lion de mon premier mémoire, mais sur laquelle les travaux récents
de mes collaborateurs précités, servent à répandre maintenant un
jour plus lumineux. Les documens historiques, les recherches faites
sur les lieux comme chez les peuples indigènes, l’analyse ainsi que la
comparaison minutieuse des individus des deux sexes et dans toutes
les périodes de l’âge, la vue d’un nombre considérable de squelettes,
mais surtout cette quantité de crânes, offerts en si grand nombre
à l’investigation; sont autant de matériaux qui plaident en faveur
de la première idée; car, selon les preuves fournies par le moyen
de toutes ces données, maintenant à notre disposition, il paraît qu’on
ne doit admettre qu’une seule espèce de singe orange et que s’il en
existe encore une autre, ce sera pour lors une découverte nouvelle,
sans doute l’une des plus remarquables qui aient été faites depuis
longtemps; mais dont on ne pourra plus prouver l’existence par
le moyen des matériaux connus aujourd’hui en Europe.
On s’est peut-être trop hâté d’ajouter quelque valeur à l’existence
d’un singe orang sur le continent de l’ Inde. Le crâne que Mr. W a l-
lich a envoyé de Calcutta au musée de Paris ne prouve rien, étant
dépourvu de toute indication d’origine; ce qui fait toutefois présumer
à Mr. de Blainville qu’il provient du continent, tandis que
Mr. Geoffroy le fait venir de Java, où il est bien démontré que ce
singe, vu la nature locale du pays, ne saurait exister et n’existe pas
réellement. Par contre, tous les voyageurs qui ont parcouru le continent,
presque dans toutes les directions, ne font aucune mention
de cet animal. En remontant à la source qui a pu servir à accréditer
la supposition de son existence sur le continent, on trouve
que les auteurs Chinois y ont donné lieu. Parmi les neuf espèces
de singes cités comme indigènes de cet empire, celle qui est indiquée
sous le nom de Sing-sing est la seule qui ait pu y donner lieu.
Il est dit dans celte histoire naturelle Chinoise, chap. 5 i . pag.' 3j ,
que le Sing-sing vit dans le Nagai-lao-i comme dans les vallées de
Kiao-tschi (Cochinchine);sou extérieur ressemble au chien; son poil
est jaune, de même que celui du singe aux bras longs, Inén-heû,
sans contredit d’après la figure un Hylobates. Le Sing-sing a les
oreilles blanches comme celles du cochon, la face elles pieds comme
ceux de l’homme, et de longs poils sur la tête. Ses traits sont expressifs;
sa voix est semblable aux cris d’un enfant, quelquefois aussi
aux aboietnens du chien. Il vit en société et court sur ses quatre
pattes. La figure qui accompagne celte description représente un
animal se tenant droit, ayant la queue et les bras courts et la tête
chitnériquement ornée. Tout porte à croire que cet animal a été
composé sur des contes populaires et qu’il doit être rangé parmi les
productions fabuleuses (1). Au reste, s’il existait un tel être voisin
ou semblable à l ’orang-outan en Cochinchine, on en aurait obtenu
quelques données par Mr. Diard, qui a séjourné assez longtems
dans ce pays et qui assure positivement le contraire. Il en est de
même pour Malacca, contrée récemment visitée par de nombreux
voyageurs, et parcourue par le Dr. Finlayson, le Major Farquhard
et Mr. Diard ; aucun n’a fait mention de l’existence de l’orang dans
cette partie de l’Inde.
On voit par tout ce qui vient d’être dit que l’on ne peut fournir
aucune preuve à l’appui de l’existence de l ’orang-outan sur le continent
de l’Inde. Il est notoire qu’il résulte des observations faites à
Bornéo et à Sumatra que cet animal ne vit jamais dans les contrées
en montagnes, comme il a toujours été présumé, mais seulement
dans les immenses delta formés de plaines basses, boisées et marécageuses,
exposées sous l’influence du soleil tropical. Comme l’ile de
Java ne possède nulle part des vastes plaines basses et boisées, on peut
en déduire que l’orang ne saurait y vivre et n’y a jamais existé. La
presqu’ile de Malacca, contrée iongue, étroite, entrecoupée dans
toute son étendue de chaines montueuses, manquant de grandes
rivières et n’offrant de plaines basses que sur le point rétréci de
l’isthme de K r a h , est aussi peu propre que Java à servir de de-
(1) Voyez pour plus de détails sur cette matière le mémoire précité de nos naturalistes voyageurs
où on a discuté au long toutes les données fournies par le docteur du Halde , par Abel de Rémusat.
et donné quelques détails tirés de l’encyclopédie Japonaise.