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place distincte, à cause des caractères particuliers qui lui sont propres. Jusqu’à
ce jou r , les taches de toutes les Genettes connues étaient d’une couleur uniforme,
et, si elles différaient, ce n’était guère que par leur nombre et leurs rapports. La
Panthérine, au contraire, a des taches qui sont autrement colorées dans leur
milieu que sur leurs bords.
Jusqu’à présent, on ne rencontre chez les Mammifères, je crois, d’espèces
à taches bordées, que parmi les Chats : ce sont les taches dites en rose qui
s’observent chez la Panthère, le Jaguar, etc. Ces dispositions n’existent point,
que je sache, chez aucune des nombreuses espèces de la famille des Martes. Je
crois même qu’à l’exception du Pérouasca, aucune Marte n’a de pelage tacheté, et
même le Pérouasca présente plutôt des ondesque des taches. Or, si de ce qu’il y a
plus d’analogie entre les couleurs des Genettes et celles de certains Chats, qu’entre
les couleurs de ceux-ci et celles des Martes, on se croyait en droit de conclure
qu’il y a des rapports plus intimes entre les Genettes et les Chats, qu’entre les
Chats et les Martes, on arriverait à une idée tout-à-fait fausse; car des organes
d’un ordre très-inférieur ne peuvent , à aucun égard, modifier des rapports
établis sur des organes d’un ordre supérieur, comme le sont les rapports des
Martes et des Chats, et l’on sait que de tous les systèmes d’organes, le pelage
est le plus variable; qu’on ne l’admet même que d’une manière conditionnelle
dansles caractères spécifiques.
Je ne pourrais développer ici la proposition que je viens d’établir, sans m’écarter
du but que je dois me proposer dans cet article, et si nous l’exprimons,
c’est que ce qui a été dit de cette espèce de Genette Panthérine nous fait voir que
les principes de la méthode naturelle n’ont point encore pénétré dans les meilleurs
esprits, comme on avait lieu de l’espérer, d’après les applications nombreuses qui
en ont été faites et l’exposition claire et méthodique qui en a plusieurs fois été
donnée.
La Genette Panthérine a toutes les proportions et la physionomie générale de
la Genette de Barbarie, mais elle est beaucoup plus grande ; sa longueur, du bout
du museau à l’origine de la queue, est d’environ yingt pouces ; sa queue en a
quinze, et sa hauteur moyenne est de six pouces. Tout le fond de son pelage
est d’un gris légèrement fauve, et cette dernière teinte se fait sentir davantage sur
la tê te , entre l’oeil et l’oreille, à la partie supérieure du co u , à la partie postérieure
des cuisses et à la partie supérieure de la queue. Des taches alongées, placées
à la suite l’une de l’autre, dont la partie moyenne est d’un fauve jaunâtre et
qui sont bordées de noir, se voient de chaque côté du cou ; -une ou deux taches
isolées, colorées de même, ornent les épaules, et deux rangs de six taches
chacun, semblables aux précédentes, se trouvent de chaque côté de la ligne
moyenne du dos qui est noire; d’autres taches simples et noires, plus ou moins
arrondies ou alongées et plus ou moins grandes, se peignent sur le bas du
co u , des épaules et à la face externe des jambes de devant. Deux rangs de
grosses taches noires et simples se trouvent sur le corps au-dessous des deux rangs
de taches bordées, et les cuisses, ainsi que la partie supérieure de la jambe de derrière
, sont garnies des mêmes taches. La queue est partagée en huit anneaux noirs
et sept blancs fort larges, et c’est par un anneau noir qu’elle se termine. On voit du
blanc au-dessus et au-dessous de l’oeil et sur la lèvre supérieure ; mais une teinte
noirâtre sépare le blanc du dessous de l’oeil de celui des lèvres. Tous les poils qui
constituent ce pelage sont gris-blanchâtres avec un anneau fauve et un noir à leur
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extrémité, et toutes les différences de'couleur de ses diverses parties, toutes les
taches que nous y avons vues résultent de la prédominance sur chacun de ces poils
de l’une ou de l’autre des trois couleurs dont ils sont teints pour la plupart.
C ’est M. Isidore Geoffroy qui a le premier fait connaître cette espèce ; il lui
donne le nom de Panthérine ( Pardina), et elle se trouve décrite dans le Magasin
de zoologie de M. Guérin, vne livraison.
Cette Genette avait été amenée en France du Sénégal ; mais il paraît qu’elle venait
de l’intérieur du pays. Elle se trouve encore à notre Ménagerie. On dit qu’elle
a vécu en liberté, et qu’alors elle était inoffensive pour tout le monde et très-
caressante pour les personnes qui l’avaient élevée. Aujourd’hui, renfermée dans
une cage, elle menace tous ceux qui l’approchent, et n’a pas voulu même encore
se familiariser avec ceux qui la soignent et la nourrissent. Malheureusement
on ne peut lui rendre sa liberté et la ramener par là dans les conditions les plus
favorables à l’exercice des heureuses facultés qu’on avait pris soin de développer
en e lle , les dispositions de la Ménagerie de notre Muséum n’ayant jamais'été
conçues dans la vue de faciliter l’étude du naturel des animaux.
Février i833.