de plus en plus, comme cela arriverait dans un peuple
d’enfans.
Dans notre opinion, les îles Taïti ont donc reçu
avant Hawaii et la Nouvelle-Zélande la race qui habite
aujourd’hui ces trois groupes. Elle subjugua d’abord
et détruisit par la suite la race mélanésienne qui les
occupait primitivement suivant toute apparence.
Quand la population commença à se trouver trop
considérable pour les ressources du so l, des colonies
se lancèrent, dans tontes les directions, sur la surface
de l’Océan, et allèrent à la recherche des nouvelles
terres. Favorisés par les vents du S. E., ils purent
facilement atteindre les iles Nouka-Hiva, et de-là nul
doute que, malgré la distance, des pirogues égarées
sur la surface des flots n’aient pu aborder aux îles
Hawaii, qui se peuplèrent successivement de la même
race. D’autre part, à l’aide des mêmes vents du S. E.,
les Polynésiens poussèrent sans peine leurs aventureuses
navigations vers le S. O ., et c’est ainsi que
les îles Chatam et de la Nouvelle-Zélande durent recevoir
leurs colonies.
Sans doute, bien des pirogues firent naufrage en
pleine mer, des milliers d’hommes périrent peut-être
dans les mers orageuses de l’Océan austral. Mais l’on
conçoit qu’il suffisait qu’une seule pirogue arrivât à
bon port sur des terres nouvelles pour les coloniser,
et cela ne pouvait pas manquer d’arriver sur le nombre
de celles qui tentaient l’aventure. Cette passion
des découvertes, ce penchant a fonder de nouvelles
colonies, régnaient encore récemment aux îlesNouka-
Hiva, où il était fortifié par les avis et les oracles des
prêtres. Porter nous a laissé à ce sujet des renseignemens
très-curieux.
Les Polynésiens n’eurent aucune peine à se répandre
sur les îles situées sous le vent dans toute l’étendue
de la zone équatoriale, si déjà elles n’étaient pas
occupées par leur race. Mais parvenus aux îles 'Viti,
la race mélanésienne, plus nombreuse et plus vigoureuse,
leur opposa probablement une résistance qu’ils
n’avaient point rencontrée ailleurs, et là fut le terme
de leurs progrès vers l’ouest, à cela près de quelques
îles isolées, comme Rotouma, Tikopia, Anoada et
les îles basses voisines de Nitendi, où ils réussirent
encore à s’établir.
Dans la Micronésie, les progrès des Polynésiens
se trouvèrent réprimés par les peuples qui occupaient
déjà ces îles, peuples qui ne leur cédaient en rien
sous le rapport physique et moral. Sur le nombre des
pirogues qui purent aborder dans leurs parages, les
unes eurent sans doute leurs équipages massacrés ou
réduits en esclavage, d’autres furent accueillis et traités
par les indigènes comme des compatriotes.
Pour l’instanl, nous nous arrêterons là dans nos
conjectures touchant la population des îles de la Polynésie
, et nous allons examiner successivement les
principales altérations que la langue mère, d’où dériva
la polynésienne, a éprouvées en passant d’un dialecte
dans l’autre, ou plutôt les nuances de prononciation
qu’offrent ceux-ci comparés deux à deux.