doués d’un esprit exact, sachant fort
bien qu’on ne connaît même pas positivement
le nombre des espèces
d’Hommes que nourrit l’Amérique,
ne peuvent croire qu’on soit en état
d’en compter d’avance les individus.
Ils n’admettent pas, pour fonder des
théories, de gratuites assertions comme
des vérités incontestables, quelle
que puisse être la célébrité de ceux
qui les prodiguent si légèrement en
compromettant leur réputation ; ils
veulent surtout, avant de croire et
d’admirer, qu’on leur soumette les
données authentiquement déduites,
d après lesquelles on établit ainsi du
positif. Pour nous, qui avons retenu
du prudent Bacon que le doute est le
chemin de la vérité, et qui ne croyons
pas qu’on puisse évaluer à quelques
millions près , le nombre des humains
qui vivent et gémissent aujourd’hui
sur la terre, nous ne voyons aucune
nécessité à spéculer sur ce qu’il ne
nous est pas donné d’approfondir. Ici
le cui bono ne serait peut-être pas déplacé/
Mais si l’estimation numérique des
individus dont se compose le genre
humain ne peut être assise sur la moindre
donnée raisonnable, et si la statistique
n’en peut être même essayée,
il n’est pas sans utilité de rechercher
dans quelles proportions les Hommes
se peuvent multiplier sur le globe,
selon la nature des institutions qui
les régissent. Les conséquences de ce
* Voyez. T. viii , p! 24g du Dictionnaire classique
d’Histoire Naturelle, chez Rey et Gravier,
quai des Augustins.