qu’il n’est point nécessaire pour cela d’adopter en même temps
les principes d’aucun d’eux, et qu’il n’est besoin que du flambeau
seul d’observation pour nous guider sûrement dans ces
routes ouvertes par la Nature elle-même, et où elle a laissé
par-tout des traces si sensibles de sa marche.
Mais l’arrangement respectif de ces mêmes suites de plantes
que nous avons désignées ci-dessus, s’est trouvé susceptible
de plusieurs combinaisons différentes, e t, j’ose le dire, toutes
également vicieuses, du moins dans le principe dont on est
parti pour les rapprocher. En effet, pour découvrir le passage
d’une suite à l’autre, il auroit fallu considérer l’ensemble des
parties, et se déterminer d’après le plus grand nombre et la
plus grande valeur des ressemblances. Mais comme la plupart
des Botanistes, dans la formation de leurs ordres naturels, se
sont attachés à des caractères isolés, il arrive souvent que les
extrémités des lignées voisines ne se touchent que par un seul
point, et se repoussent par tous les autres.
Une autre source de variations encore plus frappantes, c’est
îa difficulté de placer certaines plantes anomales qui, au premier
coup-d’oeil, semblent se refuser à toute espèce de comparaison;
tels sont les genres des morina , fraxinus, oesculus,
viscum, plantago , parnassia , tamariscus, alchimilla , po~
Ijgala, adoxa, impatiens, etc. Aussi les Botanistes, qui ont
pre'tendu les ranger en raison des loix circonscrites auxquelles
ils se sont astreints, ont-ils tellement défiguré les portions de
la chaîne générale , dans lesquelles ils ont fait entrer ces mêmes
genres, que si l’on ne voit pas d’abord le rang qu’ils devroient
occuper, on s’apperçoit du moins évidemment qu’ils sont déplacés.
Pour éviter ce double inconvénient des principes particuliers,
j’ai essayé d’établir des règles applicables à l’ensemble
même des organes, et à l’aide desquelles on pût procéder de la
manière la plus uniforme et la plus avantageuse dans l’estimation
de ces rapports obscurs qui ne donnent point assez de prise
à l’observation.
Avant de passer à l’exposition de ces règles , je conviens
d’abord avec tous les Botanistes, que dans la comparaison des
plantes, on doit avoir spécialement égard aux parties de la
fructification; c’est-à-dire , au fruit, à la fleur et à leurs dependances.
Ce principe est fondé en premier lieu sur la prééminence
que
que l’on attache naturellement à ces organes qui renferment
les gages delà génération future, et auxquels se rapporte,
comme à son centre , le mécanisme subalterne des autres parties
qui ne semblent vivre que pour eux.
D ailleurs ces memes organes servent mieux que tous les
autres a déterminer les plantes, et à les caractériser par des
traits parlans ; en sorte que sans eux la plupart n’ont que des
membres et un corps, et point de physionomie. Les idées
même du vulgaire concourent ici avec les observations des sa—
Vans, du moins par rapport à la fleur. Cette partie , que Pline
appelle plantarum gaudium, est celle qui fixe presque seule
nos regards : nous passons avec une sorte de dédain auprès des'
ihdividus qui n’en sont point encore ornés : on diroit qu’ils ne
commencent à exister pour nous qu’avec cette parure si riante
qui nous appelle et souvent nous arrête auprès d’eux.
Il résulte de ce principe, que deux plantes qui se ressemblent
parfaitement dans les parties de la fructification , mais qui
diffèrent totalement pour les tiges, les feuilles et les racines ,
ont plus de rapport entre elles que deux autres plantes qui se
rapprochent très-sensiblement par ces dernières parties, mais
dans lesquelles les parties de la fructification n’ont aucune ressemblance.
C est ainsi que le cacalia suave-olens a une affinité
plus marquée avec le cacalia ficoides, malgré la grande
diversité du port, que Vantirrhinum linaria n’en a avec Veu-
phorbia cjparissias, quoique, abstraction faite de la fructification,
on soit souvent tente de prendre l’un pour l’autre.
11 s’agiroit maintenant d’évaluer les différentes parties de la
fructification; savoir, la semence, les étamines et pistils, le
péricarpe , la corolle et le calice , de manière à pouvoir déterminer
les raisons et même les degrés de préférence que l’on
doit donner à un rapport sur l’autre, dans le cas où plusieurs
de ces parties , comparées chacune à chacune dans plusieurs individus
, auroient entre elles une ressemblance parfaite. Pour
y parvenir, j ai adopté le principe suivant, que je ne regarde
pas comme incontestable, mais seulement comme le
plus plausible de tous ceux qu’il me semble que l’on pourroit
imaginer.
p r i n c i p e .
Une partie de la fructification, ou, ce qui revient au même,
Tome I. j)