différente, et c[ue c’était une nouvelle espèce du genre 7e»a. Apres avoir
•gravi avec assez de peine de nombreux escarpements, j ’arrivai enfin sur des
.plateaux émaillés de fleurs, et je trouvai mes'gens déjà établis dans le lieu
qui devait nous servir pendant quelques jours de demeure. Cet endroit est un
petit replat tourné au nord, à trois cents pieds seulement au-dessous du point
culminant; il y a là des bandes calcaires horizontales coupées de cavités et
de fissures semblablesf celles qu’pu remarque dans certaines, parties du
Jura; on a profité de cette exposition froide et élevée pour y établir des
creux à neigé ou ventisquieros. Ce sont tout simplement des cavités;circulaires
de dix à douze pieds de diamètre sur six de profondeur, dans lesquelles
on entasse la neige pendant l’hiver; ou la recouvre ensuite de branches d a-
bord, puis de tei-re, et elle H conserve ainsi: pendant tout lete. Unis sez
grand nombre de ces ventisquieros étaient disposés dans le voisinage, les uns
abandonnes, les autres pleins ou en exploitation. C’est la Sierra Tejeda qui
fournit de neige .la ville de Malaga; on y en amène aussi de la Sierra de la
Nieve, mais .cette dernière est plus éloignée, èt est surtout exploitée par les habitants
de Ronda. Un certain nombre de paysans de Camllas s’arrangent pour
prendre en commun la ferme dé la neige qu’on leur accorde moyennant un
faible droit ; ils doivent s’engager à en procurer pendant toutlé^ .e t chaque
jour' une quantité déterminée, et un d’entre eux passe toute la-belle saison
au haut de la montagne pour garder les ventisquieros, et aider les ameros
à charger la neige. On le nomme capataz, nom qu’on donne aussi au berger
en chef d’un troupeau, ou au directeur de tonte exploitation rurale. Celpique
je trouvai était un brave et excellent homme qui s’empressa de nous fournir
de l’eau, de nous procurer du lait et me céda une petite hutte en pienps
sèches' recouverte de broussailles, dans laquelle deux personnes; à peine
pouvaient pifeser la nuit, mais qui n’en étàit pas moins une'précieuse ressource
sur èette cime nué et élevée. .
La sommité que je gravis bientôt'est un plateau étroit et arrondi, dun
quart de lieue de largeur; il est bordé au midi par'• des rochers perpendiculaires;
le calcaire y est presque partout à nu et tout percé de: Crevassés peu profondes
où s’abrite la florè rabougrie de cette Région. On y trouve-aussi d autres
cavités plus considérables, entre autres un puits vertical de plus de 5'o^pieds
rempli au fond d’une neige qui ne fond jamais entièrement et fournit, dans
les années chaudes, un supplément précieux aux ventisquieros. On n y descend
qu’à l’aide de cordes, et il est lié pour les montagnards an. souvenir de
plus d’un meurtre. Je trouvai, par deux opérations barométriques, environ
—
65ôo pieds pour la hauteur du point le plus élevé. La végétation peu variée
se composait de plantes gazonnantes ou rampantes, dont plusieurs n’étaient
pas encore fleuries. Je citerai le Prunus prostrata déjà tout couvert de fleurs
roses, sous-arbrisseau qui habite les montagnes du Liban, de l’Asie mineure,
de la Grèce et que Desfontaines a observé aussi dans l ’Atlas; l’élégante Jurinea
humilis, une variété très-velue de la Sideritis scordioides, VÀndryala Agardhii,
Erodium trichomanefolium qui croit aussi dans le Liban, et auquel les taches
noires et si délicates de ses pétales inférieurs donnent tant d’élégance ,
enfin un gazon serré aux feuilles blanches et cotonneuses, que je ne savais
d’abord à qu’elle espèce rapporter, et que je reconnus plus tard, par une tête
de fleurs unique qui commençait à fleurir, pour être le rare Pterocephalus spa-
thylatus.
La constitution de la Sierra Tejeda est très-intéressante à observer de
cette sommité : ses pentes occidentales s’élèvent rapidement à partir du col de
Zafarraya qui la sépare de la^Sierra Prieta, moins élevée, et son point culminant
se trouve à peu près sur une ligne qu’on tirerait de Canillas à Àlhama.
A l’orient, au contraire, la chaîne est beaucoup plus allongée, elle s’abaisse
lentement pour se relever plus loin en cimes boisées, mais moins élevées
qu’on appelle Sierra de las Almijarras. J’ai déjà fait remarquer, à l ’occasion
des Sierras Bermeja et de Mijas, ce fait curieux que toutes les montagnes
de cette côte., s’élèvent rapidement à l ’est, tandis que leurs pentes orientales
sont très-longues; il se reproduit pour la Sierra de Lujar et celle de Gador,
ainsi que pour la Sierra Nevada prise dans son ensemble. Toute cette partie
haute; et occidentale de la Tejedà a un caractère très-pittoresque, elle est
creusée partout de gprges profondes et flanquée de mamelons et de contre-'
forts, mais entièrement dépouillée d’arbres, et il ÿ a longtemps que les forêts
d’ifs dont elle tire son nom {Tejeda de Tejo, if) et qui la rendaient célèbre sôiïs
la domination arabe, ont disparu. A peine rencontre-t- on encore ça et là
quelque pied rabougri et isolé d’i f ainsi que de l'Acer opulifolium et du Cra~
toegus aria, mais ces arbres divers doivent se retrouver plus abondamment
dans la Sierra de las Almijarras où dominent surtout, au rapport des gens du
pays, les Pinus Halepensis et pinaster et où l’on retrouverait peut-être aussi lë
Pinsapo. Il est impossible de dépeindre convenablement la magnificence de la
vue dont je jouissais de ce point. Au midi j ’avais à mes pieds toute l’étendué
de la mer jusqu’aux côtes d’Afrique, et;; plus près de moi cette région onduleuse
de collines qui règne dans tous les environs de Velez et de Ma-
laga; je distinguais comme sur une carte géographique ces innombrables