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 quantité des plantes ,  les ressemblances fréquentes d’une  
 espèce  avec  l’autre  dans  le  port  extérieur  et  le  plus  grand  
 nombre  des  parties ,  compliquent  extrêmement  le  travail  de  
 l’observateur ,  obligé  de  repasser  sans  cesse  sur  les  memes  
 traces pour  se  familiariser  avec  les  objets,  et  exposent  1 oeil  
 mime  le  plus  exercé ,  à  des  erreurs  souvent  inévitables.  Et  
 quels dangers ne résulteront pas d’une pareille étude ,  si ,  d’après  
 des conuoissances si vagues , on ose faire usage des vertus  
 des plantes?  Que  n’aura-t-on pas  à craindre de ces méprises ,  
 peut-être plus ordinaires qu’on ne le pense,  et dont le moindre  
 inconvénient  est  d’être  indifférentes ,  et.  de  laisser  subsister  
 dans toute leur violence  des  maux  qui  exigent souvent les  secours  
 les plus prompts et les plus actifs ? 
 Les vrais principes de la Botanique consistent  donc dans l’étude  
 approfondie  des  caractères  constans  qui  distinguent  les  
 plantes les unes  des  autres,  dans  l’observation  exacte  de  tout  
 ce qu’elles ont de commun et de particulier, et dans la recherche  
 de tout ce qu’elles offrent d’intéressant pour l’Histoire Naturelle  
 ou la Médecine. 
 On a senti que pour remplir ces différentes vues,  pour suppléer  
 aux bornes trop resserrées de la mémoire, se reconnoître  
 au  milieu de la multitude immense des végétaux, et être  plus  
 à  portée de  transmettre  aux  générations futures le  dépôt  précieux  
 des connoissances acquise? en ce genre, il falloit un ordre  
 général, une distribution méthodique , où le tableau particulier  
 de  chaque individu eût  une  place marquée  et  facile à  retrouver, 
   d’après  l’inspection même  de  l’individu.  Or,  ce  sont les  
 tentatives faites  par  les Botanistes pour exécuter ce vaste proje 
 t,  que  j’entreprends  ici  de  soumettre  à  l’examen ,  et  dont  
 j’espère démontrer le peu de succès, relativement à l’objet qu’ils  
 se sont proposé. 
 A R T I C L E   P R E M I E R . 
 Des différons  arrangemens qui  ont  été  imagines pourfahe  
 connoitre les Plantes. 
 Le besoin  fut,  pour  ainsi  dire ,  le  premier  guide  qui  conduisit  
 l’homme à la connoissance du règne végétai. Les alimens 
 que les plantes lui offrirent, les remues 1  que des essais heureluuxi  
 lui  découvrirent  dans  plusieurs  d’entre  elles ,  les  lui  firent  
 regarder avec plus  ou  moins d’intérêt, à raison de l’utilité plus  
 ou  moins  marquée  qu’il  retiroit  de  chacune.  Il  les  nomma  
 d’après  leurs  vertus  ou  propriétés;  et  ramenant de  même à  
 son  propre  avantage  la  division  qu’il  en  fit,  il  les  distribua  
 selon  les différens services  qu’elles  lui rendoient, et  les  divers  
 genres  de  maladies  contre  lesquelles  elles  lui  offroient  des  
 ressources; ensorte que les premiers ouvrages sur cette matière  
 furent proprement des  Traités de Botanique  usuelle. 
 On  remarqua  ensuite  que  certaines plantes affectionnoient  
 des  climats  particuliers;  que  dans  le  même  climat,  les  lieux  
 aquatiques,  les  terreins secs  ou  montagneux,  les  bois  et les  
 champs  présenloient chacun une  scène  à  part ,  qui se  renou-*  
 veloit  à-peu-près  d’une  saison  à  l’autre.  Quelques  observateurs  
 distribuèrent les plantes  d’après ce point de  vue  général  
 de la Nature,  et leurs Traités furent comme l’histoire de leurs  
 voyages. 
 On  sentit  dans  la  suite ,  que  ni les propriétés  des  plantes ,  
 qui ne  se manifestent  en  quelque sorte que par  la destruction  
 même  de  l’individu,  ni  des  circonstances  purement  locales,  
 ne pouvoient fournir aucune  distribution exacte et méthodique.  
 On  imagina donc des divisions  fondées  sur ce  que les plantes  
 présentoient  de  plus  frappant  aux  yeux,  sur  leur  grandeur,  
 leur consistance, leur  durée.  On  employa la considération  des  
 racines,  des  tiges,  des feuilles,  quelquefois même celle  de  la  
 fleur et du fruit.  Ces ébauches,  d’abord  très - imparfaites,  se  
 perfectionnèrent  p eu -à-p eu ,  et  préparèrent,  comme  par  
 degrés,  l’heureuse  révolution qui s’est  faite  depuis  environ un  
 siècle  dans la Botanique. 
 C’est alors  que  des  hommes célèbres, convaincus de l’insuffisance  
 de tous les caractères  employés  par ceux qui les avoient  
 précédés, tournèrent toute leur attention du côté des parties de  
 la fructification,  et  crurent même  appercevoir  l’indication  de  
 la  Nature  dans  l’importance  de  ces  organes  destinés  à  la  
 reproduction  des  individus.  Ils  rassemblèrent  les  différentes  
 plantes  qui  leur  parurent  avoir  plusieurs  de  ces  caractères  
 communs entre elles ,  et formèrent,  comme  je  l’ai  déjà  dit,  
 de petites familles  détachées ,  connues sous le nom de genres.  
 La  moindre  différence  qui  parut  constante  dans  les  plantes  
 qui composoient un genre,  servit à  former les espèces,  et les  
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