ces Européens par lesquels nous les
voyons opprimés, et qui prétendent
sur eux une si grande supériorité morale,
il ne s’ensuit pas que la nature
ait condamné nécessairement ces Hommes
à l’état de bêtes de somme, comme
incapables de civilisation. Si, au
lieu de leur porter des chaînes et des
dogmes incompréhensibles, les premiers
Blancs qui entrèrent en rapport
avec des Nègres , les eussent traités en
frères et leur eussent parlé le langage
de la simple raison ; si * au lieu de corrompre
leur ingénuité par l’introduction
d’un trafic scandaleux, en contradiction
avec les principes qu’on leur
prêchait, on leur eût donné de bons
exemples,.il est probable qu’on eût pu
les conduire assez promptement à
l’état de civilisation qui leur doit être
propre. Il n’est pas permis de douter ,
que le commerce des Éthiopiens avec
les Européens n’ait empêché chez les
premiers la consolidation d’un état
social naissant.
Avant que les Portugais eussent appris
aux peuples commerçans à désoler
les plages Africaines, les guerres y
devant être fort rares, nul intérêt ne
pouvait porter leurs habitans à se faire
de leurs semblables une marchandise
vivante ; nous n’avons aucune preuve
que les Nègres se mangeassent les uns
les autres plus qu’ils ne se mangent
aujourd’hui. Ils devaient au contraire
vivre dans l’indolence, mais certainement
moins à plaindre qu’ils ne le sont
depuis qu’on imagina qu’avec l’autorisation
du pape Léon X , on les pouvait,
sans remords , arracher à leur terre