
cfe pieds que l’ane' et l’autre cime, et si tranchantes et tourmentées qu’il serait
impossible de les longer. Au nord ces crêtes plongent dans des précipices
h pic, et comme le Mulahaeen a ses escarpements tourne's au nord-ouest
et l’Alcàzaba les siens à l’ouest, toutes ces sommités, jointes au Picacho, forment
une espèce de cirque gigantesque et très-profond qui lui-même est divise'
par diversès crêtes de rochers, en vallons longitudinaux et encaissés,
dont le Corral de Veleta est un. De ces mêmes Crêtes schisteuses descendent
au sud des pentes fortement inclinées*; à leur pied s’étendent des boregüils
ou replats ondulés et herbeux assez e'tendus où je remarquai encore de nombreuses
taches de neige; ils renferment plusieurs petits lacs, entre autres celtii
de la Caldera, et leurs eaux s’e'coulent par plusieurs embranchements le long
du profond barranco de Pogueyra- qui court, droit âu sud et au bas' dnquel
je pouvais distinguer les toits du village de Campaneyra, plats et couverts
de terre suivant la mode de l’Alpujarra. Au sud-ouest, à partir de la cime
de la Veleta, la ligne de faite s’abaisse par une pente accessible jusqu’à
un col situé a une demi-heure de distance, quelques cèntaines de pieds
plus bas, et appelle' le Collado de Veleta : c’est l’un des rares points où
l ’on peut traverser les hautes parties de la chaîne; au-delà elle se relève
pour former de nouvelles crêtes escarpées qui courent jusqu’au Cerro del
Caballo, cime qui cache dans cette direction la terminaison des montagnes.
Maintenant que nous connaissons les parties plus rapprochées de l’observateur,
passons aux points plus éloignés de ce vaste horizon. A l’ouest ,et au
sud-ouest la vue s’étend sans bornés sur les vallées de la Sierra! sur la Vegà
et les montagnes qui la circonscrivent; non-seulement la Sieçla Tejëdâfest
visible, maison distingué très-bien la Sierra de la'Nieve au-desslpde Rônda,
et même la cime éloignée et presque nuageuse du Cerro fde San Cristova!
entre Ronda et Cadïz. Au nord, l’oeil erre .Sur d$ vasths Contrées d’un
aspect triste et désert, coupées par des montagnes calcaires assez élevées,
mais qui > du haut de .la Veleta, ne paraissent que des ondulations ; les
sommités de Vacares; continuation de l’Alcazaba, cachent au nord-est
une partie des vastes plaines de Guadix et de Baza, mais on aperçoit plus
loin, dans cette même direction, la Sierra Segura, reconnaissable à une
pyramide majestueuse qui la domine; la Sierra Morena, bien plus éloignée
encore/ se présente sous la forme d’une muraille monotone et borne l’horizon
sur tout le côte' nord. A l’ouest de l’Alcazaba, le Mulahaeen et l’énorme contrefort
àj^roupe allongée qui en descend du côté de la mer, ne permettent de
voir que la partie méridionale de la Sierra de Gador. C’est cette- dernière
chaîne que quelques voyageurs ont prise pour le cap de Gates ^absolument
invisible de cette station. Au midi, vers l’extrémité de la vallée de Poqueyra,
la haute Sierra riveraine de Lujar circonscrit aussi la vue, on peut cependant
par-dessus ses flancs occidentaux distinguer la mer éloignée d’une dizaine
de lieues et sur laquelle je pus très-distinctement apercevoir quelques voiles.
Enfin, dans la même direction et à une distance de 4° lieues au moins,
je découvris les premières élévations de la côte. d’Afrique du côté de Me-
lilla. On jugera par ces détails de l’immense étendue de ce panorama et de
son intérêt quant à la configuration géographique de toute l ’Andalousie.
La hauteur du Picacho, d’après les mesures trigonométriques du docteur
Simon de Rojas Clemente, est de 3516 mètres ou 10823 pieds au-
dessus de la mer. J’ai trouvé pour le même point, par une moyenne de
trois observations barométriques, 2772 mètres, soit 8533 pieds au-dessus de
la ville de Grenade, et par conséquent 10728 pieds au-dessus de la mer.
Le Mulhacen est de. quelques centaines de pieds plus élevé ; même sur ces
points culminants la neige n’est point éternelle et ne persiste que dans les
endroits abrités, enfoncés et dans ceux où la force des vents l’a amassée,
L’exposition au midi- ne paraît pas favoriser la fonte de ces neiges ; car j ’en
ai toujours trouvé les amas aussi nombreux et aussi étendus sur Je versant
méridional que sur celui tourné au nord. La Sierra Nevada n’arrive donc
nulle part à la limite inférieure des neiges éternelles dans le sens strict de
ce mot; mais sa partie supérieure dans une zone de i 5oo à 2000 pieds,
en conserve pendant les étés ordinaires de nombreux amas; ce qui carac-
téris^eucore la végétation de cette zone,, c’est que, soit tendance du sol
à s’éBbüler et à se désagréger, soit trop longue persistance de la neige,
les plantes n’y forment nulle part des pelouses, mais croissent isolément.
Elles sont toutes, sans exception, vivaces, et parmi elles prédominent
les graminées aux feuilles coriaces qui forment de petites touffes compactes.
Les espèces que j ’ai citées un peu plus haut remontent toutes sur le
terre-plein du sommet de la Yeleta, où je fus bien plus surpris de trouver
de beaux pieds de Ptilotrichum spinosum couverts de fleurs blanches ou
roses. C’est un fait bien curieux et difficile à expliquer que celui de la présence,
sur des sommités glaciales, d’une plante qui, dans le midi de la France,
n’habite que des montagnes d’une faible hauteur et où il neige rarement.
Pour compenser le petit nombre des phanérogames, une foule de lichens
couyraiént les rochers de cette cime. Tous, sans exception, appartenaient à la
flore des hautes Alpes de la Suisse, et parmi eux la Squammaria elec