riorité de ce qu ils appelaient l’Homme
dans 1 état de nature , sur l’Homme
civilise. Cet état de nature , tel qu’ils
se 1 imaginaient, ne saurait exister ;
ils y voulaient l’espèce composée d’individus
développés comme par enchantement,
robustes, fortement constitués,
aguerris contre l’intempérie des
saisons, n ayant de besoins que ceux
qu’ils pouvaient aussitôt satisfaire,
doues d une intelligence et d’une rectitude
de jugement que ne faussait
aucun des préjugés qu’on suppose
ctre inherens à 1 état social. Ils voyaient
dans chaque sauvage un Adam sorti
parfait des mains du Créateur. A la
connaissance près du bien et du mal
q u i, pour son bonheur, ne lui avait
pas été donnée , le sauvage des philosophes
, appréciant, par la supériorité
de l’instinct, la* nature entière, était
comme l’Homme du Béréshit, semblable
aux Dieux. Rien de mieux cadencé
et de plus pompeusement sonore
que le beau discours placé par Buffon
dans la bouche de son premier mortel,
qui, en même temps, eût été le premier
des orateurs; car, dans ce discours,
l’Adam fictif, analysant avec autant
de méthode que l’eût pu faire Con-
dillae, les sensations qu’il éprouva
pendant les vingt -quatre premières
heures de son existence, semble porter
la parole devant l’Académie Française
en séance publique. N’a-t-on pas, d’ailleurs,
osé imprimer naguère que «c’est
parmi les sauvages ou les barbares qu’il
nous faut aujourd’hui chercher la véritable
éloquence et la haute poésie,
qui ne se trouvent plus chez les peu