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C’est ici, ce me semble, le noeud de la difficulté j et la discussion
dans laquelle je viens d’entrer, doit achever de dévoiler
la cause des obstacles étonnans que les Botanistes ont recontrés
par-tout dans la formation de leurs systèmes et de leurs méthodes.
Us ont tous cherché , du moins jusqu’à un certain
point , à réunir les deux objets dont il s’agit ici, et se sont
efforcés mal-à-propos de saisir en même temps la Nature par
deux cotés différens, dont ils ne pouvoient tenir l’un sans que
l’autre leur échappât.
Je termine cet article intéressant par une réflexion très-
simple , qui vient à l’appui de tout ce que j’ai dit précédemment.
Il en est des systèmes et des méthodes destines a nous
faire connoître les noms que l’on a donnés aux plantes, comme
de ces noms eux-mêmes. Ni les uns ni les autres ne sont dans
la Nature ; ce ne sont que des moyens artificiels , dont on est
convenu pour s’entendre : tout est ici l’ouvrage de l’homme.
Au contraire , un ordre fait pour nous montrer la suite de tous
les rapports de ressemblance qui existent entre les plantes, considérées
dans toutes leurs parties, ne peut être arbitraire. Le
plus ou le moins , à cet égard, a un fondement dans la chose
même. Pourquoi donc vouloir réunir dans un meme plan deux
objets tout-à-fait indépendans l’un de l’autre, si ce n’est que
le premier nous sert comme de degres pour arriver jusqu au
second, vers lequel il n’a point été donne à l’esprit humain de
s’élever par un premier essor ?
QUATRIÈME PARTIE.
Des moyens employés dans cet Ouvrage, pour fa ciliter
l’étude de la Botanique.
Je me propose, dans cette dernière partie, de mettre le lecteur
à portée d’apprécier les efforts que j ’ai faits pour exécuter
le seul plan qui puisse, selon moi, ramener l’étude de la Botanique
à ses véritables principes. Les détails dans lesquels je
suis obligé d’entrer à cet égard, feront la matière de deux sections
assez étendues , dont la première traitera de l’analyse ,
qui est le moyen que j ’ai choisi pour conduire à la connois-
sance des plantes j et l’autre sera destinée à exposer la marche
qui me paroît la plus avantageuse pour réussir dans la formation
d’un ordre naturel.
a r t i c l e p r e m i e r .
De l'Analyse ou des Principes d’une Méthode artificielle dont
l’objet unique est de faire connoître le nom des Plantes
observées.
Une bonne méthode en Botanique est, pour ainsi dire, uu
guide éclairé qui voyage par-tout avec nous, que nous pouvons
consulter à chaque instant, qui plaît même d’autant plus ,
qu’il exige toujours des recherches de notre part, et déguise
les leçons qu’il nous donne sous l’apparence flatteuse d’une découverte.
U est certain que dans un ouvrage de cette nature, c’est à
l’utilité qu’il faut principalement s’attacher, au point même
de sacrifier tout le reste, s’il est nécessaire, à cet objet essentiel.
D’après cette considération, il me semble que tout auteur
qui compose une méthode, quels que soient les moyens qu’il emploie
d’ailleurs , doit nécessairement partir des deux principes
suivans, comme de deux loix fondamentales suffisamment démontrées
par tout ce qui a été dit dans l’article précédent.
P r em ie r p r in c ip e . Aucune partie des plantes prise à l’exclusion
des autres ne fournissant seule assez de caractères pour
remplir l’objet direct d’une distribution quelconque , il est nécessaire
de faire usage de tous les caractères que les plantes
peuvent offrir, et d’en emprunter indistinctement de toutes
leurs parties , ayant seulement attention de rejeter , autant
qu’il sera possible , ceux dont l’observation seroit trop délicate.
S econd p r in c ip e . Ayant reconnu qu’on ne peut faire une
seule division qui ne rompe quelque part des rapports très-
marqués , on doit se mettre parfaitement à son aise sur cet objet
, s’occuper uniquement de la sûreté de la méthode, former
des divisions trànchantes et circonscrites par des définitions à
l’abri de toute équivoque, sans avoir égard aux séparations
frappantes que ces divisions peuvent occasionner.
Ces principes une fois établis, il est à propos de donner unç
idée de la méthode que j’ai exécutée- dans cet Ouvrage. Imaginons
, pour plus de simplicité , qu’il n’existe dans la Nature que
les douze espèces de plantes qui suivent :