MULET D’UN BONNET-CHINOIS
E T
DUNE FEMELLE DE MACAQUE.
L es Mulets ne sont point, à proprement parler, des êtres naturels ; ils sont essentiellement
le produit de l’art, quoique la nature ait dû se prêter à leur création.
Sans artifice ou sans désordre dans le s voies ordinaires de la Providence, jamais
leur existence n’aurait été connue ; et dans le cas même où une interruption dans
les lois générales leur eût donné naissance, ils n’auraient subsisté qu’un jour ; ils
ne portent en eux que des principes de mort. Ce ne sont donc point des animaux
destinés à exercer quelque influence dans l’économie de notre monde, à
prendre une part active quelconque à l’équilibre que nous voyons régner sur la
terre, entre les productions de la nature. Considérés ainsi, ils ne devraient point
entrer dans l’Histoire naturelle proprement dite, qui en définitive n’a pour objet
que cette harmonie. Que sont en effet pour la nature, envisagée sous ce point de
vue , des êtres passagers qui n’occupent aucune place parmi les autres ? ce qu’est
un grain de sable aux mouvemens des vagues de la mer ! Cependant, si ces êtres
ne sont rien pour la création, ils occupent une assez grande place dans les théories
de la science, et ils peuvent être envisagés, relativement à la question de
la nature des espèces, comme les altérations de la vie le sont relativement aux lois
qui la régissent. Or, sur cette question de la nature des espèces repose le fondement
de l’Histoire naturelle.
Comme nous l’avons dit en faisant connaître les différens Mulets, dont nous avons
déjà eu occasion de parler, certaines constitutions et certains climats sont plus
favorables que d’autres à la reproduction de ces êtres ambigus. On en a conclu que
l’état du globe ayant changé, que les influences climatériques n’étant plus les mêmes,
un temps avait pu exister où les mulets, étant produits et se reproduisant, avaient
pu donner naissance aux espèces durables qui peuplent aujourd’hui la surface du
globe. C’est donc, comme on le voit, l’existence des Mulets qui, dans ces idées,
sert de principes à la zoologie ; cé n’est conséquemment pas sans raison que nous
rapportonsl es faits de la mammalogie qui se rattachent à une aussi haute question ;
mais en rapportant ces faits, nous nous imposons l’obligation d’examiner les théories
qui se fondent sur eux.
Nous ferons d’abord remarquer que cette idée de l’origine des espèces repose sur
la supposition qu’un temps fut où les espèces pouvaient produire, les unes avec
les autres, des espèces intermédiaires jouissant de la faculté de se perpétuer; o r ,
en bonne logique, une supposition ne peut donner lieu qu’à des suppositions, et
des faits douteux ne peuvent devenir les principes d’une science positive.
Tant que ces inductions sur l’origine des espèces conserveraient leur caractère
hypothétique, et que les conséquences qu’on en tirerait ne seraient présentées que