i6o P R I N C I P E S D E B O T A N I Q U E .
S E C O N D E P A R T I E .
A C T I O N D E S O R G A N E S
DES V É G É T A U X ,
o u P H Y S I O L O G I E .
i^8.Nousavons jusqu’ici, par abstraction, considéré les plantes
dans un état de repos : rendons-leur maintenant le mouvement
vital, et cherchons à de'mêler comment, au moyen de
ce ressort mystérieux, les différentes parties de ces machines
admirables exécutent les nombreux phénomènes de la végétation.
Essayons de démêler, i°. les propriétés vitales des végétaux
; 2°. les loix qui opèrent la nutrition des individus ;
3°. celles qui président à la conservation des espèces.
C H A P I T R E P R E M I E R .
P R O P R I É T É S G É N É R A L E S .
179. Tous les êtres organisés ont une force vitale (2) : de Ik
certains philosophes ont pensé que tous aussi étoient doués de
la sensibilité. Mais les végétaux ne nous présentent aucun indice
direct de cette propriété. Il semble contraire à la marche
I générale de la Nature, que des êtres qui ne peuvent ni se défendre du mal, ni l’éviter, soient doués de la faculté de le sentir; et en
outre , on a pu remarquer ( 3 et /, ) que les différences qui existent
entre les deux règnes , peuvent toutes se déduire de celte
seule différence, savoir, que les animaux ont la sensibilité,
c’est-à-dire la connoissance de leur existence, tandis que les végétaux
en sont dépourvus. Que si l’on se demande ce que
peut être une force vitale dépourvue de sensibilité, j’en appellerai
à nos propres sensations. Nous savons , à n’eh pouvoir
douter, qu’il se passe dans notre corps un grand nombre de
phénomènes indépendans de notre volonté , inappre'ciés par
notre sensibilité, et qu’on ne peut cependant ranger dans la
classe des phénomènes purement physiques, puisqu’ils cessent
après la mort; tel est, par exemple, le mouvement péristaltique
des intestins : imaginons que les végétaux sont des animaux
réduits à cette seule classe de phénomènes.
C’est en suivant Cette marche de raisonnement, qu’on a été
conduit à penser que les végétaux sont, comme les animaux,
doues d irritabilité. Cette question, qui fait maintenant un sujet
de discussion entre les Naturalistes les plus habiles , est d’une
telle importance, qu’elle mérite un examen spécial.
180. Quand certains corps agissent , soit mécaniquement,
soit chimiquement sur les fibres musculaires des animaux, ils y
produisent une contraction , laquelle est suivie, d’un relâchement
lorsque l’action du corps irritant vient à diminuer. On
conçoit que si l’irritation a lieu sur une fibre droite, elle tend
à en rapprocher les deux extrémités ; dans un vaisseau formé
de fibres circulaires , elle rétrécit momentanément le diamètre *
dans un sac, elle diminue la capacité; telles sont les idées les
plus générales qu’on puisse avoir de l’irritabilité , propriété
bien constatée dans les animaux , et contestée dans les plantes.
181. Lespreuves, sinon lesplus frappantes, du moinsles plus directes
de l’irritabilité végétale , se déduisent des expériences de
MM. Brugmans etCouion. Si l’on coupe en travers une tige d’euphorbe
, on voit les sucs sortir de 1 orifice des mêmes vaisseaux
sur l’une et l’autre tranches. O r, le mouvement de ces sucs
avoit dans chaque vaisseau une certaine direction; ce n’est
doue pas l’impulsion de ce mouvement qui détermine la sortie
du suc dans les deux sens : ce suc ne coule pas non plus par son
propre poids ; car il en sort également dans quelque position qu’on
tienne la tige : il n’est point entraîné par le dégagement d’un
fluide élastique; car quoiqu’il soit visqueux, il n’est point entremêlé
de bulles : il faut donc que les vaisseaux dans lesquels il
est renfermé se soient contractés après leur section pour forcer
le suc à en sortir. Celte conséquence est d’autant plus juste , que
si on place sur la coupe de ces plantes un liquide astringent,
Comme une dissolution de sulfate de fer ou de sulfate d’alumine ,
on voit l’émission du suc cesser à l’instant, comme cela arrivé
lorsque les mêmes agens sont appliqués sur les plaies d’un animal.
182. Ceci nous conduit à une seconde classe de preuves en faveur
de l’irritabilité végétale; savoir que tous les agens qui augmentent
ou diminuent l’irritabilité des animaux , agissent de la
même manière sur les végétaux. Ainsi , on sait que les animaux
tués par les décharges électriques ne Tome I. donnent akprès leur