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quelques cavernes dont les parois étaient couvertes d’Uthbilicus pendulinus et
d’Acrostichum lamginosum. ,
L e jour suivant je sortis par lu porte de. terre" pour explorer le versant
oriental de la montagne où je n’avais pu pénétrer jusqu’alors. La portion de
la langue de sable qui fait partie du territoire anglais est couverte de jardins:assez
fertiles, malgré l’aridité naturelle du sol et qu’on arrose au moyen de puits
ptofonds où l’eau de la mer arrive purifiée. Le pied du rocher.était tapissé
d’une foule de belles plantes parmi lesquelles je découvris de grosses touffes
de l’élégante Statice emarginata qui commençait à fleurir, mais croig«mt malheureusement
hors de portée. Je pus cependant en recueillir q u e l le s échantillons
en grimpant à une vingtaine de pieds, à la grande alarme d’un factionnaire
qui accourut en s’imaginant que j ’allais prendre la forteresse d’assaut et ne fut
rassuré sur mes intentions qu’à la vue de ma passe.' Plus loin je ne trouvai
qu’un étroit sentier au pied des éboulements contre lesquels la mer,
beaucoup plus agitée que du côté du golfe, venait battre avec fureur. Cette
partie de Gibraltar Stant complètement isolée de l ’autre par des escarpements,
n’est!: point comprise dans le système de défense, et fi suffirait de rouler
des pierres du haut de la montagne pour en chasser les'assaillants; on y
trouve un très-petit hameau habité par des pêcheurs et où stationne un jposte
chargé d’empêcher qu’on y débarque. Ce versant est incontestablement le
plus intéressant sous le rapport botanique, e t j e regrettai de n’y ^pouvoir
faire qu’une seule excursion que les anfractuosités et la difficulté du terrain
rendaient fort insuffisante. Sur les pentes sablonneuses je tftuÿaj.. en particulier
YOnonis Gibrallaricà, espèce nouvelle qui y était tfès-abôndante et dont
les fleurs jaunes parfumaient l’air, Brassica sabularia, Linaria longepedunculata
et muïtipunctata, Caucalis maritima et plusieurs Daucus. Le long des rochers
la végétation était aussi d’un grand intérêt, mais la plupart des plantes croissaient
à une trop grande hauteur sur des corniches étroites où il était dangereux
de se hasarder. Je ne pus me procurer entr’autres qu’un seul échantillon
du SileneGibraltarica dont je voyais-dé grosses, touffes au-dessus de
ma tête. Je retrouvai là Calendula marginata, Stachys circimata, Helichrysum
rupestre avec YEphedra altissima, Achyrantkes argentea, Succowia Balearica et
l ’élégante lberis Gibraltarica dont les fleurs étaient/déjà passées. Par la richesse
de la récolte que je fis en peu d’instants 4 je pus juger de l’intérêt
qu’offrirait une exploration complète de Gibraltar, de ce côté-ci surtout, et
en le visitant à des époques différentes. Je suis étonné qu’un travail semblable
n’ait pas été déjà éiîff épris par quelqu’un des officiers de la garnison.
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Le service de là place se. fait avec beaucoup de sévérité à Gibraltar. Au
premier coup dë canon, une heure avant le coucher du soleil, la porte de terre
se Jerme ponriie plus s’omvrir ; bientôt après on fermé aussi celle du port et
celle qui mène à la pointe d’Europe. A partir du soir, personne ne peut plus
circuler dans les rués sans être porteur d’une [permission et d’une lanterne qui
sert à la faire lire aux factionnaires. J’ignorais cette règle, et revenant fort tard
d’un bal que donnait le gouverneur, je fus arrêté par une sentinelle qui ne se
rendait pas à mesÿexplications; je me voyaisisur le point de passer la nuit au
corps-de-garde, lorsque le mot de foreign officier que je m’avisai de lâcher, me
tira heureusement d’affaire, r
Lorsqù’o||r,éfléehit aux frais énormes que Gibraltar cause aux Anglais, on
se’ demande quels sont lesjavantagès qui peuvent les compenser. Ce n’est pas
léfcommerçe de contrebande, quoiqu’il ait quelque importance; comme abri
jpour les floité|j;c'e point offre encore peu de restturces :: il n’y a qu’une rade
peu sure et où lés vaisseaux, même de haut bord, sont en danger par les coups
de vent qui se font sentir dans le détroit; mais comme place,d’armes, Gibraltar
est d’une,'haute utilité et le Sera toujours davantage, maintenant que
les ^grands intérêts politiques’ semblent se ÔDnjoenlrer dans le bassin de la
Méditerranée. C’est un % s anneaux fie cette chaîne que l’Angleterre cherché
à établir entre elle et sels établissements de l ’Inde et le long de laquelle
elle a déjà créé un vaste système de communication.
Je ne m’arrêtai, pas plus longtemps dans cette oasis1 civilisée où je me
reposais des fatigues «et dëÿ privations d’un voyage pénible. J’aurais pu
me rendre. à Malaga dans l’espace d’une seule- nuit, par le bateau à vapeur,
mais je repoussai héroïquement cette tentation et me déterminai à
prendre la toute de-terre où je voulais,, visiter de nouveau plusieurs points,
entre autres la Sierra Bermeja. Parti le. 5 juin au matin, J e retrouvai à
à la Lina mon honnête Antonio, que j ’avais laissé là avec son mulet pendant
mon voyage à lajdpftereSse, et nous nous acheminâmes du côté d’E*r
tepopa. J’ai rarement fait une route aussi désagréable : il faut presque constamment
traverser les sables maritimes, et l’on ne saurait se figurer à quel
point un tel terrain est fatigant par une brûlante journée d’été. La seule
ressource est de suivre d’aussi près que possible le bord de la mér où le sable
est mouillé, et ..Où l’on enfonce moins profondément. Assez; près de San Roque,
je rencontrai le Genista Gibraltarica croissant en buissons sur les collines.
Plus loin, vers la Torre Carbonera, au milieu cfe dunes formées par un
sable fin ,et ondulé, j ’observai l’Helianthemum libanotis aux pétales jaunes et