteint
le plus souvent une taille de dix-huit à vingt pouces. Nous en avons reçu une série
complète d'individus de tout âge, mais malheureusement ils sont tous empaillés et leur
état de conservation laisse beaucoup à désirer.
2. Mugil haematocheilus. Pl. LXXIl, fig. 2. La deuxième espèce de Muge
du Japon parait y représenter le muge sauteur, Mugil saliens, des mers d'Europe; du
moins elle se rapproche de cette dernière espèce par sa téte étroite, ainsi que par la
configuration de son sous-orbitaire et des maxillaires. Elle s'en éloigne au contraire
par ses formes moins allongées, par son profil plus conique, par ses écailles plus petites,
ainsi que par des modifications assez sensibles dans les nuances et la distribution
des teintes.
La hauteur du corps entre environ quatre fois et demie dans la longueur totale du
poisson; la téte y est à-peu-près cinq fois. La distance comprise entre les orifices
des narines n'occupe que le tiers du diamètre de l'oeil. Cet organe ne parait pas
être entouré d'une masse adipeuse à l'état frais. L'entre-deux des yeux est au diamètre
de ces organes comme un et demi à un. Le museau, vu en dessus, est presque
d'égale largeur dans toute son étendue, mais vu de côté, il oiTre une forme conique;
il est un peu bombé en dessus. Le sous-orbitaire est de largeur moyenne et
pourvu, vers le bas de sa moitié postérieure, d'une échancrure assez profonde, à laquelle
répond la courbure du bout postérieur du maxillaire supérieur; ce sous-orbitaire
est finement dentelé à ses bords inférieur et postérieur. On remarque sur la partie
visible de chaque écaille une carène assez sensible. Les nageoires et les autres parties
ne présentent rien de particulier, si ce n'est que la caudale est baucoup moins
échancrée que dans l'espèce précédente.
Ce Muge offre à l'état frais des teintes peu variées et peu vives. La couleur dominante
est un vert pâle, terne, tirant un peu sur l'olivâtre et passant sur les parties
inférieures au blanc argenté. La caudale offre vers sa base une légère teinte d'un
blanc grisâtre, et les ventrales tirent un peu sur le brun rougeâtre. L'iris de l'oeil
est d'un blanc nuancé de jaunâtre. Les lèvres sont couleur de pourpre sale.
Ce Muge ne parvient jamais à une taille aussi forte que l'espèce précédente. Mr.
Bürger nous mande que la plupart des individus examinés par lui, n'excédaient guère
cinq pouces en longueur. Nous en avons cependant dont la longueur totale est de
onze pouces. Son nom japonais est Sikouts. Il est beaucoup plus rare au Japon
que le précédent, on ne le prend qu'en petite quantité, le plus souvent seulement
en été et lors des temps pluvieux, dans les petites rivières dans le voisinage de
Nagasaki.