plante observée; et l’on sent combien une pareille recherche
devient pénible et ingrate dans une multitude de cas.
Mais si l’ouvrage dont je parle contenoit deux grandes divisions,
la première attention de l’observateur seroit d’examiner
les titres de ces divisions, pour se déterminer en faveur
de l’une ou de l’autre, d’après l’inspection de la plante; et le
choix étant fait, il seroit encore obligé de faire ses recherches
parmi cinq mille descriptions, au risque de les lire toutes si sa
plante se trouvoit la dernière. Il est inutile d’aller plus loin
pour faire voir que le travail, tout Compense, s abrégerait à
proportion que les divisions seroient plus nombreuses; et c’est
ici une de ces propositions dont le simple développement suffit
pour les démontrer.
J’ajoute maintenant que l’on ne peut, en Botanique , ni probablement
dans toutes les autres parties de l’Histoire Naturelle,
faire une seule division nette et tranchante , qui ne rompe quelque
part des rapports très-marqués, d’où il faudra conclure
qu’un système ou une méthode qui renferme nécessairement
un certain nombre de divisions, ne peut etre un ordre naturel.
C’est principalement de l’observation que l’on peut déduire
la preuve de la proposition précédente. Or , j’ai fait des recherches
sur tous les caractères possibles, et j.e puis assurer qu’il
ne s’en est trouvé aucun qui ait soutenu l’épreuve.
La division tirée des feuilles séminales ou des cotylédons ?
jqui paroît d’abord assez naturelle, offre cependant un grand
nombre de séparations frappantes; elle écarte considérablement
les alisma et le sagittaria du genre des ranunculus, avec lequel
ces plantes ont plus de rapport qu’avec les joncs et les
graminées. Le ranunculus glacialis même se trouve alors rejeté
très-loin de son genre , étant monocotylédon , comme j’ai
eu occasion de l’observer il y a quelques années au Jardin du
Roi. M. Linné indique les melocactus de M. de Tournelort
comme mono cotylédons , et les opuntia du meme auteur,
comme dicotylédons, quoiqu’il croie devoir réunir ces plantes
sous un même nom générique, tant leurs autres rapports sont
sensibles. M. de Jussieu, de son côté , place au Jardin royal ,
dans la division des monocotylédons , Vorobanche, le lathroea,
Yutricularia et le pinguicula , qu’il sépare des labiées per&on-
nées pour les placer entre les fougères et les mousses. Il range
aussi dans, la même lignée le genre du menianlhes qui se trouve
alors , comme on voit, très—écarté de 1 hotlonia, du samolus
et du lysimachia, qui ont cependant beaucoup plus de rapport
avec lui que les mousses et les fougères.
Que serçit-ce si la manière dont lèvent les plantes étoit
aussi connue des Botanistes qu elle peut 1 etre des Jardiniers,
par rapport au petit nombre de végétaux que ces derniers cultivent
? Comment d’ailleurs être à portée d’observer dans les
champignons, les lichens, les mousses , etc., cette première
époque du développement des germes ?
Les divisions empruntées des autres parties de la plante,
rompent encore un bien plus grand nombre d’affinités. Veut-
on , par exemple, employer la considération du fruit ? alors
les labiées , ainsi que les bourraches, seront rejetées fort loin
des personnées , celles-ci ayant ledrs semences renfermées dans
une capsule, etc. Si l’on essayoit ensuite d’établir ses divisions
d’après la distinction de la baie d’avec la capsule, on sépare-
roit nécessairement le solanum du capsicum, le vaccinium de
Yandromeda, ainsi que beaucoup d’autres plantes qui se trouvent
d’ailleurs si bien liées. La position du fruit, tantôt supérieur
et tantôt inférieur au réceptacle, détacheroit Y agave de
Yaloès, diviseroit les saxifrages, etc. En un mot, le nombre
des loges, la forme des semences et tous les aspects possibles
sous lesquels on peut considérer le fruit, donneroient par-tout des
coupes bizarres qui troubleroient l’harmonie des autres parties.
On me dispensera sans doute de citer tant d’autres caractères,
tels que la corolle monopétale ou polypélale qui sépare
une moitié des liliacées d’avec l’autre ; la corolle régulière ou
irrégulière qui divise les géranium, écarte Yiberis des crucifères
, Vecfyum des boraginées , etc. ; les étamines définies ou
indéfinies qui rompent la communication entre le poterium et
le sanguisorba, entre ie sedum et le semper-vivum , divisent
le cleome, le lithrum, etc.
En un mot, pour que l’on pût faire une seule distribution
sans violer la loi des rapports, il faudrait que les mêmes caractères
existassent tous à-la-fois , et exclusivement, dans les
mêmes grouppes de plantes. Mais comme la Nature les a au
contraire mélangés et diversement combinés , il arrive qu’à
l’endroit où les uns se terminent, les autres ont encore un certain
espace de la chaîne à parcourir, et que l’on ne peut saisir
nulle part aucun point commun de séparation.