
 
		LE  CAMPAGNOL  DES  PRAIRIES. 
 L orsqu’on réunit les animaux dont les auteur sont parlé  comme étant des Campagnols,  
 on  trouve  qu’il  en  existerait  déjà  de  trentë  à  quarante  espèces,  et  comme  on  n’a ,  
 sur la  nature de  ces  espèces,  que  des notions  fort  incomplètes,  il  devient  impossible  
 de  les  comparer  rigoureusement  les  unes  aux  autres,  de  reconnaître  en  quoi  
 elles  se  ressemblent  et  diffèrent,  et  enfin  de  décider  jusqu’à  quel  point  en  effet  
 elles  constituent  des  espèces  distinctes.  Ces  rongeurs  auraient  besoin  d’être  
 soumis  à une  étude  nouvelle;  mais  ce  travail  ne  peut  pas  être  entrepris  aujourd’hui  
 par  un  seul  naturaliste;  car  il  n’en  est  aucun qui  soit  parvenu  à  réunir  des  
 individus de  ces  trente ou  quarante  espèces,  de manière  à pouvoir  les  étudier  dans  
 leurs  parties  principales.  En  effet,  le  plus  grand  nombre  de  ces  espèces  vient  de  
 Sibérie  ou de  l’Amérique  septentrionale  ;  les  autres  viennent de  l’Europe,  de  l’A mérique  
 méridionale  et  du  centre  de  l’Asie :  une  ou deux  espèces  seulement  sont  
 originaires d’Afrique. Or,  les  relations  des  naturalistes  de  ces différentes  parties  du  
 monde  ne  sont  ni  assez  fréquentes  ni  assez  rapides,  pour  que  l’un  d’entre  eux  
 puisse  rassembler,  même  successivement,  des  dépouilles d’animaux  qui  vivent  en  
 partie  dans  des  lieux presque déserts.  On  a  été  quarante  ans  avant d’avoir retrouvé  
 l’occasion  de  vérifier par  de  nouvelles  observations  celles  que  Pallas  avait  publiées  
 sur  ses  rongeurs;  et  il  est  encore  un  bon  nombre  des  animaux  découverts  par  ce  
 savant  illustre qui  restent  indéterminés.  Ce  n’est donc que  par  un  concert d’efforts  
 bien  dirigés  qu’on  réalisera  quelque  jour  le  voeu  que  nous  formons  aujourd’hui  
 pour  une nouvelle  étude  des  Campagnols. 
 Depuis  long-temps  on  sait en France qu’il  existe dans  plusieurs  de  nos  provinces  
 des  Campagnols  qui  diffèrent  par  leurs  couleurs  et  par  les  proportions  de  quelques  
 unes  de  leurs  parties,  et  par  ce  nom  je  n’entends  désigner  ni  le  Rat  d’eau,  
 ni le  Schermaus,  qui  sont  aussi des Campagnols  de  notre pays;  j ’entends parler du  
 Campagnol  proprement  dit,  qui  vit  au milieu  de  nos  champs,  et  des  espèces  qui  
 se  rapprochent de lui  par la  petitesse  de  leur taille. 
 Daubenton  (Buffon,  t.  VIII,  p.  372),  avait  fait  remarquer  qu’on  trouvait  des  
 Campagnols  dont  le  pelage  était  plus  gris,  et  la  queue  plus  longue  que  chez  le  
 Campagnol  ordinaire.  Mais  cette  observation  n’avait  donné  lieu  à  aucune  recherche  
 ultérieure,  et  l’on  s’était contenté  d’indiquer ces différences,  et quelquefois  
 de  les donner pour  types  de  variétés  dans  l’espèce  commune. 
 M.  Bâillon  d’Abbeville,  correspondant  du Muséum  d’Histoire Naturelle de Paris,  
 dont  le  nom  est  depuis  long-temps  cher  aux  naturalistes,  et  à  qui  la  science  
 doit  tant d’observations  curieuses,  s’est  appliqué  à  poursuivre  le  fait  rapporté par  
 Daubenton,  et  à  rechercher  dans  le  département  qu’il  habite  les  différences  que  
 présentent  les  petits  animaux  qui  ont  généralement  été  confondus  sous  le  nom  
 commun  de  Campagnols,  et  nous devons  à  ses  recherches  et  à  sa bienveillance de  
 pouvoir  publier  l’espèce  qui  fait  l’objet  de  cet  article. 
 Le Campagnol  proprement dit, celui  que les  auteurs méthodistes désignent par  les  
 noms  d'Arvalis  et  d'/¿grésils,  a  trois  pieds  environ du  bout  du museau  à  l’origine