
1 2 2
peuvent remonter jusqu’à plus de 8000 pieds dans les expositions abritées.
Rentre' au Prado de la Yegua après trois jours d’absence, je descendis
le lendemain à San Geromino, puis après avoir achevé' la dessication de
mes plantes et fait Une seconde course à Trevenque, je m’acheminai vers
Grenade. Le sentier suit d’abord la direction du Monachil pendant une
heure, puis la rivière se resserrant entre des précipices, il faut prendre à
droite et gagner un plateau argileux appelle' Pulche et situe' droit au-dessous
des rochers de Dornajo; je fis là dans les jachères une ample re'colte
de Linaria lanigera en pleine fleur. De cet endroit à Grenade, il y a près
de trois lieues d’une descente douce au travers de collines de gravier et
d’argile; la vue est splendide, on a continuellement le Yega devant soi et
à gauche, tandis qu’à droite l’oeil plonge en plein dans la valle'e du Xenil,
mais le terrain, coupe' par des ravines pluviales, est ste'rile. La ve'ge'tation très
monotone se compose d'Artemisias non fleuries, Teucriim pseudohyssopus,
Thymus tenuifolius, Helichrysum serotinum, Eryngium campestre, Putoria Ca-
labrica, Rosmarinus ofjicinalis, Carlina corymbosa et quelques autres. A
demi-heure de la ville, nous atteignîmes les jardins d’oliviers entoure's de
murailles, et quelques moments après, je rentrai à Grenade retrouvant avec
joie les douceurs de la vie civilise'e après une excursion de seize jours
dans la montagne.
CHAPITRE XII.
Ascension au Mulahacen et excursion dans l’Alpivjarra.
A la fin de ce mois on célébra à Grenade la fête de la constitution :
l ’aspect de la ville pendant trois jours fut brillant et très-anime'. Un soir
entre autres toute la rue du Xenil était illuminée d’une manière ravissante,
on avait créé sur la place voisine un jardin artificiel avec des bosquets
et des eaux jaillissantes, une foule de majos habillés à la mode an-
dalouse circulaient à pied et à cheval dans les rues, et de nombreuses
mascarades se disputaient l ’attention des curieux. Une entre autres était
destinée à représenter Don Carlos et son état-major : c’était une cavalcade
de moines, le crucifix en main et dans la tenue et les costumes les plus
ridicules. Cette plaisanterie n’était guère alors de saison, le prince dont
on se raillait ainsi avait à peu près dans le même temps envahi les Castilles,
et le gouvernement était obligé de rappeler en toute hâte à Madrid Es-
partero pour sa défense.
Le vingt-trois juillet, je quittai de nouveau Grenade : il s’agissait cette
fois de parcourir le versant méridional de la Sierra, et je me proposais
en chemin de monter au Mulahacen, point le plus élevé de la chaîne.
Je suivis jusqu’à Guejar le sentier qu’011 connaît déjà ; là au lieu de passer
la rivière et de monter à droite, je continuai à suivre la vallée, non par
le fond qui est encaissé entre des précipices, mais en m’élevant graduellement
le long des montagnes à gauche. Quoique de Guejar au fond de cette
vallée il n’y ait pas plus de quatre heures en ligne droite, il faut un
temps presque double pour parcourir cette distance, à cause des nombreux
vallons transversaux qu’on rencontre. Le premier et le plus considérable
est celui qu’on nomme la Dehesa de la Hoya. Un peu plus loin, à la limite
supérieure des cultures, parmi des taillis étendus Al Adenocarpus et de Quer-
cus toza, je trouvai abondamment le Lepidium heterophyllum. La côte élevée
que je suivis ensuite, nommée Loma de Maytena, est précisément en face
de Casoleta, cette station de bergers dont j ’ai parlé dans le chapitre précédent;
elle passe pour être quelquefois fréquentée par les voleurs, parce
que c’est le chemin le plus habituel pour aller de Grenade à l’Àlpujarra;
j ’y observai à une assez grande hauteur et non sans surprise le Ranunculus
hederaceus croissant dans de petites mares : c’est une plante qui n’habite
guères que dans l’Europe occidentale moyenne et toujours dans la plaine.
Au lieu d’y rencontrer les ladrones, nous ne trouvâmes heureusement que
de nombreuses tiendas d’honnêtes bergers qui, avec leur hospitalité ordinaire,
nous offraient les uns du laitage, les autres du gàspacho, salade rustique
fort en usage chez les paysans. A mesure que je m’élevais sur la loma,
je la trouvais plus ornée de fleurs alpines. Aux têtes d’un jaune foncé
du Teucrium aureum, s’associait le Senecio Boissieri aux tapis argentés ; le
Senecio Tournefortii était devenu très-commun,, et YAstragalus aristatus
avait déjà remplacé une autre espèce, YAstragalus Creticus, qui ne remonte
pas aussi haut. La nuit s’approchait et nous soupirions tous après le moment
où nous gagnerions Vacares, terme de notre marche de la journée.
Nous comptions sur les ressources que devaient nous fournir les bergers de
l ’endroit pour rompre un jeune qui durait depuis le matin, mais rien dans
la direction où nous allions ne nous annonçait le voisinage d’êtres humains,
cependant nous étions déjà à l’extrémité de la vallée, à mi-hau