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est de la taille du Chevreuil, ou même un peu plus grande ; elle a les bois forts, crochus
à leur extrémité, et donnant, en avant, à leur base, un petit andouiller : c’est celle
que mon oncle a décrite dans son ouvrage sur les Fossiles d’après les peaux envoyées
par Diard et Duvaucel; il donne avec soin la distribution de leurs couleurs, où l’on voit
dominer un fauve doré qui devient marron ou cannelle vers la croupe, et brun sur
la face externe des quatre jambes : le faon de cette espèce aurait’ une livrée. C’est à
cette espèce que s’appliquerait plus particulièrement la description de Horsfield, et
sans doute aussi celle de Raffles, bien que la description de cet auteur manque de
précision.
Une autre espèce paraît très-abondamment répandue dans la presqu’île de l’Inde
et sur le continent jusqu’au pied de la chaîne de l’Himalaya; elle est d’un bon tiers
plus petite que la précédente ; elle a des bois plus fins et plus grêles ; sa robe
paraît plus uniformément d’un beau fauve. Cette espèce serait le Cervus Ratwa de
Hodgson, et probablement aussi le Musk deer décrit et figuré dans les Collections
orientales pour 1798. Les individus mâle et femelle que nous avons pu observer à la
ménagerie, et que nous publions aujourd’hui, appartiennent à cette seconde espèce:
leur faon n’a pas de livrée, ainsi que nous venons de le constater, la femelle ayant
mis bas au commencement de ce mois. 11 faudrait aussi en rapprocher, pour la taille
et pour l’origine, le Chevreuil des Indes d’Allamand, si les couleurs, telles que les
décrit cet auteur, ne laissaient pas douter de l’exactitude de ce rapprochement.
L ’existence de deux espèces, au moins, de Muntjak, différentes pour la taille,
a déjà été admise par mon oncle, dans ses Recherches sur les ossements Jossiles
(T . IV, in>4°, p- 149) » d'après l'examen des têtes osseuses que possède le cabinet
d’anatomie. Le Cervus moschatus (1), établi par M. de Blainville, d’après une tête du
Muséum des chirurgiens de Londres, n’est aussi qu’un Muntjak, et mon oncle le
regardait comme n’étant que l’espèce de Sumatra ; cette conjecture s’est trouvée bien
confirmée par les recherches de M. Horsfield, qui a reconnu que la tête qui a servi à
la description de M. de Blainville, est la tête même de Muntjak qui est figurée par
Marsden, dans la troisième édition de son Histoire de Sumatra.
Ainsi donc, il y aurait à la fin du genre des Cerfs un petit groupe particulier caractérisé
par les longues meules qui portent les bois, où viendraient se ranger les espèces
que nous venons d’indiquer, et auquel il faudrait peut-être ajouter une espèce de cerf
des Philippines, dont M. Dussumier a rapporté la peau, et qui semblerait former,
par la disposition des pédicules des bois et par les couleurs de son pelage, une espèce
bien distincte.
Les Muntjak dont nous donnons aujourd’hui la figure, ont été rapportés de la
presqu’île indienne, par M. Dussumier, avec le zèle et les précautions qui ont rendu
le nom de cet honorable négociant si cher aux amis de l’histoire naturelle. Selon
M. Dussumier, ces animaux ne sont pas très-rares dans les environs de Bombay
et de Poonah, mais leur naturel timide et leur extrême légèreté font qu’on les prend
très-difficilement.
La robe de ces animaux est presque uniformément d’un fauve rougeâtre brillant ; le
cou est d’un ton moins v if et plus gris ; le menton, la gorge et le dessous du cou sont
d’un blanc un peu mêlé de gris ; les parties inférieures du tronc sont blanches, à l’exception
de la région sternale, qui est fauve avec une ligne moyenne noirâtre ; les membres
(1 ) Desmarest a mal copié ce nom dans sa Mammalogie, et en a fait u nC . Mosclius; c’est le même q u c lcG . Uosclialua.
MUNTJAK. 3
ont leur face externe fauve; quant à leur face interne, celle des jambes de derrière est
également fauve ; mais le dedans des cuisses est blanc, et cette couleur borde aussi le
bord antérieur de la cuisse; il n’y a pas de noir sur le tendon d’Achille; l’intérieur des
jambes de devant est, au contraire, blanc, sauf une légère ligne fauve vers le haut
en dedans du bras; i l y a beaucoup de blanc au-dessus des sabots; le dessus de la queue
est fauve et le dessous blanc; il y à une ligne noire sur la face, le long des plis
glanduleux du chanfrein et des pédicules des bois dans le mâle; dans la femelle, les
poils noirs régnent également sur le chanfrein, en deux lignes parallèles, et se rassemblent
sur le front, au-dessus de chaque oeil, en une sorte de petite houppe. Les poils
sont soyeux, gros, un peu cassants, gris à leur base, fauves ensuite, et ont la pointe
noire ou seulement brunâtre; beaucoup de poils fauves gris sont mêlés aux blancs
sur le ventre ; les poils sont plus longs sur le chanfrein et le long des pédicules des
bois; le mufle est grand et beau; le mâle a de longues canines saillantes; la femelle
en est également pourvue, mais elles sont moindres et ne se voient pas à l’extérieur;
les larmiers sont extrêmement profonds, et l’animal a la faculté de les ouvrir ou de
les resserrer; entre les racines des meules, au milieu du dessus de la tête, on voit les
deux plis de la peau qui ont frappé l’attention de tous les auteurs. Ces plis sont parallèles,
nus, dénaturé glanduleuse, et sécrètent une humeur huileuse qui a l’odeur
de l’oxyde de cuivre.
Les memes plis existent dans la femelle, mais elle les ouvre moins que le mâle ; elle
a aussi sur le front, cachée au milieu du bouquet de poils noirs de cette partie, une petite
proéminence charnue. Quant au maie, deux arêtes saillantes montent le long de la
face, jusqu’au-dessus des y eu x , où elles se dégagent du front en restant enveloppées
par la peau, et constituent ces meules longues et permanentes qui caractérisent d’une
manière si spéciale l’animal qui nous occupe.
Les Muntjak mâles paraissent aussi offrir une particularité qui servirait encore à
les isoler du reste des cerfs. Raffles et Horsfield rapportent déjà, mais encore avec
un peu de doute, que les bois de ces animaux ne tombent pas annuellement, comme
dans les autres espèces de ce genre ; on semble avoir observé qu’après les premiers
bois ou les dagues, qui tombent promptement, il apparaît une nouvelle paire de bois,
qui persiste pendant plusieurs années, et ne se renouvelle qu’à des intervalles irréguliers
, ou du moins très - éloignés. Ce que nous avons pu observer sur les deux
maies qu’a possédés la ménagerie, viendrait à l’appui de ces observations. Le premier,
celui que nous avons figuré, avait ses dagues en arrivant en i 835; ces dagues sont
tombées et elles ont été remplacées par de petits bois de quatre pouces de longueur,
rugueux à leur base: l’animal est mort en 1837 avec ces bois. Notre second individu
n’avait point de bois en arrivant au mois de septembre i 836. Il venait probablement
de perdre sa première tête ou ses dagues ; peu après son arrivée, il a poussé sa seconde
tête, et depuis lors il ne l’a pas renouvelée. Les bois qu’il porte aujourd’hui persistent,
par conséquent, depuis plus de deux ans ; ils ont des perlures à leurs bases avec un
petit tubercule ou rudiment d’andouiller, et sont recourbés à leur extrémité.
Le mâle et la femelle sont d’égale taille. Voici leurs principales mesures :
Longueur du corps, du bout du museau à l’origine de la queue, 2 pieds 9 pouces;
longueur de la queue, 3 pouces 6 lignes; hauteur aux épaules, 1 pied 5 pouces; hauteur
a la croupe, 1 pied 6 pouces; longueur de la tête, du bout du museau au sommet,
6 pouces 6 lignes.
Nos animaux paraissent avoir acquis tout leur développement; leur taille ne s’est