La bouture étant une espèce d’accident produit par les circonstances
extérieures , se présente sous des fornîés variables;
la graine étant essentielle à l’espèce, offre les formes les plus
constantes de toutes celles que les végétaux nous présentent.
Enfin la bouture étant due aux circonstances extérieures, les
hommes peuvent imiter ces circonstances , et produire des boutures.
La graine étant due à des causes internes et à l’essence
même de l’espèce , les hommes ne sont point maîtres de sa formation.
260. Ces deux organes , en apparence si différens , ont cependant
entre eux une certaine correspondance; ainsi on peut
forcer une plante à porter un plus grand nombre de fruits , en
l’empêchant de porter des boutures ; on peut sur-tout diminuer
graduellement l’abondance des graines d’une plante, en la multipliant
habituellement de boutures ; il paroît qu’il faut ranger
sous ce dernier chef, le phénomène de l’iufécondité perpétuelle
des graines de canne à sucre , de saule , des plantes grasses vivaces,
et de plusieurs autres plantes cultivées.
A R T I C L E I I .
De la Reproduction par boutures.
261. Au milieu des variations nombreuses que présentent les
reproductions par boutures, on peut distinguer deux classes:
i°. celles qui se séparent d’elles-mêmes de la plante-mère;
2>°. celles qui ne s’en séparent qu’arlificiellement ou accidentellement.
La première classe comprend les gongyles et les
bulbes; la seconde, les boutons, les boutures, les marcottes,
les cayeux et les greffes.
262. On a donné le nom de gongyle ( gongylus ) aux globules
reproducteurs des plantes acotylédones; ces globules pa-
roissent en effet différer des graines, et se rapprocher des boutures,
soit parce que dans plusieurs on ne peut distinguer dé
fécondation préalable , soit parce que leur accroissement paroît
avoir lieu au moyen d’utie simple extension , et sans que l’embryon
perce aucune enveloppe visible. Mais peut-être ces différences
apparentes tiennent-elles uniquement à notre ignorance
, et celle-ci à l’extrême petitesse des organes dont il s’agit.
L’histoire mieux connue des mousses, et quelques particularités
de la structure des varecs , tendent à me faire penser que
ces gongyles sont de véritables graines dont le développement
diffère de celui des grames ordinaires, absolument comme la
végétation des acotylédones diffère dp celle des végétaux vasculaires.
a65. Le nom très - impropre de bulbes (bulbi) a été donné
à certains tubercules reproducteurs qui naissent sur les ramifications
de la racine dans la saxifraga granulata , aux aisselles
des feuilles dans l’ixia bulbifera, entre les pédicelies des fleurs
dans plusieurs aulx, et à la place même des graines dans la
capsule de quelques amaryllis. Leur structure etleur histoire sont
encore peu connues ; on sait seulement qu’ils se développent sans
fécondationj qu’ils se séparent d’eux-mêmes delà plante-mère,
et en reproduisent une nouvelle qui conserve de l’ancien individu
jusqu’aux moindres variétés.
264. L’histoire des boutons n’a été encore bien observée que
dans les dicotylédones : là nous voyons évidemment que tous
les points de la couche intérieure de l’écorce peuvent développer
des boutons lorsqu’une cause quelconque rallenlït dans un
lieu déterminé le mouvement delà sève descendante, ou en
augmente la quantité. Ces boutons ou ces germes sont de deux
sortes , les uns destinés à produire des branches , les autres
destinés à produire des racines; de-là, deux nouvelles sous-divisions
de la multiplication des végétaux par boutures.*
265. A l’aisselle de toutes les feuilles, la sève se trouve un
peu retardée dans sa marche, et il s’y développe naturellement
un bouton, lequel se change en branche ; une branche , sous ce
point de vue, peut être considérée comme un individu distinct,
né sur un autre individu ; on peut même réaliser cette métaphore
, et c’est ce qui constitue la greffe (insitïo). Celte opération
consiste à transplanter un boulon sur un individu différent
de celui sur lequel il a pris naissance : pour qu’elle réussisse ,.
il faut nécessairement que le liber des boutons ou de la greffe
s’abouche avec le liber du sujet , c’est-à-dire, de l’arbre sur
lequel on le place ; on remplit celte condition indispensable
par divers procédés dont on peut lire les détails, soit dans les
Familles des Plantes d’Adanson , soit dans le Dictionnaire d’A-
griculture de Rozier. La transplantation d’un bouton sur un
individu de la même espèce , est une opération qui manque
rarement ; mais lorsqu’on le transplante sur un individu d’une
espèce différente, il faut que ces espèces aient entre elles certaines