NEUVIÈME MONOGRAPHIE.
SDR UN NOUVEAU GENRE
DE RONGEUR SOUS L E NOM d e N Y C T O C L E P T E S { t ) .
L'histoire naturelle des mammifères, quoique réduite à une série
assez bornée d’animaux dont le plus grand nombre nous est connu,
ne laisse pas d'offrir un champ encore vaste à l ’étude ;
sans doute, moins par l’espoir de voir s’étendre le cercle de nos
connaissances par la découverte d’espèces totalement nouvelles., que
par une investigation plus sévère des propriétés et des formes des
espèces connues, décrites sur un examen plus ou moins superficiel et
rangées provisoirement dans des groupes avec les types desquels ils semblent,
au premier coup-d’oeil et à n’envisager que leur forme extérieure
, avoir une analogie frappante. L ’ordre des Rongeurs, ceux
des Chéiroptères et les Cétacés méritent de fixer spécialement
l’attention du naturaliste. Pour étudier ces animaux, il ne suffit
pas comme dans les autres ordres des mammifères, de consulter les
dépouilles comme moyen à-peu-près certain d'assigner à chaque
espèce la place exacte qui lui convient dans le catalogue systématique
des êtres; là , pour ne pas risquer de tomber dans l’erreur
, il faut nécessairement recourir aux indices que présentent
leurs organes intérieurs et leur charpente osseuse, particulièrement
dans la forme du crâne et dans les anomalies nombreuses de leur
système dentaire, étudié dans tous les âges, et sous toutes les formes
variées que la détrition exerce sur cet appareil de la mastication.
(1) Ce mémoire, accompagné seulement des figures du crâne, a paru depuis longtemps
dans un ouvrage périodique publié en Hollandais.
Sous le point de vue'de la denture, les Rongeurs offrent par leur système
très-peu compliqué, vu qu’ils n’ont que deux sortes de dents et
en petit nombre, un ordre très-naturel, mais en même temps très-
difficile à répartir en des coupes génériques, en ce que les espèces
ne présentent pas entr’elles un système de gradation ou d’homogénéité
dans la nature, la structure et le nombre des dents; et que les formes
extérieures de ces animaux ne servent pas toujours de premiers
indices, pour faire conjecturer un système de dentition souvent
très-disparate, tel qu’on a pu s’en assurer chez les espèces, dont
le genre de vie et les formes totales ne feraient soupçonner, en
aucune manière, une différence aussi importante dans la structure
et le nombre des dents. Dans ce cas sont, à très-peu d’exceptions
près, tout ces animaux isolés ou ces petits groupes composés d’un
nombre très-borné d’espèces, qu’on a cru nécessaire de distraire ,
à cause de leur formule dentaire, de la grande tribu du genre Mus
de Linné, groupe qui compte encore, nonobstant les nombreuses
réformes qu’on lui a fait subir, plusieurs espèces classées sous cette
dénomination collective, qu’un examen plus en détail servira à
en exclure, pour en former les types de groupes nouveaux qu’il
convient d’établir. Dans ce nombre des Muroïdes se trouve une
espèce très-remarquable qui fait le sujet du présent mémoire : elle
a été découverte à Malacca par le Major Anglais Farquhar et
se trouve indiquée dans le catalogue des animaux de Sumatra,
publié par feu Stamfort Raffles dans les Transactions Linnéennes,
vol. 13, pag. 258, en ces termes:
Mus Sumatrensis (i).
«Un dessin et un individu d’un animal, voisin du Mus pilori-
( î ) Cette malheureuse manie des dénominations de contrée donnée aux animaux, porte encore
ici à l’ établissement de l’erreur, en ce qu’elle ferait conjecturer l’existence de ce ron-
geur dans l’ île de Sumatra , tandis que les deux sujets que nous possédons, celui du Major
Farquhar et les deux crânes dont l’un à Paris et l’autre au Musée des Pays-Bas, proviennent
de Malacca.