6 H i s t o i r e Na t u r e l l e
beaucoup les plus groffes Guenons & approchent de
la grandeur des Babouins; ils ont la queue prenante, &
font par conféquent de la famille des Sapajous, dans
laquelle ils tiennent un rang bien diftind, non-feulement
par leur taille, mais auffi par leur vo ix , qui retentit
comme un tambour & fe fait entendre à une très-grande
diflance. «Marcgrave raconte*, que tous les jours,
» matin & fo ir , les ouarines s’alTemblent dans les bois;
» que l ’un d’entr’eux prend une place élevée & fait ligne
« de la main aux autres de s’alfeoir autour de lui pour
« l ’écouter; que dès qu’il les voit placés, il commence
? un difcours à voix fi haute & fi précipitée, qu’à l’en-
» tendre de loin, on croiroit qu’ils crient tous enfemble ;
» que cependant il n’y en a qu’un feu l, & que pendant
« tout le temps qu’il parle, tous les autres font dans le
» plus grand fdence ; qu’enfuite lorfqu’il celle , il fait
« figne de la main aux autres de répondre, & qu’à l’inf-
« tant tous fe mettent à crier enfemble, jufqu’à ce que
« par un autre figne de la main, il leur ordonne le fi-
« lence; que dans le moment ils obéilïènt & fe taifent ;
» qu’enfin, alors le premier reprend fon difcours ou fa
» chanfon , & que ce n’eft qu’après l’avoir encore
» écoutée bien attentivement qu’ils fe féparent & rompent
l’alTemblée : » ces faits dont Marcgrave dit avoir
été plufieurs fois témoin, pourraient bien être exagérés
& allàifonnés d’un peu de merveilleux : le tout n’eft
peut-être fondé que fur le bruit effroyable que font
* Marcgrave. H 'ji. Brqf. p.ig. 226.
de L’OUARINE i f de l ’A lOUATE. 7
ces animaux ; ils ont dans la gorge une efpèce de tambour
olfeux dans la concavité duquel le fon de leur voix,
grolfit, fe multiplie & forme des hurlemens par écho ;
aulfi a'-t-on dillingué ces fapajous de tous les autres
par le nom de hurleurs : nous n’avons pas vu l’ouarine,
mais nous avons les dépouilles d’un alouate & un em-
brion defleché de cette même efpèce, dans lequel l’inf-
trunient du grand bruit, c ’eft-à-dire, l’os de la gorge
eft déjà très-fenfible *. Selon Marcgrave , l’ouarine
a la face large & carrée „ les yeux noirs & brillans, les
oreilles courtes & arrondies, la queue nue à fon extrémité
, avec laquelle il s’accroche & s’attache fermement
à tout ce qu’il peut embrafler : les poils de
tout le corps font noirs, longs, luifans & polis; despoils
plus longs fous le menton & fur la gorge lui
forment une efpèce de barbe ronde; le poil des mains,
des pieds & d’une partie de là queue eff brun. Le mâle
eft de la même couleur que la femelle, & il n’en différé,
qu en ce qu il eft un peu plus grand. Les femelles
* C e finge Alouate, eft un animal fàuvage, rouge-bai, fort gros,',
qui fait un bruit effroyable femblable à un râlement qu’on entend,
de bien loin, & c ’eft par le moyen de l’os hyoïde qui eft d’une
ftruélure fingulière. Barrère. Ejfai de l ’hijtoire naturelle de la France
Équin, page iy 0 .— Dans i’île Grande ou l’île Saint-George, fous
le T ro p iqu e , à deux lieues du continent de l’A ineïïque , il y a des
finges grands comme des veaux, qui font un bruit fi étrange, que
ceux qui n’y font pas accoutumés croient que les montagnes vont
s’écrouler...........Ils font très -farouches, Voyage de le Gentiltome £ „
page 1 y .