se croire an milieu d’une ville : d’innombrables petites maisons carrées, en
• maçonnerie, étaient très-rapproche'es dans de certaines places, plus clair-se-
mées dans d’autres, 'toutes sont à un seul étage, et recouvrent l’orifice des
divers puits de mine ; les unes très-petites, ne sont destinées qu’à abriter
cette ouverture et les outils d’exploitation, les autres contiennent plusieurs
pièces et servent d ’habitation. Le terrain environnant, partout retourne', est
remue', couvert de chardons et des touffes de la Nepeta nepelella. La mine dite
de Berja est une des plus conside'rables. Une lettre que j ’apportais au capataz
ou surveillant m’y fit bien accueillir. Il n’avait alors^sous ses ordres que
trois ou quatre hommes pour garder les outils et le peu de minerai, exploité
qui restait encore dans les galeries. Tous ces gens-là passaient la journée
dans la plus complète oisiveté, les employés des minés voisines venaient les
voir, ils jouaient aux cartes, chantaient, dansaient le fandango avec d’horribles
gitanas qui venaient des villages voisins, tandis que l’un d’entre eux,
comme un véritable amateur ou aficionado, pinçait de la guitare des heures
entières, les yeux à demi fermés et répétant sans cesse, dans sa rêverie,
de monotones refrains. Je les vis aussi s’exercer à un jeu qui consiste à
lancer une énorme barre de fer aussi loin que possible, en s’aidant par
un balancement circulaire du corps : on est étonné de l’adresse que déploient
dans cet exercice des hommes faibles en apparence. Mon domestique,
Suisse robuste., aux muscles développés, n’y réussissait pas à beaucoup près
aussi bien qu’eux. Je n’eus que trop le loisir d’examiner tout cela, une
indisposition me retint à cet endroit trois jours entiers que je passai d’une
manière fort désagréable, glace' dans l’intérieur de l’habitation par le froid
qui venait de l’ouverture du puits, et brûlé, lorsque je voulais m’asseoir en
dehors, par les rayons d ’un soleil d’août qui y est ardent, malgré l’élévation
du site, et contre lequel il n’y a pas le moindre abri.
Rien de si singulier que l ’intérieur d’une de ces mines : on voit que l’art y est
à son enfance, ce sont des couloirs qui montent ou descendent au hasard,
tantôt s’élargissant en voûtes, tantôt se rétrécissant au point qu’il faut y
ramper sur le ventre et que souvent plus d’une centaine de mineurs sont
obligés de faire la chaîne pour se passer le minerai qu’on ne pourrait extraire
autrement. La direction et la grandeur des galeries n’est absolument déterminée
que par celles du filon que l ’on suit; l ’on prétend que cette méthode
est seule lucrative, et que des compagnies qui ont fait venir des ingénieurs
d’Allemagne, et ont voulu, exploiter plus scientifiquement, se sont ruinées.
Il n’en est pas moins vrai que si la mesquinerie de ces travaux diminue les
dépenses, elle doit d’un autre côté les augmenter, par le nombre des ouvriers
qu’un semblable mode réclame. La galène est extrêmement abondante,
surtout dans cette partie de la montagne, ou elle forme quelquefois d’énormes
noyaux au milieu de la roche calcaire, ailleurs elle est tellement mêlée au roc,
qu’il faut la casser en morceaux qu’on trie ensuite ; les ouvriers qui sont chargés
de cette opération ou de celle qui consisté à garbillar, c’est-à-dire à cribler et
à laver des sables et débris métallifères, . sont payés jusqu’à raison de vingt
réaux par jour, mais a seco, sans nourriture. Le grand nombre ne reçoit que
4 à 6 réaux ; mais on les nourrit de sopa ou de gaspacho matin et soir, et
d’un guisado de fèves ou de haricots à midi avec du pain à discrétion. Chaque
exploitation entretient un domestique, cocinero, chargé de préparer les repas.
Tout le minerai descend à Berja, puis à Adra où sont les usines, là on le fond
en lingots, et il rend de 6o à 70 pour 100 de métal pur.
A l ’orient du plateau où sont situées les mines, la montagne se relèye encore
pour former plusieurs monticules ou lomas aux formes arrondies et qui
atteignent 7000 pieds de hauteur, puis elle v ! s’abaissant lentement et
pousse ses pentes allongées jusqu’aux environs d’Alméria. La vue du point
culminant est remarquable, elle embrasse toute la lisière maritime depuis la
Sierra Tejeda, qui paraît au loin comme un nuage, jusqu’au cap de Gates,
on y a de l’autre côté tout le développement du revers sud de la Sierra Nevada
et des vallées qui en descendent; à partir du port de Vacares cette chaîne ne
présente plus d’escarpements, mais une suite de sommités arrondies : sa hauteur
bien diminuée ne permet à la neige de séjourner sur aucun point, et on
la voit enfin mourir à la vallée du Rio d’Alméria passage naturel qui sépare la
fin de la Nevada de lastérile Sierra de Filabres, et par lequel on peut se
rendre, sans passer aucune montagne , des bords de la mer dans les plateaux
de Baza el Guadix. Les points culminants de la Sierra de Gador étaient
ornés des tapis argentés et couverts de fleurs roses que forme le Pterocephalus
spathulatus, là croissaient aussi Prunus prostrata, Fhamnus pumilus, Buplevrum
spinosum, Bimias spinosa, Genista Lusitanica, Cirsium gregarium, Erodium
trichomanefolium et quantité d’autres belles espèces. Les champs de seigle
épars dans les enfoncements abrités du plateau, me fournirent aussi le Car-
duncellus Hispanicm, joli chardon aux fleurs bleues; mais à tout prendre, la
saison était déjà trop avancée pour une montagne aussi sèche et aussi exposée
au midi. A l ’endroit où la plaine supérieure se termine et confine aux pentes
méridionales, sont diverses bandes de rochers calcaires avec des éboulis et des
terrasses dans des expositions très-variées.. Ce bord du plateau doit être un